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répond à la nature infinie de Dieu. Dieu eft une fource inépuifable de biens & de richeffes, & CHAP. I. l'ame a une capacité infinie de recevoir ces biens & ces richeffes. Toute autre chofe que la vérité éternelle ne peut fixer fes recherches : tout autre bien que le bien infini ne peut remplir les défirs.

[Qu'il domine fur les poiffons de la mer, fur les oiseaux du ciel, fur le: bêtes, & fur toute la terre. ] Dieu, après avoir créé l'homme & la femme, leur répéta ces mêmes paroles; & il ajouta:Je vous donne toutes les herbes de la cerre,

› Pf. 8. & fe

tous les arbres qui portent du fruit, afin que vous en tiriez votre nourriture, Ainfi toutes cho fes font pour l'ufage de l'homme; toute la terre lui eft affujettie, parce qu'il eft plus grand & plus excellent que toutes ces ehofes: c'eft lui qui eft la fin des ouvrages de Dieu, & le principal objet de fon attention. Qu'est-ce que l'homme 6 mon Dieu, pour vous souvenir de lui ? ou le fils de l'homme, pour le vifiter? Vous l'avez rendu un peu inférieur aux Anges : vous l'avez couronné de gloire d'honneur ; vous lui avez, donné l'empire fur tous les ouvrages de vos mains: vous avez mis toutes chofes fous fes pieds, les brebis, les bœufs, tous les animaux domestiques, &les bêtes fauvages, les oifeaux du ciel, & les poiffons de la mer. Tout eft donc pour l'hom me: mais l'homme eft pour Dieu. Il fe doit tout entier à lui il ne doit vivre que pour lui & c'eft en cela que confifte fa grandeur & fa félicité. Malheureux, s'il fe dégrade & s'avilit lui-même, en livrant fon cœur à ce qui eft au-deffous de lui, & qui n'est deftiné qu'à fon usage: ingrat, s'il fait fervir con tre fon Dieu les biens mêmes qu'il tient de fa libéralité, & qu'un devoir indispensable l'obli

;

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ge de lui reftituer par l'action de graces. CHAP. L

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[Dieu forma l'homme de la pouffiére (ou) du limon de la terre: il répandit fur son visage un fouffle de vie (ou) il souffla sur son visage un esprit de vie. ] Expreffions figurées, qui nous font entendre l'origine de l'ame & fa diftinction d'avec le corps. Elle n'eft ni tirée du corps qu'elle anime, ni formée d'aucune autre matiére: elle vient du fond même de Dieu, comme le fouffle vient du dedans de nous, & du fond de notre poitrine: Dieu la crée en l'unissant au corps.

Jufqu'ici rien de ce qui compofe ce monde vifible ne pouvoit rendre au Créateur le tribut de louange & d'actions de graces qui lui eft pour les ouvrages de fa puiffance & de fa fageffe. L'homme créé avec un corps & une ame, remplit dans toute fon étendue la fin que Dieu s'eft propofée dans la création du monde. Il tient tout ensemble au ciel & à la terre, à Dieu & aux créatures. Il eft uni par les fens de fon corps à tous les êtres matériels ; & il peut s'approcher de Dieu par fon intelligence & fa volonté. Il doit donc fe regarder fur la terre comme l'interpréte & le prêtre de toute la na◄ ture, qui fans lui feroit muette & ingrate envers fon Créateur. Il eft chargé de lui prêter fa voix, fa reconnoiffance, fes louanges, & fes adorations.

[Et l'homme devint vivant & animé.] Ce fut par l'union intime que Dieu fit de l'efprit de vie au corps de l'homme; union qu'on peut appeller le mystére le plus incompréhensible de la nature, & qui fuffiroit feule pour nous convaincre de la Toute-puiffance de Dieu. Car quel rapport y a-t-il entre l'efprit & la matiére

quelle autre qu'une puiflance infinie a pû

mettre

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mettre entre ces deux fubftances étrangères
l'une à l'autre, indépendantes, incapables d'a- CHAP. I.
gir l'une fur l'autre, une telle correfpondance,
que le corps obéit aux volontez de l'ame, &
que les fonctions & les fentimens de l'ame dé-
pendent prefque toujours de la difpofition &
du mouvement des organes du corps; que l'a-
me s'intéresse vivement par le plaifir ou la dou-
leur, à tout ce qui arrive au corps, & qu'à son
tour le
corps entre en partage de tout ce qui
fe paffe dans l'ame, & qu'il reffent les impref-
fions de fa joie ou de fa trifteffe, de fon efpé-
rance ou de fa crainte ? Vous feul, ô mon Dieu,
opérez de fi grandes merveilles. Je les connois
avec une certitude indubitable: car elles fe
paffent en moi le fentiment & l'expérience
m'en convainquent à tout moment. Mais la
maniére dont vous les opérez m'est inconnue.;
& je ne fçaurois en rendre d'autre raifon, qu'en
difant que vous pouvez faire des chofes que je
ne puis comprendre, parce que mon efprit eft
borné, & que votre puiffance ne l'eft pas. Dois-
je après cela être furpris que vous propoficz
à ma foi des myftéres dont tous les efforts de
ma raison ne peuvent percer l'obfcurité? Et ne
feroit-ce pas un orgueil infupportable de refu-
fer de croire à votre purole, ô Vérité éternelle,
lorfqu'elle me dit de vous des chofes qui font
au-deffus de mon intelligence, moi qui fuis
obligé d'avouer que je ne comprends pas cel-
Jes que je fçai le plus certainement de moi-
même ?

