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1 43 4.

guerre n'étoit pas finie, que Coapchon s'étoit renfermé dans Colnitz avec toute la cavalerie, & qu'il y prétendoit rétablir l'armée; que l'unique moyen de prévenir fes deffeins, étoit de l'inveftir inceffamment; mais qu'on ne pouvoit ni entreprendre ni exécuter ce projet fans l'affiftance de tant de braves foldats, qui s'étoient rendus & experimentez fous la difcipline de Zifca: que les états du royaume vouloient affigner une penfion à chacun d'eux fur les deniers publics, pour leur marquer l'eftime honorable qu'ils en faifoient,& que pour empêcher qu'il ne le gliffåt parmi eux ce qu'on appelle paffe-volans, on prioit les vrais foldats de paffer tous dans les granges voifines, & ceux qui ne l'étoient point, de retourner dans leurs maifons.

Les foldats Huffites furent affez crédules,

pour s'imaginer qu'on vouloit fe fervir d'eux I CVI. pour ruiner Coapchon; mais ce n'étoit pas-là 1ls font le deffein de Maynard. Ils fe féparerent donc tous bruiez des foldats inutiles, en fe retirant dans les dans des granges qu'on leur avoit montrées. Ils y trou

granges,

verent une grande abondance de viandes & de vin qu'on leur avoit préparé,& s'en remplirent. Quand on les vit plongez dans un profond fommeil, l'armée catholique inveftit les granges au milieu de la nuit, de peur que quelqu'un n'échapât, & y mit le feu. Comme les murailles n'étoient prefque que de bois, & les couvertures que de chaume, elles furent bien-tôt embrasées. Ainfi périt l'armée que Zifca avoit formée & aguerrie, & qui avoit ravagé durant vingt ans les plus riches provinees du feptentrion. Ces foldats étoient prefque tous grands & extrêmement robuftes; ils étoient tellement endurcis au travail & aux injures du tems, que rien n'étoit capable d'alterer leur temperamment. Leur peau étoit devenue fi dure, qu'il fembloit qu'en

un besoin elle eût pu fervir de cuiraffe : on ne pouvoit les voir fans une certaine frayeur; car A.1434. outre qu'ils étoient très-bafannez, & qu'ils n'ahabits que des

voient

de bêtes fepour peaux roces, ils négligeoient de fe peigner, & laiffoient croître leur barbe d'une maniere indécente & qui infpiroit la terreur.

L'empereur Sigifmond étoit alors à Ulm. Dès qu'il eut appris ces nouvelles, il en écrivit au concile, & envoya ses ambassadeurs en Bohême, afin qu'ils travaillaffent à l'y faire reconnoître roi, comme légitime heritier de fon frere Venceslas. Pendant ce tems-là les députez du concile à Bohême, fe trouvant débaraffez de l'armée Huffite plûtôt qu'ils ne pensoient, & délivrez par là du grand obftacle de la réconciliation de la Bohême avec l'église catholique, ils y travaillerent avec ardeur, & la conclurent en peu de semaines, à la fatisfaction des peres

du concile.

CVII.

Députa

à

Les Bohémiens vinrent auffi en grand nombre trouver Sigifmond à Ratisbonne où il étoit tion du allé, & le saluerent comme leur roi. Coap- concile chon & Rockfyzanes ne les accompagnerent l'affemblée point, mais ils y vinrent en particulier pour de Ratifleurs propres affaires. Le concile y envoya de bonne. même ceux qu'il avoit députez à Bohême. Æn. Sylv. L'empereur témoigna aux uns & aux autres la hift. Bobem. joye qu'il reffentoit de l'union qu'ils venoient c.5. de faire,& recommanda aux Bohémiens d'exé- Krantz. 11. cuter avec fidelité les articles de la convention Vvendel. qu'ils avoient jurée. Sponde appuyé sur des actes manufcrits du college de Navarre dit qu'il hift. Huffit. y eut en préfence de l'empereur une difpute 16. 8, affez vive au fujet de la communion fous les deux efpeces entre les députez du concile; & plufieurs Bohémiens qui n'avoient point confenti à l'union qui venoit d'être faite avec les

32.

Cochlée

autres. Ces obftinez vouloient qu'on contraignit I 43 4. les Catholiques de Bohême à communier ainfi, quoiqu'ils ne le demandaffent pas: mais l'empereur & les députez le refuserent absolument; ils ne leur permirent pas non plus d'entrer dans l'églife avec les Catholiques, & l'un d'eux étant mort à Ratisbone, on lui refusa la fepulture ecclefiaftique. On trouve dans les mêmes ac

CVIII.

l'empereur

Plaintes de tes que l'empereur fe plaignit aux députez du de la con- concile du mépris de celui-ci à son égard fur duite du beaucoup d'articles, entr'autres d'avoir écrit

concile.

