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,, Augufte, dit-il, après la tirannie du Trium virat, & la défolation qu'avoit apporté la guerre civile, voulut enfin gouverner par la raifon un peuple affujetti par la force; & dégoûté d'une violence où l'avoit peut-être obligé la néceffité de ses affaires, il fçut établir une heureufe fujetion, plus éloignée de la fervitude. ,, que de l'ancienne liberté. Ce Prince n'étoit pas de ceux qui trouvent la beauté du commandement dans la rigueur de l'obéiffance; qui ,, ne font charmés du fervice qu'on leur rend ,, que par la néceffité qu'ils en imposent...... Il crut au contraire que pour bien difpofer des hommes, il falloit gagner les efprits avant ,, que d'éxiger les devoirs; & il fut heureux à les perfuader de l'utilité de fes ordres, qu'ils. ,, fongeoient moins à l'obligation qu'ils avoient de les fuivre, qu'à l'avantage que l'on y trouvoit.

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Un des plus grands foins qu'il eut toujours, fut de bien faire goûter aux Romains le bonheur du Gouvernement, & de leur rendre autant qu'il put la domination infenfible. Il re,, jetta jufqu'aux noms qui pouvoient déplaire, & fur toutes chofes la qualité de Dictateur déteftée dans Sylla, & odicufe en Céfar mê,, me. Loin de prendre de nouveaux titres pour autorifer une nouvelle puiffance, il voulut la cacher fous des noms connus, & des dignitez ordinaires.

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a Dion. » Il fe fit appeller a Empereur de tems en tems pour conferver fon autorité fur les Lé

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7. Augufte prit le titre d'Empereur, non comme les Généraux d'armée, & lui même, l'avoient pris plufieurs fois après avoir remporté quelque victoires. mais comme il avoit été accordé à Jule-Céfar pour Jui & pour fa pofterité, c'est-à-dire comme un titre perpetuel, & une marque de l'autorité réelle qu'il poffedoi.

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Tacite

ad

ann.

775.

Dion. libs

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gions; a il fe fit créer 2 Tribun pour difpo- "aSueton.
fer du Peuple, & Prince du Sénat pour le gou- " in Aug.
verner: Mais quand il réunit en sa personne ، cap. 27.
tant de pouvoirs differens, il fe chargea auffi " Annal.
de divers foins, & il dévint l'homme des Ar- ". lib. 3.
mées, du Peuple & du Sénat, lorfqu'il s'en " cap. 56.
rendit le maître; encore n'ula-t-il de fon pou-
voir que pour ôter la confufion qui s'étoit glif- "
fée en toutes choses. Il remit le peuple b dans «
fes droits, & ne retrancha que les brigues aux "b Sueton.
élections des Magiftrats. H rendit au Sénat ibid. cap.
fon ancienne fplendeur, après en avoir banni
la corruption; car il fe contenta d'une puiffan- "
ce temperée, qui ne lui laiffoit pas la liberté ai
de faire le mal: mais il la voulut abfoluë, «
quand il s'agit d'impofer aux autres la néceffi- «c
té de bien faire. Ainfi le peuple ne fut moins "
libre, que pour être moins féditieux. Le Sénat «
ne fut moins puiffant que pour être moins in-
jufte. La liberté ne perdit que les maux qu'elle
peur caufer,rien du bonheur qu'elle peut produire."
Après avoir établi un fi bon ordre, e il fe
va agité de differentes pensées,& confulta long-
tems en lui-même, s'il devoit garder l'Empire,
ou rendre au peuple fa premiere liberté. Les
éxemples de Sylla & de Célar, quoique diffe- "
rens, faifoient une impreffion égale en faveur de "
ce dernier fentiment. Il confideroit
que Sylla
qui avoit quitté volontairement la Dictature,
avoit eu une mort paisible au milieu de ses en-
nemis; & que Célar pour l'avoir gardée avoit "
été affaffiné par les meilleurs amis, qui en fai- «
foient gloire.

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ccc Dion

trou- lib. Shan

Dans fon incertitude il confulta fes deux amis

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z. Augufte ne prit pas le titre de Tribun du peu-
ple,
mais il fe fit accorder la puissance du Tribunat ;
i appella ainfi la fuprême autorité, afin d'éviter
Jes titres odieux de Roi & de Dictateur, & en por
un. néanmoins qui prévalût, fur les autres.

a ibid.

