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fur le bord de la mer. Votre poftérité CHAP. IV. remportera la victoire fur fes ennemis; & toutes les nations de la terre feront benies dans celui qui fortira de vous, parce que vous avez obéi à ma voix. Abraham alla enfuite retrouver fes gens, & s'en retourna au lieu d'où il étoit

de 2145.

venu.

Sara mére d'Ifaac mourut à Arbé, qui An du mon- fut depuis appellée Hebron, à l'âge de cent vingt-fept ans. Abraham après l'avoir pleurée, parla aux habitants du pays, & leur dit: Je fuis étranger parmi vous donnez-moi, je vous. prie, droit de fépulture au milieu de vous. Et il acheta d'un des habitants nommé Ephron, un champ où il y avoit une caverne, dont il fit un fépulcre pour lui & pour fa famille. Il y enterra fa femme; & la propriété du champ & de la caverne lui fut affurée par les gens du pays. C'est là tout ce que pofféda Abraham dans le pays que Dieu lui avoit promis.

ECLAIRCISSEMENTS ET REFLEXIONS. [Prenez Ifaac votre fils unique, qui vous eft fcher allez me l'offrir en facrifice &c.] C'est ici la plus rude épreuve à laquelle Dieu ait jamais mis la foi & l'obéiffance d'Abraham. Ifaac étoit à un âge, où fon pére pouvoit efpérer de

voir bientôt par fon mariage l'accompliffe

voit pas

ment des promeffes touchant la poftérité nom- CH. XVI, breufe qui devoit fortir de lui. C'est alors que Ifaac n'a Dicu lui redemande ce fils. Mais en quels termes? Chaque parole pénétre le cœur ; & l'affe- moins de ctation d'appuyer fur tout ce qui peut l'atten- vingt-cin drir & l'affliger, eft une circonftance plus dou- ans. loureuse que tout le refte. Prenez Ifaac votre fils unique, qui vous eft fi cher. Dieu ne le prépare point à un fi rude coup: il ne foutient point fa foi par quelques paroles confolantes : il ne lui laiffe rien voir que ce qui peut l'affoiblir. Et allez me l'offrir en facrifice. Il faut que ce fils unique fi tendrement aimé, & fi digne de l'être, foit égorgé; non par une main étrangére, mais par celle de fon propre pére. Un tel commandement révolte prefque autant la foi que la nature; puifqu'il ne paroît pas moins oppofé aux promeffes de celui qui eft la Vérité même, qu'aux fentiments de l'humanité. Quels troubles, quelles répugnances, quels dechirements de cœur n'auroit pas reffenti tout au tre moins foumis & moins fort qu’Abraham ? Mais la foi de ce faint homme s'affermit par ce qui femble devoir la renverfer ; & elle l'élé ve au deffus des fentiments les plus vifs de la nature, à proportion qu'elle le foumet plus parfaitement à Dieu, & qu'elle l'abbaiffe plus profondément fous cette redoutable Majesté.

Ainfi Abraham fe repofant pleinement fur la toute-puiffance & la fidélité de son Dieu, hui abandonne fans réserve le foin d'acccomplir fes promeffes en la maniére qu'il lui plaira : pour lui, il ne penfe qu'à obéir, & il le fait avec une promptitude & un courage qu'il eft auffi difficile de concevoir que d'exprimer. fe léve avant le jour; prépare tout, fait lui

même ce qu'un autre n'auroit pû commander CH. XVI. qu'avec une douleur infinie; & ce qui eft étonnant, il porte feul le poids d'une si affli, Explic. de geante réfolution, fans s'en ouvrir à perfonne la Gen. to. 3. fans chercher au dehors aucune confolation

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fans laiffer échapper le moindre figne, qui découvre ce qui fe paffe dans le fond de fon cœur. Il marche durant près de trois jours avec fon fils, pour arriver où il doit l'immoler; & ce fils l'ignore. Ce fils fi refpectueux, fi aimable, fi parfait, marche à fon côté, mange & s'entretient avec lui; & un cœur tel que cefui d'Abraham, fi tendre pour les étrangers & les inconnus, fi plein d'amour pour un tel fils, ne s'ébranle & ne s'amollit point. La que-' ftion que lui fait Ifaac, en montant avec luin la montagne, devoit l'accabler, & lui percer le cœur: mais la fageffe & la fermeté de sa réponfe montrent que rien n'étoit capable de l'affoiblir. Arrivé au lieu du facrifice, il s'explique enfin, & déclare à fon fils la volonté de Dieu. Ifaac auroit bien pû, s'il l'eût voulu, s'échapper des mains de fon pére, & prendre la fuite, Que ne fait point faire l'amour de la vie, furtout dans la fleur de la jeuneffe, & dans le fein des richeffes & de l'abondance? Mais le commandement de Dieu l'arrête, & il fe rend obéiffant jufqu'à la mort. Abraham le lie, l'étend fur le bucher, & tient le couteau " prêt à lui donner le coup; & Dieu ne l'arrête,.. qu'après que le facrifice eft confommé de la, part du pére & du fils par une parfaite préparation du cœur, & par une foumiffion fans

bornes.

