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ge de lui reftituer par l'action de graces. CHAP. I.

[Dieu forma l'homme de la pouffiére (ou) du limon de la terre: il répandit fur fon visage un fouffle de vie (ou) il souffla fur fon visage un efprit de vie. ] Expreffions figurées, qui nous font entendre l'origine de l'ame & fa diftinction d'avec le corps. Elle n'eft ni tirée du corps qu'elle anime, ni formée d'aucune autre matiére: | elle vient du fond même de Dieu, comme le fouffle vient du dedans de nous, & du fond de notre poitrine: Dieu la crée en l'uniffant au corps.

Jufqu'ici rien de ce qui compofe ce monde vifible ne pouvoit rendre au Créateur le tribut de louange & d'actions de graces qui lui eft dû pour les ouvrages de fa puiffance & de fa fageffe. L'homme créé avec un corps & une ame, remplit dans toute fon étendue la fin que Dieu s'eft propofée dans la création du monde. Il tient tout ensemble au ciel & à la terre, à Dieu & aux créatures. Il eft uni par les fens de fon corps à tous les êtres matériels; & il peut s'approcher de Dieu par fon intelligence & fa volonté. Il doit donc fe regarder fur la terre comme l'interpréte & le prêtre de toute la na ture, qui fans lui feroit muette & ingrate envers fon Créateur. Il eft chargé de lui prêter fa voix, fa reconnoiffance, fes louanges, & fes adorations.

par

[Et l'homme devint vivant & animé.] Ce fut l'union intime que Dieu fit de l'efprit de vie au corps de l'homme; union qu'on peut appeller le myftére le plus incompréhensible de la nature, & qui fuffiroit feule pour nous convaincre de la Toute-puiffance de Dieu. Car quel rapport y a-t-il entre l'efprit & la matiére & quelle autre qu'une puiflance infinie a pû

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mettre entre ces deux fubftances étrangères
J'une à l'autre, indépendantes, incapables d'a- CHAP. I.
gir l'une fur l'autre, une telle correfpondance,
que le corps obéit aux volontez de l'ame, &
que les fonctions & les fentimens de l'ame dé-
pendent prefque toujours de la difpofition &
du mouvement des Organes du corps; que l'a-
me s'intéresse vivement par le plaifir ou la dou-
leur, à tout ce qui arrive au corps, & qu'à fon
tour le
corps entre en partage de tout ce qui
fe paffe dans l'ame, & qu'il reffent les impref-
fions de fa joie ou de fa trifteffe, de fon efpé-
rance ou de fa crainte ? Vous feul, ô mon Dieu,
opérez de fi grandes merveilles. Je les connois
avec une certitude indubitable: car elles fe
paffent en moi le fentiment & l'expérience
m'en convainquent à tout moment. Mais la
maniére dont vous les opérez m'est inconnue.;
& je ne fçaurois en rendre d'autre raifon, qu'en
difant que vous pouvez faire des chofes
que je
ne puis comprendre, parce que mon efprit eft
borné, & que votre puiffance ne l'eft pas. Dois-
je après cela être furpris que vous propoficz
à ma foi des myftéres dont tous les efforts de
ma raison ne peuvent percer l'obscurité? Et ne
feroit-ce pas un orgueil infupportable de refu-
fer de croire à votre purole, ô Vérité éternelle.
lorfqu'elle me dit de vous des chofes qui font
au-deffus de mon intelligence, moi qui fuis
obligé d'avouer que je ne comprends pas cel-
les que je fçai le plus certainement de moi-
même ?

:

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[Dieu tréa l'homme à fon image: il le créa à Fimage de Dieu.] Cette répétition nous montre & la vérité & la dignité d'une telle image, où Dieu a pris plaifir à raffembler divers traits qui repréfentent admirablement la fimplicité de fa

Tome I.

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nature, la Trinité de fes perfonnes, & l'incarCHAP. I. nation de fon Fils unique.

