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fur la route, du plaifir que j'aurois eu à parcourir les antiquitez qui font aux environs des cataractes.

Après cette réfolution, dont nous fîmes part au jeune Seigneur Arabe qui étoit à nôtre bord, nous le priâmes de nous fournir quelques voitures pour nous conduire à son Village, ce qu'il fit de la meilleure grace du monde. Ainfi aïant fait monter fur une boutique le Pere François, › que deux hommes foûtenoient, nous fuivîmes nôtre conducteur, dont le Pere nous reçût parfaitement bien, & nous fit donner les rafraî chiffemens dont nous avions befoin.

Le lendemain aiant témoigné à Selim (c'eft le nom du Chex Arabe chez qui j'étois logé ) l'envie que j'avois de voir les

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antiquitez d'Armant, il me fit préparer des chevaux, & vint lui-même m'y accompagner. Nous trouvâmes à une demie lieuë de fon Village, dans une affez belle Plaine les ruïnes d'un ancien Temple, dont les matereaux ont fervi à bâtir un Marabous. Les figures & les hiérogliphes dont les pierres font remplies, marquent que l'édifice. auquel ils avoient été emploiez étoit de la premiere antiquité; elles ne fervent plus maintenant qu'à orner le Tombeau d'un Chek Arabe, nommé Affa Balla. A cent pas de cette Chapelle on trouve encore un grand nombre de débris, parmi lesquels il y a plus 200. Colomnes du plus beau marbre granite qu'on puiffe voir; les pieds d'eftaux & les chapiteaux de ces Colomnes font répandus

de

de côté & d'autre ou enfevelis dans la terre. Des reftes de murailles, qui ont réfifté à l'injure des tems, presentent encore aux yeux plufieurs figures & un nombre infini d'hiérogliphes. A quelque distance delà on voit une cave, ou plûtôt une espece de réfervoir, dont la voûte eft détruite, qui peut avoir vingtcinq pieds de profondeur, & quarante de diamètre. Les gens du païs, qui la nomment Elbirque, affurent qu'elle étoit autrefois toûjours pleine d'eau: mais qu'elle étoit à fec, depuis qu'un Maugarbin emploia les (ecrets de la magie pour y chercher les trefors qu'on croit y être cachez. Ils m'affurérent auffi, & cela du plus grand fang froid du monde, qu'on y enrend chanter un coq tous les vendredis, & que c'est le Ta

lifman qui veille à la confervation de ces trefors. Selim & fon fils crurent aparemment, en jurant foi de Gentilhomme Arabe que la chofe étoit vraie qu'ils me perfuaderoient d'emploier les fecrets dont ils croioient que j'étois inftruit pour aller déterrer l'or & l'argent qui eft dans cette cave; & fur ce que je les affurai que la magie étoit une fcience qui m'étoit auffi inconnuë que je la croiois inutile & pernicieufe, ils fe mirent à rire; mais d'un ris fi moqueur, que je voiois bien qu'ils me croioient plus favant dans cet art que je

ne l'étois.

En continuant nôtre route, nous arrivâmes enfin auprès du Village d'Harmant, & c'est là Tem- où je vis ce fameux Temple de Jupi Jupiter, dont je crois qu'aucun

ple de

Har

voiageur n'a donné la defcri- ter ption. Rien au monde ne pre- mant, fente une fi grande magnificence que les reftes précieux de cet ancien édifice. On ne voit de tous côtez qu'un vaste amas de pierres & de Colomnes du plusbeau marbre qu'on puiffe voir. Les Colomnes qui restent encore fur pied, & dont on peut voir la figure dans le deffein que j'en donne, font d'une groffeur & d'une beauté que rien n'égale. Elles font chargées de figures & d'hierogliphes, qui après un fi grand nombre de fiécles, font voir encore l'habileté de l'ouvrier qui y a travaillé. Les chapiteaux qui font ornez de feuillages, font d'un ordre d'Architecture différent de tous ceux que la Grece & l'Italie nous ont apris mais qui paroiffent en avoir été les modéles; & rien Tom. III.. B n'eft

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