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E n'ai garde de m'attribuer le mérite de cet Ouvrage: je n'en dois le fuccès qu'à l'immortel Au

teur qui m'en a fourni l'idée. Une feule éteincelle de fon génie fuffit pour animer; c'eft le feu créateur.

J'ai la même obligation à M. de Marmontel. Tout ce qu'on a trouvé de plus piquant daus Soliman & dans Annette, n'appartient qu'à lui. Il a fait naître les fleurs ; j'ai eu le bonheur de les cueillir.

* M. de Voltaire.

ACTEURS.

DUPRÍ.

DORLIS.

Madame GERTRUDE.

ISABELLE.

Madame FURET.

AMBROISE Jardinier, qui ne paroit point.

La Scène eft dans la Maifon de Madame Gertrude.

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Le Théâtre représente un Jardin agréable; mais qui à l'air d'une Solitude. On y voit de grands arbres touffus qui forment des allées. A droite, eft un Pavillon d'Architecture fur une terraffe à laquelle on monte par cinq ou fix degrés. Les portes font vitrées, mais garnies de rideaux épais; ces portes, qui comprennent toute la façade du Pavillon, laifSent voir, lorfqu'elles font ouvertes, l'intérieur du Sallon meublé avec élégance; on y découvre une Toilette & deux fiéges. Il y a une porte fecrette qui répond à un petit fentier couvert de Myrthes, de Jafmin & de Rofes. Le Ciel eft fans nuages, & la Lune, qui eft dans fon plein, paroît audeffus des arbres, & éclaire tout le Jardin.

SCENE

PREMIERE.

On joue une ouverture, pendant laquelle on voit Dupré, couvert d'un manteau avec une lanterne fourde à la main, monter le petit efcalier dérobé, & entrer avec myftere dans le Pavillon, qui paroît éclairé un inftant après.

par

L

DORLIS.

E cœur me bat de crainte & de joie : de quel côté tourner ?.... Si je fçavois le réduit qu'elle

habite
.. fi je fçavois.... je tremble d'être
découvert. Il fait clair comme en plein jour. Raf-
furons-nous. Quoiqu'il foit encore de bonne heure,
out le monde doit être déja retiré dans une maison
auffi réglée que celle ci. Tout doit dormir, excepté
un cœur fenfible, agité d'une douce inquiétude,

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O nuit, charmante nuit! fois propice à l'Amour;
Et tu feras, pour moi, plus belle qu'un beau jour.
Dormez, dormez, cœurs infenfibles,

Et laiffez-nous jouir des plus heureux momens.
Q nuit! fous tes ombres paifibles,
Affoupis les Jaloux, éveille les Amans;
Attire en ce lieu folitaire

L'objet de mes plus chers defirs:
Cache l'Amour & fes plaifirs
Sous le voile épais du myftere.
Mon cœur languit dans la fouffrance,
Quels maux on éprouve en aimant!
Mais je préfere mon tourment

Au néant de l'indifférence,

O nuit ! &c.

Examinons d'abord le local. Voici un arbre plus haut que les autres: fi j'y montois pour découvrir....

(Il monte fur un arbre.)

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SCENE I I.

1

DORLIS, DUPRÉ.

DUPRÉ, dans le Pavillon

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ouvre les portes

regarde une Pendule, & dit:

IL n'eft que neuf heures & demie. Il n'est pas

tard que je penfois.

DORLIS, fur Parbre.

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Voilà d'autres arbres qui m'empêchent de voir. DUPRÉ.

Elle ne viendra pas d'une demi-heure à quoi m'occuper en l'attendant? Voilà un livre à côté de ce Ea pot de rouge: les Penfées de Séneque. La morale s'accorde toujours avec le defir de plaire.

Defcendons.

DORLIS.

DUPRÉ.

Quel eft cet autre ouvert & marqué par une mouche de velours? l'Androgyne de Platon. eu maximes intellectuelles qui prouvent que le véritable amour confifte fimplement dans l'union des ames. Au diable foit l'ouvrage; il n'a rien de folide. Notes fur le Comte de Gabalis, où l'on traite de la réalité & de l'apparition des fubftances Aériennes. On reconnoît toujours les gens au choix de leurs Livres.

DORLIS, à part.

Je vois ici de la lumiere.

DUPRÉ, à part.

J'entends du bruit.

A iv

t

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C'eft-elle venez, venez donc, Madame Ger

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Madame Gertrude !

(Dorlis, en voulant fe fauver, renverse une chaife de jardin.)

DUPRE

Qui va là? Que vois-je? c'eft Dorlis.

DORLIS. G

C'est vous, mon oncle Dupré?

DUPRE

Que viens tu faire ici?

DORLIS,

Et vous-même, mon oncle?

DUPRÉ.

Commence par me répondre. (A part.) Vient-il

pour m'efpionner?

DORLIS.

Madame Gertrude eft-elle là?

DUPRÉ, avec émotion.

Non; pourquoi ?

DORLIS.

Ah! mon cher oncle, je me confie à vous; ne lui dites pas que j'aime fa fille,

DUPRÉ, à part.

Il me raffure. (Haut.) Tu aimes fa fille? Ah! je fçavois, je fçavois bien; & c'est pour te furprendre que je viens ici tous les foirs.

DORLIS.

Tous les foirs? pour me furprendre? Allons, allons

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