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affez pour rien décider fur ce fujet.

ption

gade.

Je ne mis que trois heures Deferipour arriver de Kous à Negade, de Népetite Ville à l'Occident, où il y a peu de Turcs & beaucoup de Chrétiens, que le commerce de toiles bleues & rayées met affez à leur aife. On m'afsura que la Mine, où l'on trouve de belle émeraudes, n'est qu'à une journée & demie de Negade de l'autre côté du Nil; mais que le païs eft fort desert, & que le peu d'Arabes qui l'habitent ne font aucun quartier aux Turcs depuis l'avanture que je vais raconter. Il y a environ deux ou Pour trois ans qu'un Aga de la Porte quel étant venu à Negade, pour pu- les Anir ces Arabes de quelques cour- de ce fes qu'ils avoient faites dans le haifvoifinage, il fut affez heureux pour les rencontrer dans un lieu A 2

fujet

Canton

fent les

Turcs

où il les défit entierement, &' prit leur Chek prifonnier, avec ceux qui s'étoient fauvez du carnage. Cet Officier, pour obtenir la vie & la liberté, dit à l'Aga qu'il le conduiroit dans un lieu où il trouveroit dequoi païer fa rançon & celle de fes compagnons, pourvû qu'il voulut lui donner la parole, qu'on ne lui feroit aucun mal. L'Aga lui aiant promis tout ce qu'il voulut, s'il executoit fa promeffe, ils allérent ensemble près d'un Puits, où quelques Arabes étant descendus, en raportérent plufieurs pierres d'émeraudes, dont il en avoit une plus groffe que le poing, & d'une fi grande beauté, , que le Grand Seigneur en a fait faire une tarpouche; c'eftà-dire une espece de Maffe d'Armes, à la tête de laquelle eft cette belle émeraude. Cependant

y

le

le perfide Aga, fans fonger à tenir la parole qu'il avoit donnée, ramena les Arabes, avec leur Chek, à Negade, où il les fit tous empaller; ce qui a fi fort irrité cette Nation, qu'elle exerce maintenant toutes fortes de cruautez fur ceux qui tombent en leur puiffance; & pour ôter aux Turcs l'utilité qu'ils pourroient retirer de cette Mine,ils ont bouché prefque tous les Puits où l'on trouvoit des pierres fi précieuses. C'est ainsi que la perfidie de l'Aga a privé le Grand Seigneur fon Maître de l'utilité qu'il pouvoit retirer de cette découverte.

Le premier Avril fut remarquable, par deux accidens bien contraires. Le grand calme nous obligea d'abord à une manœuvre pénible, où en tirant le Liban nous faifions très peu de chemin en travaillant beaucoup;

Vent qui

comme

& un vent impétueux, qu'on nomme Samiel dans le païs, s'édu feu. tant mis à foufler quelque-tems après, penfa nous couter la vie. Ce vent eft fi brûlant,& les tourbillons de fable qu il enleve font fi dangereux, qu'on eft prefque feur d'en être étouffé, quand on fe rencontre à la campagne. 11 n'eft pas fi dangereux fur le Nil, parce que fon ardeur eft alors un peu ralentie par l'humidité de l'eau. Il paffa cependant fur nôtre Barque un de ces tourbillons dont tout le monde fut incommodé ; la maladie du Pere François en redoubla, Mouftapha & mon valet étoient comme roüez de fatigue ; j'étois le feul qui, avec une capote bien doublée fur le vifage, m'étois garenti d'un mal fi inévitable. Mais comme mes épaules n'étoient pas couvertes,je fentis,à l'aproche de

ce

se tourbillon, une chaleur auffi grande que fi on m'eut touché avec du feu.

Le lendemain il nous fut impoffible d'avancer dans nôtre route,le vent nous étant entiérement contraire ce qui ne me chagrina pas tant encore que les plaintes du Pere François, qui m'accufoit à tout moment de lui avoir conseillé un voiage fi périlleux, dans le deffein de lui faire perdre la vie. Je tâchois de le confoler dans fon affliction; mais il s'opiniâtroit fi fort à ne vouloir rien prendre, que je crûs qu'il feroit impoffible de le tirer

delà.

Un fpectacle nouveau pour moi, & dont plufieurs naturaliftes ont parlé, peut-être fans en avoir été les témoins, fit tourner toute mon attention de ce côtélà. Je vis fur le bord du Nil de gros

A 4

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