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Et ce n'eft plus pour lui que nous avons à craindre,
Il n'eft plus au pouvoir de fes fiers ennemis,
Seigneur, & dans nos mains il vient d'être remis.
OSARPHIS.

Ah! laiffez-moi du moins punir leur infolence.
Eft-ce à vous

...

JOCABEL.

C'est à moi de rompre le filence. Cet Oracle terrible, & par vous rejetté, Cet Oracle s'accorde avec la vérité. Un Enfant d'Ifraël qui parmi nous refpire D'un déluge de maux doit couvrir cet Empire, Et doit avec fon peuple en fortir triomphant. Phanés a dans Aron méconnu cet Enfant, Et vient d'en rejetter par-là le facrifice.

Nos malheurs font comblés, s'il faut qu'il s'éclairciffe ;

S'il faut que ce fecret trop prompt à s'échaper,
Lui défigne le cœur où fa main doit frapper.
OSARPHIS.

Repofez-vous fur moi, j'écarterai l'orage;
Et quant à cet Hebreu qui caufe tant d'ombrage,
Madame, c'eft un bruit conçu fans fondement
Qu'un peuple trop crédule embraffe avidement.
Je vais, n'en doutez point, l'arrêter dans fa course:
Je puis fans trop d'effort remonter à la fource.
Comme un avis du Ciel cet Oracle vanté,
Madame, contre moi n'eft qu'un piége inventé.
Sans doute, en factions l'Egypte fe partage,
On veut me difputer ce fuperbe heritage.
Que dis-je ? en puniffant ces premiers attentats,
J'étouffe un feu tout prêt d'embrafer ces Etats.
Ah! lorfque pour tenter une haute avanture,
Ces Miniftres des Dieux dirigent l'impofture,
Je ne fçai quel démon par de fecrets refforts,
De leurs projets hardis marque tous les dehors,

Prête à la piété fes cruelles maximes,

Toujours fous de beaux noms nous présente les cri

mes,

Sous un modefte front nous cache un cœur d'airain, Et parlant en Esclave, agit en Souverain.

JOČABEL.

Seigneur, il eft trop vrai, quoi que l'on entreprenne,
L'intrigue des méchans ne fe perce qu'à peine:
Mais la vérité fainte étend par tout fes droits,
D'une bouche étrangere elle emprunte la voix
Du fein de l'erreur même annonce fes Oracles.
Cependant, pour fon nom, Dieu prodigue en mira-

cles,

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Quelquefois nous livrant à nos propres befoins,
De la prudence humaine exige tous les foins.

OSARPHIS.

Lui-même, fon courroux plus prompt à fe réfoudre,
Souvent avant l'éclair a fait partir la foudre.
A nos fiers ennemis enlevons tout espoir
Trop de prudence ici nuiroit à mon pouvoir.
Un grand cœur doit toujours garder moins de mesures;
Il trouve en fa fierté des reffources plus sûres,
Et d'un projet trop lent écartant les apprêts,
Il tente la fortune & délibere après.

JOCABEL.

Périffe de Phanés la facrilege audace,

Et toi qui vois le fang que l'Oracle menace,
O Ciel? oublirois-tu que ton choix dans ces lieux
En fit de tes decrets l'inftrument glorieux ?

OSARPHIS.

Sur qui tombent enfin ces fecrettes allarmes ?
JOCABEL.

Quoi, vous me demandez la cause de mes larmes,
Lorfqu'ici tout vous livre à des périls certains?
OSARPHIS.
De qui fait Jocabel dépendre mes deftins?

La foi des alliés, ma naissance, ma gloire,
Tout avec fon efpoir fort-il de fa mémoire?
Hé quoi, me tiendroit-on de plus triftes discours,
Si dans un fang profcrit j'avois puifé mes jours?
JOCABEL.

Ah! Seigneur, de ces jours fource de tant de crainte,
Le falut entre nous n'admet plus de contrainte.
Dans les maux où je vois tout le peuple expofé,
Il faut rompre le fceau fur mes levres pofe.
Il faut... fur quels fecrets facile à me répandre...

OSARPHIS.

Ah! quels qu'ils foient, Madame, osez me les apprendre.

Quel foupçon avec moi tient vos efprits flottans?

JOCABEL.

Oui, je vais obéir. Je vois qu'il en eft tems.
Le Ciel dans ce mystére intéreffé lui-même...

SCENE VII.

OSARPRIS, JOCABEL, ISERIDE, ASAPH.

ASAPH.

Menophis, Seigneur, brigue le rang fuprême; Tharbis de fes traités redemande le fruit:

Du danger de l'Etat tout un peuple eft inftruit ;
Et bien-tôt appuyé d'une injufte puiffance
Va fous l'ombre du zéle exercer la licence.
Memphis, qui mieux que vous, Seigneur, peut en
juger?

Dans le fang d'Ifraël brûle de fe plonger;

Le traite d'ennemi du culte véritable,

Du courroux de fes Dieux, le rend lui seul comptable.

Le Soldat, dit-on, même en ces troubles preffans
Ouvre l'oreille aux cris des femmes, des enfans.
Chacun porte aux Autels un trouble légitime
Prêt à les arrofer du fang de la victime.
Un Prêtre qui du Prince épouse l'interêt
Du Ciel en fa faveur va détourner l'arrêt;
Semble ne voir en vous dans l'effroi qui l'infpire
Que le fang d'Abraham, l'ennemi de l'Empire;
Que l'efpoir & l'appui d'un peuple détesté.
Qu'attendez-vous? veillez à votre sûreté.

OSARPHIS.

C'en eft fait, & j'y cours, prêt à tout entreprendre:
Oui, Madame, je fçai le parti qu'il faut prendre,
Et plus fier des périls qu'il me refte à braver,
Pour fçavoir mes destins je viens vous retrouver.

Fin du troifiéme Acte.

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Es Enfans d'Ifraël, grand Dieu! dans fa dif

grace

Si jamais ta faveur doit proteger la race,
Le moment eft venu. Prodigue ton appui ;
Ce n'eft plus Ofarphis, c'eft tout un peuple en lui.
C'eft ton peuple choifi dont le péril éclatte.

Que feroit-ce grand Dieu! fi cette Egypte ingratte
Découvroit de quel fang tient le jour Ofarphis?
Qu'il eft ce même enfant qui fait frémir Memphis?
Que d'un voile pompeux couvrant fon origine,
C'eft lui que tes decrets chargent de fa ruine,
Et de qui le pouvoir par toi-même affermi
Cache dans un esclave un fi fier ennemi?
Je l'attens. Sans témoins il doit ici se rendre.
Sur fes deftins fecrets il brûle de m'entendre.
De quel œil verra-t'il dans fa plus noble ardeur,
Dufang de tant de Rois s'éclipfer la fplendeur?
Daigne mettre, grand Dieu ! ta prudence en ma bou-
che

Et fais qu'en l'éclairant ta parole le touche ;

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