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nes; il eût demandé d'abord Rachel, fans devenir efclave pour elle. Ayant été trompé, il CH. XXII. auroit répudié Lia, & demandé juftice contre Laban. Voulant bien pardonner l'injure, & conferver la femme qu'on lui avoit fuppofée, il auroit refufé de fe foumettre à une nouvelle fervitude, pour une époufe déja achetée par sept années de fervices. Et s'il n'avoit pû l'obtenir autrement, il auroit promis à Laban par néceffité, mais fe feroit crû dégagé de fa promesse par l'infidélité de fon beau-pére. Voilà ce qu'auroit fait l'homme. Mais c'étoit l'Esprit de Dieu, & non celui de l'homme, qui conduifoit Jacob. Il fuivoit les volontez de Dieu, à mesure qu'elles fe découvroient par l'événement; devenant ferviteur, époux, premiérement de Lia, puis de Rachel, & une feconde fois ferviteur felon que l'efprit de Dieu qui régnoit dans fon cœur, le lui commandoit.

[Jacob ayant pris Rachel pour fa femme, l'aima plus que Lia. ] Lia étoit aimée, mais moins que Rachel ; & cette préférence n'avoit rien d'injufte. Rachel étoit la feule que Jacob avoir eu deffein d'époufer. Lia auroit pû être répudiée; & elle méritoit cet affront, après s'être prêtée à la mauvaise volonté de fon pére pour tromper Jacob. Elle ne pouvoit donc fe plaindre, fi fon mari, qui avoit bien voulu là garder, & qui l'aimoit par devoir, avoit plus d'inclination & de tendreffe pour fa fœur.

[Le Seigneur voyant que Lia étoit moins aimée, la rendit féconde.... Rachel au contraire demeuroit ftérile. ] Rachel étoit aimable par fa વિ beauté : Dieu rendit Lia aimable par fa fécondité. Si Rachel tendrement aimée de fon mari avoit été féconde, & Lia ftérile; Jacob auroit peut-être eu peine à défendre fon cœur d'un

partage trop inégal entre fes deux épouses; & CH. XXII. elles auroient été en danger, l'une de s'élever d'orgueil, & l'autre de tomber dans le découragement. Dieu eft admirable dans la difpenfation de fes dons. Il accorde aux uns ce qu'il refufe aux autres. Mais ce qu'il refuse n'eft' pas moins l'effet de fa bonté, & le fujet de notre reconnoiffance, que ce qu'il donne.

[Eft-ce que je fuis Dieu? Et n'est-ce pas lui qui vous a refufé la fécondité?] Réponse forte : mais fage, qui fait fentir à Rachel fa faute, en lui apprenant qu'elle demande à fon mari ce qu'elle ne doit demander qu'à Dieu; & qu'au lieu de porter envie à fa fœur, elle auroit dû s'humilier devan: lui, pour obtenir la fécon→ dité que lui feul peut donner.

....

Rachel pria Jacob d'épouser Bala fa fervan te.... Facob la prit, & il en eut deux fils.. A l'exemple de fa four, Lia donna pour femme à Régie 7. Jacob Zelpha fa fervante. ] Il y avoit déja eu

de grands myftéres dans le mariage d'Abraham avec la femme libre, & l'esclave, & enfuite avec Cethura. Il y en avoit eu de pareils dans celui d'Ifaac & de Rebecca, premiérement ftérile, & enfuite mére de deux jumeaux, dont l'un eft la figure des Elûs, & l'autre des Réprouvez. Il étoit néceffaire que Jacob représen. tât par fon alliance, ce que les premiers tableaux n'avoient pû figurer; & qu'il achevât de prédire par ce langage muet des actions, les caractéres de l'Eglife dans tous les temps.

Les principaux font fa fécondité après la venue de l'Epoux, en ce que depuis ce temps-là elle s'eft multipliée à l'infini; fon unité, en ce qu'elle n'a qu'un Epoux; & fon univerfalité, en ce qu'elle n'exclut perfonne.

Avant l'Incarnation du Fils de Dieu, fon

Eglife encore obfcure & cachée, & prefque ftérile, n'avoit qu'un très-petit nombre d'enfants; CH. XXII, figurée en cela par la famille d'Abraham & d'Ifaac, dont chacune n'eut qu'un feul héritier des promeffes. Mais depuis que Jefus-Chrift eft venu en perfonne chercher fon époufe, & former lui-même fon Eglife, fa fécondité a été fans comparaifon plus grande. Sa famille cft devenue un grand peuple à l'exemple des douze Tribus d'Ifrael, & elle a enfin rempli toute la terre.