Faites-nous bien entendre, ô mon Dieu, la grande leçon que vous donnez à tous les fié-, cles par cet exemple de la foi & de l'obéiffance

Abraham. Car il eft notre pére, parce que mous devons croire comme lui: il l'eft auffi, Cp. XVI. parce que nous devons obéir comme lui. Vous exigez quelquefois de nous des facrifices qui coûtent infiniment à la nature, & dont il n'y a qu'une grande foi qui foit capable. Mais vous. ne la donnez ordinairement cette foi, qu'à ceux que vous avez trouvé fidelles, comme Abraham, dans de moindres épreuves. Donnez-nous donc, Seigneur, un amour fincére de votre volonté, qui nous faffe obéir avec courage à tout ce qu'il vous plaît de nous commander. Donnez-nous un détachement univerfel, qui nous tienne prêts à vous faire le facrifice de tout ce que nous avons de plus cher, dès que vous nous le demanderez: Donneznous enfin une ferme for en vos promeffes, qui nous foutienne dans les plus rudes épreuves, en nous rendant toujours préfente cette vérité, que tout eft affuré pour nous, fi nous vous demeurons fidelles.

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[ Nous allons jufques là, mon fils & moi,pour adorer.] Ce mot adorer fignifie fouvent dans. l'Ecriture offrir à Dieu un facrifice: Le lieu marqué à Abraham pour l'immolation de fon fils, étoit la montagne de Moria. Elle avoit une affez longue étendue, & elle fe divifoit en plufieurs collines. Nous en connoiffons trois; celle où l'on bâtit depuis le temple de Jérufa-lem; la montagne de Sion, où étoit la fortereffe de David; & le Calvaire où Jefus-Chrift t fut crucifié. Plufieurs anciens ont crû que ce fut fur le Calvaire même qu'Abraham offtit fon a facrifice.

ler

[Il prit le bois pour le facrifice, & gea fon fils ... il dreffa un autel, arrangea bois deffus, lia fon fils Ifaac; & l'ayant mis fur! Lar

le bois &c.] Qui n'apperçoit ici, fans qu'i CH. XVI. foit befoin de l'en avertir, un rapport admira ble entre l'immolation d'Ifaac, & le facrifice. Explic. de de Jefus-Chrift? La figure & la vérité fe reffemla Gen. 10. 3. blent fi fort, qu'on ne peut voir l'une fans fe fouvenir de l'autre. Ifaac chargé du bois de fon facrifice, représente Jefus-Chrift portant fa croix. La même montagne a fervi d'autel à Jefus-Chrift & à Ifaac : l'un & l'autre y font montez, accablez d'un pefant fardeau. Ifaac: qui confent librement d'être immolé, est néanmoins lié, comme s'il mouroit par force. Car il falloit qu'il reffemblât à celui qui donnant fa vie avec une fouveraine liberté, a été attaché par des clous, afin que fon facrifice eût les dehors humiliants d'un fupplice forcé. Isaac eft étendu fur le bois pour y être immolé. On n'y mettoit les victimes, qu'après les avoir égorgées. Mais il tenoit la place de celui dont la croix a été l'autel, & qui a été mis vivant fur le bois, pour y mourir. C'eft le Père céleste qui par des ordres févéres & irrévocables charge du poids de fa croix un fils qu'il aime de route éternité, comme c'est Abraham lui-même, qui malgré la tendreffe paternelle met fur les épaules de fon cher Ifaac le bois fur lequel il doit être étendu, le conduit fur la montagne, & lui commande de mourir. Jefus-Chrift & Ifaac font obéiffants jufqu'à la mort; & furvivent l'un & l'autre à leur facrifice. Mais Ifaac n'eft immolé & ne reffufcite qu'en figure; & Jesus-Chrift donne, fa vie & la reprend réelle

ment.

[Fe connois maintenant que vous craignez Dieu. Dieu, au nom duquel l'Ange parle, I connoiffoit avant cette action les fecrettes dif pofitions du cœur. d'Abraham. Mais il parle.

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