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En 1493.

Voïez l'A

fouhaitoit paffionnément que d'Amboise son Confident fur qui il s'en déchargeoit, euft une Place en Normandie, & Place fi confidérable qu'elle puft l'y accréditer; deforte que quand deux ans après l'Archevesché de Rouen vacqua, le Duc d'Orleans mit tout en œuvre pour le lui faire avoir. Le Roi & le Duc follicitérent vivement; chacun de ces Princes députa de de fon en particulier pour prier les Chanoines d'é- Election felire d'Amboise pour Archevesque. Il ne s'ef- Piéces mifes toit point fait, en pareille occafion, de Dépu- à la fin. tation plus folemnelle que celle-ci; l'une & l'autre eftoit compofée, ou des Seigneurs les plus puiffans & le plus en crédit à la Cour, ou des principaux Officiers de Roüen & de la

Province.

Les Chanoines répondirent, qu'ils avoient pour le Roi un profond refpect, qu'ils honoroient le Duc & qu'ils eftimoient fort le fujet qu'on leur propofoit; du refte, que comme c'eftoit une affaire de confcience, ils examineroient & peferoient, au poids du Sanctuaire, ce qui feroit du bien de leur Eglife. Ils ne parloient ainsi que pour fauver les aparences & conferver en quelque forte du moins une ombre de liberté; car comment ne pas déferer à des recommandations fi fortes? En effet, à peine furent-ils assemblez, le vingtuniesme Aoust mil quatre cens quatre-vingt

F

treize,

conde des

DEVENU LIEUTE

NANT DE

ROI EN

EXTERMINE

3

treize, que par acclamation ils nommérent d'Amboife Archevefque. Il n'eft qualifié que de Prestre dans l'Acte de fon élection, ce qui fait voir évidemment qu'il n'avoit point esté facré, ni Evefque de Montauban ni Arche-vefque de Narbonne. Quoi qu'il fuft en faveur, fes Bulles, je ne fçai pourquoi, furent asfez long tems à venir. Elles font du premier Juin mil quatre cens quatre-vingt-quatorze. Il prit le fept Aouft fuivant poffeflion par Procureur, & un mois après en perfonne..

Dès que d'Amboife fut nommé Archevefque de Rouen, le Duc d'Orleans, impatient NORMAN- de fe repofer tout-à-fait fur lui des foins de DIE, IL EN fon Gouvernement, le fit, de l'agrément du: LES BRI- Roi, fon Lieutenant General dans toute la Province, avec pouvoir d'y ordonner, com-me il feroit lui-mefme, qui en eftoit Gou verneur en chef..

GANDS,

Tout y eftoit dans un grand defordre. La Nobleffe opprimoit le Peuple, la Juftice n'y eftoit point renduë, les Soldats licentiez de: la derniere Guerre y eftoient cantonnez par Troupes dans la plufpart des grands chemins.. Ces Bandits, moins formidables par leur cou-rage, quelques braves qu'ils fuffent, que par leur nombre & leur fureur, infectoient les lieux d'alentour, & détrouffoient tous les paffans. Autrefois on auroit compté parmi les

Travaux:

Travaux d'Hercule d'exterminer tant de Brigands, d'Amboife en vint à bout par une sage fermeté, poursuivant vivement les uns & ne leur donnant point de quartier, forçant les autres, par la peur, ou les engageant, par des offres, à fe retirer de la Province. En moins d'un an & demi il eut l'honneur & le plaifir d'y avoir rétabli l'ordre & le repos, avant que d'eftre obligé de fuivre le Roi en Italie.

a

TE DE NA-
PLES PAR.
VIII. 1494-

Charles VIII. Prince de petite figure & d'un grand courage,aimant paflionnément la gloi re, crut aifément ce qu'on lui dit, qu'il avoit CoNQUESdes droits évidens fur le Roïaume de Naples, & que rion ne pouvoit lui donner plus de ré- CHARLES putation que d'en entreprendre la conqueste; & 1495. il y eftoit d'ailleurs excité par Ludovic Sforce, l'on a furnommé le More, moins à caufe de fon teint bazané, que pour les noires perfidies. Ce Prince, fans foi & fans loi, après avoir empoisonné le Duc de Milan son Neyeu, s'eftoit emparé du Duché.