On n'eft plus en peine pourquoi Jacob épouse deux femmes libres, & deux cfclaves. L'unité & l'univerfalité de l'Eglife le demandoient ainfi. Après la venue de Jefus-Chrift l'unique époux, & après l'effufion du Saint-Efprit, la grace & la foi ont fupprimé toutes les différences entre l'esclave & le libre, entre le Juif & le Gentil, entre le Grec & le barbare. Agar eft efclave, & fon fils Ifmael cft déshérité, parce qu'elle figure la Loi, & les Juifs charnels accablez de fon joug. Mais les fervantes de Lia & de Rachel font mifes en liberté par Jacob, & leurs enfants font également héritiers; parce que Jacob tient la place de Jefus-Chrift, en qui toutes les diftinctions & les divifions difparoiffent.

[Enfin le Seigneur fe fouvint de Rachel: il Texauça, la rendit féconde. ] Il paroît par cette expreffion que ces mouvements d'envie & d'impatience, qu'on a vûs dans Rachel, avoient été légers & paffagers; & que touchée des Sparoles de Jacob, dont elle comprit toute la force & l'étendue, elle fe tourna vers Dieu, redoubla fes priéres: s'affermit dans l'efpérance d'obtenir de lui la grace qu'elle demandoit; & qu'enfin, quoique l'épreuve fût longue, fa foi

demeura victorieufe des délais de Dieu par la CH. XXII. persévérance. Heureuse l'ame, qui convaincue intimement de fa ftérilité naturelle pour toute Gen. to. 4 bonne œuvre, attend de Dieu feul la vertu qui la rendra féconde ; & qui la demande avec une foi humble & perfévérante. Dieu l'exaucera; & après l'avoir affermie dans l'humilité par le fentiment & l'épreuve de fa mifére, il la confolera par les fruits de juftice qu'il lui fera produire en abondance.

Régle 7.

[Jacob dit à Laban: Permettez-moi de retourner dans mon pays, &c.] Les années de la fervitude de Jacob étoient finies à la naiffance de Jofeph ; & il étoit maître de fon retour. Il con fent néanmoins de demeurer encore quelques années auprès de Laban, réfolu de le quitter un jour,s'il ne lui rend pas fa liberté. C'est ainsi que les deux familles, l'Eglife & la fynagogue, font demeurées unies durant quelque temps, après celui dont Joseph étoit la figure, eut paru fur la terre. Cette union étoit néceffaire pour le bien des Elûs qui appartenoient à JefusChrift, & qui étoient encore mêlez dans la multitude des Juifs incrédules. Mais lorsque tous les Saints que Dieu s'étoit réservez dans Ifrael, furent entrez dans l'Eglife; les deux fociétez le féparerent : & la réfiftance qu'y ap-' porta la fynagogue, fut auffi inutile que celle de Laban à l'égard de Jacob.

que

[Vous ne me donnerez rien. ] Jacob ne veut pas travailler en vain : mais il ne veut pas que Laban le récompenfe de fes travaux par des chofes qui dépendent de lui, comme la nourriture, ou l'argent ou un partage entre fes troupeaux. Il ne veut rien devoir qu'à Dieu feul; & c'eft de lui qu'il attend le troupeau particulier dont il doit être le maître. Le my

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ftére de Jelus-Chrift & de l'Eglife eft ici claitement figuré. Les Elûs, & ceux qui ont crû CH. XXII. en lui, ne lui ont point été donnez par les hommes. C'eft fon Pére feul qui les lui a donnez. Sa grace feule a formé ce troupeau choifi. Il n'eft point né de la chair, ni de la volonté des hommes, mais du Saint-Efprit.

[Jacob prit des branches vertes, &c.] On fe tromperoit, fi l'on attribuoit au feul artifice de Jacob, & à la feule imagination des bêtes, les taches & les marques de leurs petits. On a depuis effayé en vain la même chofe par le même moyen. Il fervoit à couvrir le miracle : mais le miracle n'en étoit pas moins réel. Dieu l'opéroit en faveur de Jacob, pour le recompenfer de fes travaux, & punir Laban de fon avarice, & de fa dureté envers un homme à qui il étoit redevable de la meilleure partie de fes biens.

que

Mais ce miracle n'eft qu'une foible image de la naiffance fpirituelle Dieu donne aux brebis qu'il a choifies pour compofer le troupeau de fon fils. Au dehors tout fe fait par le ministére des hommes; tout paroît être le fruit de leur travail & de leur induftrie. Ils adminiftrent les Sacrements; ils inftruisent ; ils dirigent. Mais c'eft Dieu qui fait le difcernement des brebis qu'il choifit, & qui les marque de fon fceau: il les ôte à Laban, à qui elles appartiennent par leur origine, & les donne à Jefus. Chrift, comme fon héritage, & la récompenfe de fes travaux.

[S'il lui difoit, les chevreaux & les agneaux tachetez feront pour vous, toutes les brebis les chevres faifoient des petits tachetez. ] Laban jaloux de la bénédiction que Dieu répandoit fur les troupeaux de Jacob, employa toutes fortes

Gen.

to. 4

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