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Dieu eft efprit,& notre ame eft efprit. Elle vit, comme lui, de connoiffance & d'amour : & quoique la connoiffance ne foit pas l'amour & que la connoiffance & l'amour foient ne pas précisément l'être & la fubftance de l'ame; ces trois chofes néanmoins, l'être, la pensée & l'amour ne font qu'une feule & même ame. Ainfi, autant qu'il peut fe trouver de rapport entre Dieu & l'homme, Dieu fe connoît & s'aime : fa connoiffance ou fa pensée est son Fils, conçû en lui & engendré de toute éternité: fon amour eft le Saint-efprit. L'une de ces trois perfonnes n'eft pas l'autre : & néanmoins elles ne font toutes trois qu'un feul Dieu. L'Incarnation qui eft l'union ineffable & incompréhenfible de Dieu & de l'homme en la perfonne de Jefus-Chrift, nous eft montrée dans l'union de l'ame & du corps. Notre ame d'une nature fpirituelle & incorruptible, a un corps corruptible qui lui eft uni; & de l'union de l'un & de l'autre résulte un tour, qui eft l'homme, efprit & corps tout ensemble, incorruptible & corruptible, intelligent & purement brute. Ainfi la divinité du Verbe, & la nature de l'homme unies fans confufion, forment un feul Jefus-Chrift, vrai Dieu & vrai homme engendré dans l'éternité, & né dans le temps; tout-puiffant, & environné de foibleffe; fou verainement heureux, & chargé de toutes nos miféres; toujours vivant dans le fein du Pére & mort fur la croix pour nous fauver. Il n'est pas donné à tous de bien entendre ces fublimes véritez, ni de voir en eux-mêmes cette merveilleufe image des chofes divines. › que S. Auguftin & les autres Peres ont crû fi cer

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faine. La plupart des hommes gouvernez par les fens, ne fe connoiffent pas eux-mêmes: ils CHAP. I. ignorent les richesses qu'ils portent dans le fond de leur nature; & il n'y a que des yeux épurez qui puiffent les appercevoir. Mais fi peu que nous entrions dans ce fecret & que nous fçachions remarquer en nous l'image des deux myftéres, qui font le fondement de notre foi c'en eft affez pour nous élever au-deffus de 10 & rien de mortel ne pourra plus nous toucher.

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[L'arbre de vie étoit au milieu.]Cet arbre étoit ainfi appellé, parce que Dieu y avoit attaché la vertu de conferver à l'homme la vie, la fanté & la vigueur. Il fe feroit nourri des autres fruits pour vivre chaque jour; mais pour prévenir ou réparer les pertes infenfibles qui affoibliffent les principes de la vie, il auroit mangé du fruit de cet arbre.

[Avec l'arbre de la fcience du bien & du mal.] C'eft ainfi que Dieu le nomma, prévoyant le funefte effet qu'il devoit produire, & qu'on verra dans la fuite.

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[Afin qu'il le cultivat.] La culture de ce jardin n'étoit pas pour l'homme innocent un travail rude & pénible, puifque la terre produifoit tout d'elle-même; mais une occupation douce & tranquille, dont il auroit tiré à tous moments des fujets d'admirer & de louer la puissance, la fageffe, & la bonté du Créateur. Et qu'il le gardat ; non contre une violence étrangére, qui n'étoit point alors à craindre; mais pour luimême, en se rendant digne par sa fidélité envers Dieu, d'y mener toujours une vie heureufe.

[Ne mangex point du fruit de l'arbre de la fcien se du bien du mal. ] L'homme pouvoit donc manger, ou ne pas manger de ce fruit, Ainf

[Faifons l'homme. ] Jufqu'ici Dieu avoit tout CHAP. I, fait en commandant : Que la lumiere foit : que la terre produife des animaux. Mais quand il s'agit de produire l'homme, la plus excellente des créatures visibles; l'Ecriture s'accommodant à notre maniére de penfer, & nous repréfentant fous des images fenfibles ce qui fe paffe dans le fecret de Dieu, elle lui fait tenir un nouveau langage : faifons l'homme. Ce n'est plus cette parole impérieuse & dominante: c'est une parole plus douce, quoique non quoique non moins efficace. Dieu tient confeil en lui-même : il parle à quelqu'un qui fait comme lui, à quelqu'un dont l'homme eft la créature & l'image : Jean. 5. 15.à celui qui dit dans fon Evangile, Tout ce que le Pere fait, le Fils auffi le fait comme lui. En parlant à fon Fils, il parle en même temps à I'Esprit tout-puiffant, égal & coéternel à l'un & à l'autre. Ainfi le profond mystére de l'unité de Dieu en trois perfonnes, nous est montré dans la formation de celui qui doit en porter dans foi-même l'image & la reffemblance.

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[Anotre image à notre ressemblance.] Ce n'eft point par le corps formé de la poussiére de la terre, que l'homme eft l'image de Dieu mais par le fouffle l'efprit de vie répandu fur lui. c'est-à-dire par l'ame fpirituelle & immor telle unic à fon corps. Il eft l'image de Dieu, parce qu'il eft, comme lui, capable de connoître & d'aimer: & de même que Dieu eft fouverainement heureux en fe connoiffant comme vérité éternelle, & en s'aimant comme bien infini; ainfi l'ame qui tire fon origine de Dieu, & qui doit retourner à lui, ne trouve de vrai & de folide bonheur qu'à le connoître & à l'aimer. Il y a même dans cette ame toute parfaite qu'elle eft, quelque chofe qui

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