:

[Dieu tréa l'homme à fon image: il le créa à Fimage de Dieu.] Cette répétition nous montre & la vérité & la dignité d'une telle image, où Dieu a pris plaifir à raffembler divers traits qui repréfentent admirablement la fimplicité de fa

Tome I.

B

nature, la Trinité de fes perfonnes, & l'incarCHAP. I. nation de fon Fils unique.

ne

Dieu eft efprit,& notre ame eft efprit. Elle vit, comme lui, de connoiffance & d'amour : & quoique la connoiffance ne foit pas l'amour & la connoiffance & l'amour Loient pas que précisément l'être & la fubftance de l'ame; ces trois chofes néanmoins, l'être, la pensée & l'amour ne font qu'une feule & même ame. Ainfi, autant qu'il peut fe trouver de rapport entre Dieu & l'homme Dieu fe connoît & s'aime fa connoiffance ou fa pensée est son Fils, conçû en lui & engendré de toute éternité: fon amour eft le Saint-efprit. L'une de ces trois perfonnes n'eft pas l'autre : & néanmoins elles ne font toutes trois qu'un feul Dicu.

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L'Incarnation, qui eft l'union ineffable & incompréhenfible de Dieu & de l'homme en la perfonne de Jefus-Christ, nous eft montrée dans l'union de l'ame & du corps. Notre ame d'une nature fpirituelle & incorruptible, a un corps corruptible qui lui eft uni; & de l'union de l'un & de l'autre résulte un tout, qui eft l'homme, efprit & corps tout enfemble, incorruptible & corruptible, intelligent & purement brute. Ainfi la divinité du Verbe, & la nature de l'homme unies fans confufion, forment un feul Jefus-Chrift, vrai Dieu & vrai homme engendré dans l'éternité, & né dans le temps; tout-puiffant, & environné de foibleffe; fouverainement heureux, & chargé de toutes nos miféres; toujours vivant dans le fein du Pére, & mort fur la croix pour nous fauver. Il n'est pas donné à tous de bien entendre ces fublimes véritez, ni de voir en eux-mêmes cette merveilleufe image des chofes divines › que S. Augustin & les autres Peres ont crû si cèr

faine. La plupart des hommes gouvernez par les fens, ne fe connoiffent pas eux-mêmes: ils CHAP. I. ignorent les richeffes qu'ils portent dans le fond de leur nature; & il n'y a que des yeux épurez qui puiffent les appercevoir. Mais fi peu que nous entrions dans ce fecret, & que nous fçachions remarquer en nous l'image des deux mystéres, qui font le fondement de notre foi, c'en eft affez pour nous élever au-deffus de tout & rien de mortel ne pourra plus nous toucher.

[L'arbre de vie étoit au milieu.]Cet arbre étoit ainfi appellé, parce que Dieu y avoit attaché la vertu de conferver à l'homme la vie, la fanté & la vigueur. Il fe feroit nourri des autres fruits pour vivre chaque jour; mais pour prévenir ou réparer les pertes infenfibles qui affoibliffent les principes de la vie, il auroit mangé du fruit de cet arbre.

[Avec l'arbre de la fcience du bien & du mal.] C'eft ainfi que Dieu le nomma, prévoyant 1e funefte effet qu'il devoit produire, & qu'on verra dans la fuite.

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[Afin qu'il le cultivât.] La culture de ce jardin n'étoit pas pour l'homme innocent un travail rude & pénible, puifque la terre produifoit tout d'elle-même ; mais une occupation douce & tranquille, dont il auroit tiré à tous moments des fujets d'admirer & de louer la puissance, la fageffe, & la bonté du Créateur. Et qu'il le gardat; non contre une violence étrangère, qui n'étoit point alors à craindre; mais pour luimême en fe rendant digne pár fa fidélité envers Dieu, d'y mener toujours une vie heureufe.

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[Ne mangez point du fruit de l'arbre de la fcien se du bien & du mal. ] L'homme pouvoit donc anger, ou ne pas manger de ce fruit, Ains

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