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Vers font pour le moins auffi beaux que ceux de Malherbe & comparaifon pour comparaison, la nôtre vaut bien la fienne. Or dans celleci que nous n'avons fçû faire plus courte, parceque nous l'avons augmentée de deux Vers qui ne font point dans l'Original, nous avons placé le Tò, à vagues épandues de l'Auteur, que nous n'avions pû met. tre dans notre prémiere amplification : & de plus nous avons changé en mieux ce Vers de Malherbe : Ce qu'il trouve il le ravage.

Certainement il feroit fort utile de donner ainfi aux jeunes Poétes des Vers de nos meilleurs Auteurs à retourner & à amplifier, ou à racourcir; car il eft plus difficile de refferrer une belle penfée, qu'il ne l'eft de l'étendre, c'est ce que je me fuis proposé de montrer dans mon Art Poétique. Mais revenons à notre fujet.

Nous parlions des Vers de huit fillabes que nous difions être les

plus aifez de tous à faire, principalement dans le ftile Burlesque. Et maintenant j'ajoûte que plus les Vers font courts, plus ils demandent qu'on employe de Vers pour expliquer une pensée. On vient de voir un exemple dans la période de dix Vers de la comparaison ci-def fus.

Ce fera encore pis fi le Vers eft plus court, il faudra multiplier les Vers néceffairement, au lieu que dans un Vers Alexandrin, on place beaucoup de mots, & par confequent beaucoup de chofes, qui eft ce que j'avois à prouver. Ayant fuffifamment parlé des Vers plus ou moins difficiles à faire, à caufe de la mefure, je vas donner ici en peu de mots le dénombrement des Poé. fies qui font plus aifées ou plus dif ficiles à faire fuivant leur genre, & la conftruction des Vers. Cette érudition eft de feu M. de la Fontaine. Les Fables font le genre d'écrire le plus aifé, après le Burlesque.

Les Contes vont après, les Cantiques & les Chansons.

Le Poéme héroïque, dont les rimes font fuivies, après.

Enfuite l'Ode.

Enfin le Sonnet.

Pour les Rondeaux, les Ballades, & les Chants Royaux, ils ont de la difficulté, & on ne peut bien en parler. Les Opera font plus faciles que les Poémes Dramatiques en Vers Alexandrins, comme ceux de Mrs Corneille & Racine. Le Comique plus facile beaucoup que le Tragique.

La Satire prefque auffi facile que le Burlesque. Ainfi ce n'eft pas un grand fujet de louange, que d'être paffable faifeur de Satires, & d'Epîtres, de Madrigaux, & d'Epigram

mes.

L'Ode donc, fans contredit, le Sonnet, & le Chant Royal; font les Ouvrages de Vers les plus difficiles à mener à bien, j'entends à quelque degré de perfection, tel qu'eft, par

exemple, la belle Ode de feu M. Chapelain au Cardinal de Richelieu, & celle de M. de la Fontaine au Roy en faveur de M. Fouquet fon Patron, prifonnier alors à la Baftille. Et à ce fujet il me reste encore une remarque fort importante à faire.

C'est que des Vers tels que ceux de Lingendes pour Ovide.

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Ovide, c'est à tort que tu veux mettre Augufte
Au rang des immortels, &c.

Ces Vers, dis-je, font très-faciles, & la raifon faûte aux yeux c'eft qu'ils ont pour renfermer un fens dix-huit fillabes, fans compter la fillabe furnumeraire qui eft à la fin du Vers féminin. Voilà ce que j'avois à dire.

Mais avant que de finir, pour fuivre la méthode que j'ai gardée jufqu'à prefent, je vais expliquer en peu de mors l'ufage des Vers de huit, de fept, & de fix fillabes, dont on a parlé dans cet Article.

Ufages des Vers de huit, de fept, & de fix fillabes.

Les Vers de huit fillabes, auffibien que ceux de douze, font les plus anciens Vers François ; & ils ont auffi les mêmes ufages. Voyez la Regle de l'usage des Vers de douze fillabes, à la fin de l'Article second du premier Chapitre, pag. 43.

Les Vers de fept fillabes ont de l'harmonie ; ils font propres à exprimer les choses très-vivement; c'est pourquoi ils fervent à compofer de fort belles Odes, des Sonnets, & plus ordinairement des Epîtres, des Chanfons, des Contes, & des Epigrammes.

Les Vers de fix fillabes fervoient autrefois à compofer des Odes & des Epigrammes entieres; mais aujourd'hui on ne s'en fert prefque que dans les Chanfons, & d'autres petites pieces. Continuons nos remarques.

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