que

Le Roi n'aiant en Italie, ni amis ni Places, la conqueste de Naples, qui eft à l'extrêmité, avoit plus l'air de l'entreprise d'un Heros de Roman que d'une conquefte poffible, auffi les gens fages s'y oppofoient-ils. Il n'y avoit que les Favoris qui aplaudiffent à ce deffein, s'imaginant, en jeunes gens, qu'il n'eftoit pas plus difficile de furmonter tous les obftacles. Fij qu'il

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qu'il y auroit à l'executer, que de remporter le prix d'une Joufte ou d'un Carousel; c'estoir dequoi depuis deux ans ils s'ocupoient, eux & le Roi ; la Reine, soit par bienfeance, soit tendreffe pour fon mari, quoi qu'elle paruft mécontente, parce qu'il avoit des amou rettes, crioit fort contre ce voiage. La Ducheffe de Bourbon, quelque envie qu'elle euft qu'il fe fift, n'ofoit point trop fe déclarer, de peur que fi elle le confeilloit on ne lui en imputaft le mauvais fuccès, ou bien qu'on ne lui reprochast d'avoir moins d'amitié pour le Roi fon frere, que ce voiage expofoit à de grands dangers, que de defir de commander: la Reine eftant trop jeune pour eftre Régente, il n'y avoit que la Ducheffe & le Duc fon époux à qui le Roi, en s'en allant, puft confier en feureté le Gouvernement de l'Eftat. Quoiqu'il n'y euft nulle aparence de réüssir, le jeune Roi ne laiffa pas d'entreprendre cette conquefte, par l'advis d'Eftienne de Vers & de Guillaume Briconnet, qui avoient feuls sa conleur de Dau. fiance; gens d'un mérite auffi médiocre que phiné, & leur naiffance. L'un eftoit fon valet de chamBriconnet bre, & il avoit fait l'autre Surintendant de Bourgeois fes Finances.

De Vers

eftoit fils d'un Tail

fils d'un

de Tours.

Le voiage réfolu, le Duc d'Orleans prit les devants pour faire préparer à Aft, où l'armée devoit s'affembler, ce qui eftoit nécessaire

pour

RE'GLE SON

AVANT QUE
DE PARTIR
POUR L'AR-

pour l'y recevoir. Nous l'avons déja dit, Aft D'AMBOISE eft une ville de Piedmont, qui apartenoit en DIOCESE ce tems-là à la Maifon d'Orleans. Quoi qu'il arrivaft peu que d'Amboife quittaft le Duc, M il ne partit point avec lui, voulant, avant que de le joindre, fe monftrer du moins à son Diocèfe. Effectivement il ne fit que s'y monftrer, car il y fut peu. Néanmoins dans le peu qu'il fut, il régla fi bien toutes chofes, qu'il se flâtoit qu'en fon absence, l'ordre & la discipline y feroient autant en vigueur que s'il y euft refidé. C'estoit trop fe flåter que d'espererfque cela fust, tant il y a de difference entre veiller fur fon Troupeau, foi-mefme de fes propres yeux, & de fe repofer fur des Officiers, qui quoi qu'habiles & vertueux, n'en ont jamais le mefme foin qu'en auroit le propre Pasteur.

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D'Amboise, né homme de probité, ne laiffa pas affez long-tems de fentir de cuifans remords; quelques perfonnes d'une morale auftere ne ceffant de lui dire, qu'au lieu de s'attacher au Duc il feroit beaucoup mieux de remplir, comme il le devoit, les fonctions de fon Ministere; ces exhortations faifoient d'autant plus d'impreffion, que luimefme defaprouvoit fort les gens qui arrangent leur confcience, moins felon les prin-cipes de l'honneur & de la vertu, que felon

leur

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