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de toute l'Hiftoire Romaine. Il remarquera que dans une matiere fi riche & fi abondante, j'ay choifi ce qu'il y avoit de plus important; que pour l'ordre des tems j'ay suivi les plus juftes Chronologiftes, & que j'ay cité la plus grande partie des Auteurs qui ont fervi à mes recherches.

La Differtation que j'ay ajoûtée à la tête de ce Livre, ne fera pas moins utile que le Livre même. Elle donne une idée générale de tout l'Empire Romain. On y voit quel fut le génie de fes peuples fous le Gouvernement des Rois, fous celui des Confuls & des Empereurs ; ce qu'étoit Rome dans fa naiffance, & comment elle devint infenfiblement la Capitale de l'Univers; on y voit l'établiffement de la République, & la caufe de fe ruine; la fondation de l'Empire par Jules Céfar, fon affermiffement fous Augufte, fes défordres affreux & fes differentes révolutions fous leurs fucceffeurs, & enfin fa divifion par le grand Théodofe, qui en faveur de fes deux fils, partagea l'Orient & l'Occident.

Je fuis perfuadé qu'après la lecture de cette Differtation, on entrera plus volontiers dans le détail de l'Hiftoire. C'eft au Public à juger de mon travail. S'il l'approuve, fon approbation augmen

tera l'envie que j'ay de lui plaire & de lui être utile; s'il y trouve à redire, je tâcheray de mieux étudier fon goût, afin de m'y conformer dans une autre occafion ; & je lui marqueray ma parfaite reconnoiffance en me foumettant à fes

avis.

DISSERTATION

DISSERTATION

SUR

L'HISTOIRE ROMAINE.

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ON deffein n'eft pas de m'arrêter à ce que l'ancienne Rome a inventé de merveilleux pour donner du relief à fa fondation, & la rendre en quelque forte furnaturelle; je prétens encore moins détruire les erreurs dont cette fuperbe ville s'eft flattée pendant fi longtems, & dont elle auroit été fâchée de fe voir défabufée. Que nous importe que les Romains peu contens de leur origine, ayent eu recours à des fables pour s'illuftrer, qu'ils ayent cherché hors d'eux les caufes de leur nobleffe & de leur gloire, & qu'entraînés par cette vanité, ils ne fe foient feulement contentés de vouloir appartenir à pas Venus par Ænée conducteur des Troyens en Italie, mais qu'ils ayent encore donné à leur Fondateur une naiffance divine, en le faifant fils du Dieu Mars; fabuleuse naiffance dont ils ont fait femblant d'être perfuadés, pour mieux perfuader les autres peuples, & s'attirer leur vénération? Que nous importe, dis-je qu'ils ayent confacré leur origine en la rapportant aux Dieux, & qu'ils ayent voulu borner la puiffance des Deftins, julqu'à ne leur croire d'autre foin que celui de fonder Rome? ils ne font pas les feuls qui ont donné dans ces chimeres.

Nous mêmes nous avons eu longtems cette

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folie commune avec beaucoup d'autres Peuples de vouloir tirer notre origine des Troyens; nous en avons cru longtems nos vieux Annaliftes, qui en recherchant nos Antiquitez, ont remonté jusques à Troye pour en faire venir Paris, & Francus fils d'Hector, dont le dernier, felon eux, doit avoir donné le nom à la Nation, & l'autre à la ville Capitale de ce Royaume. Il eft vrai qu'en la renaiffance des Lettres, les efprits fe font trouvés trop éclairés pour continuer de foufcrire à une fable fi éloignée de toute vrai-femblance ; & que les Hiftoriens qui ont écrit depuis, n'en ont plus fait d'état. Ne fçait-on pas après tout, que l'Antiquité a toujours tâché de rendre plus Auguftes les commencemens des villes, & la naiffance des grands Hommes ; & que les peuples crédules ont trouvé le menfonge trop agréable & trop beau pour vouloir en être diffuadés. Je m'en tiendray donc au fentiment le plus probable & le plus commun, & plus attentif à la patience du Lecteur, qu'à l'abondance & à la dignité de la matiere, je tâcheray de donner dans cette Differtation une idée racourcie & précife de ce que cette fameufe Capitale nous offre de plus remarquable depuis fa naiffance jufqu'à la divifion de l'Empire,

Amulius Prince ambitieux & jaloux de la puiffance de fon frere Numitor Roi d'Albe, fe révolte contre lui, & le chaffe du Trône. Cet ufurpateur pour s'affeurer la Couronne, fait renfermer Rhée Sylvie, fa niece, & fille unique de fon frere, parmi les Vierges Veftales, afin qu'étant forcée de garder toute fa vie fa virginité, ou de fouffrir une infâme & cruelle mort, pera L'un fonne ne lui pût difputer fon ufurpation. Mais fut appel- fa précaution eft inutile. Quelque tems après, Rhée Sylvie écoute les foibleffes de la nature, & l'autre elle devient enceinte, elle accouche enfin de Remus. deux Jumeaux; & pour sauver la réputation,

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elle intereffe adroitement un Dieu dans fon crime. Cette Veftale fçut mettre à profit la Théologie, ou plûtôt la fuperftition de ces fiécles aveuglés. On croyoit que les Dieux s'humanifoient. jufqu'à la propagation de notre espece, qu'une beauté mortelle pouvoit les attendrir, & en faire. fes Efclaves. On regardoit en eux comme une vertu ce qui étoit un crime dans les hommes & lorfqu'on les appelloit au fecours de la réputation de quelque Princesse qui se fût laissé vaincre par fon amant lorfque, dis-je, on les faifoit métamorphofer exprès pour triompher de quelque belle, ces amours dérobés, loin d'être criminels ou diffamans, faifoient honneur ; & la conquête d'un Dieu étoit pour une Dame la chofe la plus glorieufe. Il n'y avoit pas jufqu'aux époux trop faciles, & trop crédules, qui ne favorifaffent ces fortes de galanteries. Le regne de Tibere nous en fournit un fameux éxemple dans la perfonne de Saturnin. Souvent il arrivoit

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1. Saturnin demeuroit à Rome où il avoit épousé une jeune Dame nommée Pauline, auffi illuftre par fa vertu que par fa naiffance, & dont la beauté répondoit à fes grands biens. Mundus jeune Chevalier Romain, & des plus confidérables de cet Ordre, en devint éperduëment amoureux, & fa paffion augmenta par l'impoffibilité qu'il prévoyoit de s'en faire aimer. Pauline étoit d'une condition & d'une vertu à ne pas fe rendre aux promeffes, ni aux préfens. Il ne put néanmoins s'empêcher de lui offrir deux cent mille Drachmes, mais elle rejetta ces offres avec le dernier mépris. Ayant donc employé vain.co ment tous les moyens de la rendre fenfible, il fût mort de défespoir fans le fecours d'Idé, l'une des Affranchies de fon pere, qui lui promit de lui faire obtenir ce qu'il défiroit, en donnant feulement cinquante mille Drachmes. Mundus écouta avec joye cette flateufe propofition, & donna à cette Affranchie la fomme qu'elle demandoit. Idé qui fçavoit que Pauline avoit une dévotion toute particuliere pour la Déeffe Ifis, alla trouver quelques-uns de fes Prêtres. Après s'être affeurée de leur difcrétion, elle leur découvrit

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