pendant qu'il étoit en Italie, au duc de Milan pour le recouvrement du patrimoine de l'églife, & non pas à lui-même, quoique ce fut aux empereurs,& non pas aux ducs de Milan, à qui l'églife étoit redevable de ces biens: de ce qu'étant à Bafle le concile avoit réfolu d'envoyer le cardinal de Chypre & d'autres au pape fans l'avoir confulté; de ce que le concile traitoit, au préjudice de l'empire, de beaucoup de chofes dont la connoiffance ne lui appartenoit pas; il ajoûta que c'étoit à caufe de ce peu de déference qu'on avoit pour lui, qu'il s'étoit retiré du concile. Il promit cependant de lui continuer fa protection, & même de s'y trouver en perfonne, fi l'on vouloit foigneufement s'appliquer à la réformation & aux affaires pour lefquelles les peres étoient affemblez. Etant à Ulm il avoit fait d'autres plaintes au concile dans deux lettres qu'il lui écrivit le vingt-huitiéme de Juillet au fujet de la caufe qui étoit entre les ducs deSaxe touchant ce duché, les droits & fes charges. Un de ces ducs avoit déferé l'affaire au jugement du concile; mais Sigif mond prétendoit que cela appartenoit au jugement de l'empire;& il difoit dans ces lettres qu'il proteftoit publiquement contre la décifion du concile, s'il ne s'en déportoit entierement.

Le cinquiéme de Juillet Eric roi de Dannemark, de Suede & de Norvege, avec les arche- 14 3 4. vêques & évêques de ces royaumes, écrivirent au concile pour la défense de la regle de l'ordre de faint Sauveur inftitué par fainte Biigite. Foi Eric au Ces lettres furent luës dans une congrégation concile particuliere le vingt-fixiéme de Mars de l'an

née fuivante. Les états d'Eric étoient alors fort

CIX. Lettre du

CX.

Kramz. 1.

Dan. 18. &

Sey.

troublez, & particulierement celui de Suede, Troubles à cause des fubfides & impôts exorbitans que du royaules gouverneurs exigeoient par une déteftable me de Sueavarice, & même du confentement du roi qui de vouloit par-là fe dédomager de la dépenfe neceffaire dans les longues guerres qu'il avoit eues en Allemagne, fans aucun égard aux prieres de de la nobleffe & du peuple. Tout cela caufa une révolte prefque generale, à la tête de laquelle étoit un nommé Angelbert, petit gentile homme, qui fit de fi grands progrez, qu'il mit prefque toute la Suede en liberté, & en chaffa les Danois qui y commandoient. Cependant deux ans après il fut tué.

CXI.

Retraite

VIII. duc de Savoie,

hermite.

Amed.

Dans la même année arriva la retraite d'Amedée VIII, duc de Savoie, qui réfolut de quit- d'Amedée ter le monde, laiffant fes états à fes deux fils Louis & Philippe, & nommant fix feigneurs ågez & de beaucoup d'experience pour leur fer- qui fe fait vir de confeillers. Il fe revêtit d'une longue robe de gros drap, il prit une ceinture large un bâton plein de nœuds, il laiffa croître fa Pacif. n. 8. barbe & fes cheveux fans les peigner, & fe retira le feptiéme deNovembre à Ripailles prieuré proche le lac de Genéve, où il fonda lordre de faint Maurice. Il n'avoit que huit ans lorfque fon pere Amedée VII. mourut en 1591. & quand il fut en âge, il gouverna avec tant de probité & de prudence, qu'il merita le furnom de pacifique. Il fit ériger la Savoie en duché

l'an 1416. Il fut genereux, amateur de la juftiAN. 1434, ce, maintint toûjours fes états en paix, pendant fes voifins étoient en guerre; ce qui que

CXII.

Mort de

Uladiflas Magellon toi de, Po, logne.

20.

fut caufe qu'on l'appella le Salomon de fon fiecie, & que les plus grands princes le prirent fouvent pour arbitre de leurs differends.

Uladillas Jagellon roi de Pologne mourut à l'âge de quatre-vingts ans, après quarante-neuf ans de regne. Ce prince avoit beaucoup de religion, & étoit très-charitable envers les pauvres, même jufqu'à l'excès; de quoi le pape Martin V. Michou, le reprit. On dit qu'il ne bûvoit point de vin, 1. 4. c. 48. & que les jours de jeûne il ne vivoit que de pain, Cromer 1. & de quelques légumes. Il ne laiffoit pas pourtant d'avoir des défauts qui lui furent reprochez par Sbignée évêque de Cracovie. Uladislas fon fils aîné lui fucceda, malgré l'ambition de ceux qui s'y oppofoient à caufe de fon bas âge. Il fut couronné à Cracovie par l'archevêque de Gnefne le jour de faint Jacques vingt-cinquiéme de Juillet, & les Grands s'appliquerent beaucoup à rétablir les affaires du royaume, en quoi ils réuffirent.

CXIII.

Louis

ne de Na

ples.

Le quinziéme de Novembre mourut auffi Mort de Louis d'Anjou, fils adoptif de Jeanne reine de Sicile & deNaples,à Cofance en Calabre fans aud'Anjou, cune lignée. Il fut regreté de tous fes fujets,avec & de lean d'autant plus de raifon, qu'on efperoit beaucoup de fa prudence & de fon courage : & la reine qui reconnut trop tard les grandes qualitez de ce prince, s'accufa les larmes aux yeux, d'avoir été cause de sa mort par fa trop grande ingratitude. Elle ne vouloit point permettre qu'on tranfportât fon corps hors du royaume, & tout ce que la nobleffe d'Anjou put obtenir d'elle, fut que fon cœur feroit porté à Angers dans le tombeau de fes ancêtres. Cette reine ne furvêcut pas long-tems au prince: elle

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