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A MONSEIGNEUR

LE DAUPHIN

FILS UNIQUE DU ROY,

EPITRE.

PRINCE, n'eft-il pas vrai que fans expé

rience,

Je devois plus long-temps refter dans le filence,
Attendant que ma Mufe, enfin dans fa vigueur,
Pût chanter ton Hiftoire un jour avec honneur?
Car n'ayant à préfent qu'une tremblante veine,
Tu la verras manquer & de force & d'haleine;
Et peut-être fouvent contrainte de quitter
Un fardeau qui pour elle eft trop lourd à

porter,

Et cedant à regret au beau feu qui l'anime,
Maudire de nos Vers la cadence & la rime.
Ainfi donc fans fecours, Ecolier que je fuis,
Bégayer ma pensée est tout ce que je puis.
Ne fçachant pas encor le chemin du Parnaffe,
En cette extrêmité que veux-tu que je fasse ?
Moi qui ne fais encor que fortir du Berceau,
Et qui fuis des neuf Soeurs un Nourriffon nouveau;

C

Je n'ai garde d'aller, dans mon apprentissage,
A l'abri de ton Nom composer un ouvrage.
Je crains que mon esprit, dans son obscurité,
De cet augufte Nom terniffant la beauté,
Plein d'un fujet fi noble, en exerçant ma Muse,
Ne puiffe voir affez pour voir que je m'abuse.

Il eft vrai cependant, qu'effayant dans ces Vers,
D'étaler tes vertus aux yeux de l'Univers;
Et faifant voir que Dieu, pour nous montrer qu'il
t'aime,

T'a donné des enfans dignes du Diadême ; Foible comme je fuis, par amour transporté, J'allois chanter ton Nom fans m'étre confulté, Et donnant librement l'effor à mon génie, Suivre avec imprudence une vaine manie: PRINCE, j'allois montrer qu'un cœur tiéde,

abattu

Trouve en toi le fecours qui manque à sa vertu ; J'allois continuer d'écrire ton Hiftoire > Publier, en chantant, & ton Nom & ta gloire. Qu'au camp de Philifbourg, on vid les Ennemis, Vaincus par ta valeur, à ton pouvoir foûmis; Que, dans cette action, ton bras & ta prudence Firent bien voir alors ce que pouvoit la France, Et que par ton éclat, les foldats éblouis

Connurent la valeur d'un Fils né de LOUIS:

Enfin j'allois, traçant avec mon foible stile
Un portrait réservé pour une plume habile,
Produire, en te louant, mon prémier coup d'effai,
Quand voyant ma foibleffe, à l'instant je cessai.
Ainfi donc ce fujet, ayant trop d'abondance,
M'oblige malgré moi de garder le filence.
Je ne puis qu'admirer ton éclat glorieux;
Mais je prie ardemment que le Maître des Cieux,
Qui tient entre fes mains toutes nos destinées,

Te conserve avec nous un grand nombre d'années ;

Et pour récompenser tes vertus à jamais,
Te donne après la vie une éternelle paix,

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de la Compagnie des Gendarmes du
Roi, & Lieutenant Général de fes
Armées.

EPITRE.

PRINCE, dont la valeur & la tare prudence,

Ont dans plus d'un combat fait triompher la
France,

Et qui, fans t'étonner au milieu des hazards,
As par tes beaux exploits égalé les Céfars.
N'attend pas, qu'en donnant l'effor à mon génie,
J'aille entreprendre ici l'Hiftoire de ta vie.
Un ouvrage fi beau, fi grand & fi fécond,
Eblouit mon efprit, l'étonne, & le confond.
Et qui pourroit en Vers, d'un ftile affez fublime,
Atteindre jufqu'à toi, quelqu'ardeur qui l'anime?
Quel Poéte pourroit par fes expreflions,

Décrivant feulement tes moindres actions,

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Te dépeindre tout jeune, auffi vaillant que fage, Quand tu fus en Hongrie * exercer ton courage, S Godart Où par ce coup d'effai qui fut fi glorieux,

* A l'e

Tu fis renaître en toi l'honneur de tes ayeux.
On vid, PRINCE, dèflors ce que tu devois être;
Ce prémier coup d'effai valut un coup de Maître.
Mais tu reçus le jour d'un trop illuftre Sang,
Pour ne pas foutenir la gloire de ton rang.
Ce n'étoit, il eft vrai, que ton apprentiffage,
Tout ceda cependant à ton noble courage;
Et quand on fut en fuite attaquer Charleroi,
A-t-il pû, quoiqu'il fift, réfifter devant toi?
Non pour te réfifter l'effort eft inutile.
Déja Doüai, Tournai fe rendent avec Lifle;
Lifle, où parmi les feux tu cours de toutes parts,
Où tout eft plein d'effroi devant nos étendarts,
Où le Roi combattant, void lui-même en per-
fonne,

Combattre en toi celui qui défend fa Couronne.
La Hollande frémit, & Maftrich aux abois,
Témoin de ta valeur, vient recevoir nos loix.
Rien ne peut t'arrêter: tu paffes à la nage
Le Rhin, Fleuve orgueilleux, qui coupoit ton
paffage.

Là Senef qui fe rend, reconnoît ton pouvoir;
Ici Mons afficgé fe range à fon devoir;

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