EXEMPLE. L'Empereur qui meurtrit & fa mere, & fes femmes, Et fon frere, & fa foeur, & fes meilleurs amis. Ou fans aucune conjonction, EXEMPLE. L'Empereur qui meurtrit cruellement sa mere, Ses femmes, fes enfans, tous fes freres, fes fœurs, Il eft vifible qu'il n'y a aucun enjambement dans ces Vers. Mais, Au fommet d'une Tour, du troifiéme Vers en eft un certainement, parceque le fens finit abfolu ment là, quoique le Poéte ait crû lier le fens & le continuer par fon (cependant) & ne le fermer entiérement qu'au qu'atriéme & dernier Vers. Or ces exemples d'enjambement de notre Auteur, font donc mal choifis, en voici de mieux marquez, que je viens de faire exprès. EXEMPLES. Il faut changer de vie, & dès l'inftant quitter Le peché. C'est ainsi que l'on r'entre en la grace Que l'on avoit perdue. On ne peut, quoi qu'on faffe, Aimer autrement Dieu, &c. Voilà des enjambemens bien marquez, & qu'on doit regarder comme de très-grandes fautes dans les Vers. Mais afin qu'on ne s'imagine pas que la conjugaifon (&) dans un Vers empêche l'enjambement: voici encore un exemple où elle fe trouve, & où l'enjambement, quoique tout à fait moins marqué, ne laiffe pas d'étre véritable. EXEMPLE. Je fens bien que je fais, fans pouvoir m'en dé fendre, Un crime & fi mon pere alloit un jour ap : prendre, Que mon amour pour vous me fait tout négliger, Peut-être à S, Lazare il pourroit me loger. Il faut avouer néanmoins que l'enjambement qui eft au fecond de ces derniers Vers ci, n'eft pas, de beaucoup près, fi confidérable que ceux des Vers que j'ai rapportez auparavant : & la raison de cela eft, que l'e conjonctif le diminue, & le rend plus fupportable en mangeant l'e féminin qui le précede. Mais il eft toujours mieux d'éviter de pareils enjambemens, quoi qu'à la vérité ils ne foient pas de cette façon une fi grande faute dans les Vers, & qu'on les puiffe confiderer comme des défauts legers, aufquels on ne doit point s'arrêter, quand d'ailleurs le fens eft beau; felon ce que dit Horace. Non ego paucis offendar maculis. Pour moi, fi je l'ofe dire encore, tel a toujours été mon fentiment. Quand un Auteur renferme un beau fens dans ce qu'il dit; que d'ailleurs fes expreffions font juftes, & que, bien loin de reffembler à ceux, Qui croiroient s'abaiser dans leurs Vers mon. ftrueux, S'ils penfoient ce qu'un aurre a pû penser com me eux. Ne m'offre au contraire par tout dans fon Ouvrage que des pensées auffi naturelles, que noblement exprimées ; je croi, qu'en faveur de tout cela, il mérite quelque indulgence, & que ce feroit avoir une trop grande févérité, & commettre quelqu'efpece d'injustice, fi, contre се que dit Horace, On condamnoit en lui des défauts fi légers. Davantage, c'eft quelquefois mê me une beauté, que le fens finiffe au commencement, où à l'hémistiche d'un Vers. EXEMPLE. Je fens bien que je fais, fans pouvoir m'en défendre, Un crime.... mais l'amour a-t-il de la raifon? Cela feroit excellent dans un Poéme dramatique ; cependant l'enjambement est très-bien marqué dans cette derniere leçon. Mais cette régle n'excufe pas les fautes qui fe trouvent en plus d'un endroit dans le Poeme de Clovis, de feu J. Defmarets. En voici entr'autres un exemple tiré du Livre 1x, page 176 de la troifiéme édition in octavo. Mais j'entends quelque bruit. . . . Sçache en Cela feroit bien commode s'il étoit permis de faire ainsi des Vers: on ne peut achever fon fens; on l'interrompt par des points.... Et puis |