53.

دو

,, yant

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principaux,Agrippa & Mécénas, Agrippa qui lui "avoit acquis l'Empire par favaleur, lui confeilla de ,,le quitter;foit que ce fût par modération, foit qu'ades vues plus cachées, comme il fe trouvoit plus grand homme de guerre que n'étoit Augufte, il le flattât d'avoir les premiers emplois de la République, quand elle feroit rétablie. Mécénas qui fuivoit autant fon inclination pour la perfonne du Prince, que fes propres interêts, lui confeilla ,,aucontraire de retenir l'Empire. Il lui réprésenta par beaucoup de raifons que l'Etat ne pouvoit plus fubfifter que fous un Monarque; qu'il ne pouvoit lui-même fe démettre de fon autorité, fans être en danger de fa vie; mais qu'il trouveroit dans un Gouvernement fage & équitable, la feureté de fa perfonne & de fa puiffance.

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L'avis de ce dernier a l'emporta. Augufte retint l'Empire, & quoique réfolu de le garder, il bid. lib. ne laiffa pas que d'offrir au Sénat de s'en démettre. Les uns par affection, les autres par crainte, plufieurs par politique, tous confpirerent à le refufer. Ainfi il put dire qu'il ne commandoit que parce que le Sénat & le Peuple Romain l'y contraignoient. Mais pour s'affeurer encore mieux l'eftime des grands, & la conid. ibid. fiance du public, e il protesta d'abord qu'il n'acceptoit le fouverain commandement que pour cinq ans; les cinq ans expirés, il fe le fit prolonger pour dix,& enfuite pour vingt. Ainfi failant entrevoir de tems en tems quelqu'inclination pour le rétabliffement de la liberté, & donnant tous les foins à rendre l'Etat heureux & floriffant, il fe maintint le refte de fa vie dans la fouveraine puiffance, & laiffa de lui cette bonne opinion. qu'il ne devoit jamais naître ou ne jamais mou

d Sueton.

fir.

Augufte avoit un goût & un difcernement exin Aug. quis: il connoilloit le mérite, & le récompenSab. 89. foit. d Les beaux efprits faifoient fortune à fa

Cour, il fe délaffoit avec eux, & les honnoroit de fa confidence. C'eft ce qui produifit une noble émulation qui rafina le goût, qui aiguifa l'efprit, & qui perfectionna la jufteffe du difcernement. C'est ce qui rendit fon fiécle fi illuftre, qu'il a toujours paffé, & qu'il paffe encore à préfent pour le modéle des fiécles éclairés. Une des plus grandes vertus de ce Prince fut la clémence. Il en donna des marques fenfibles en plufieurs occafions, & fur tout lors d'une confpiration qu'on avoit formée contre lui, & qu'on étoit fur le point d'éxécuter, a Loin de punir les compli- a Dion. ces, il les combla de bienfaits, & les éleva aux lib, 55. premieres dignitez. Enfin après un long tegne, clem. lib. il mourut regreté de tout l'Univers. La félicité de l'Empire difparut avec cet Empereur. Tant qu'il regna, fon joug fat fi doux, fon administration fi heureule, que les Romains ne s'apperçurent point de leur Efclavage, mais ils en effuïerent par la fuite toute l'horreur.

La plupart des Empereurs fuivans tinrent une conduite bien oppofée à celle d'Augufte. Ils fe livrerent à tous les vices & à tous les déréglemens imaginables, & abuferent fi fort de l'autorité, qu'ils fe porterent à des violences où Tarquin même ne fût point parvenu. On eût dit qu'ils mettoient tout leur plaifir à rafiner fur le crime & fur la débauche, à méprifer les Loix, à faire impunément des miférables, & à ne faire fentir leur puiffance que par leurs cruautez.

Senec de

1. cap.9.

Entrons dans quelque détail, & nous arrêtons principalement à ceux de ces Empereurs, bons ou méchans, qu'il importe le plus de remarquer. Ceux qui fe préfentent d'abord, font plûtôt des monftres que des hommes. Tibere eft le Tihere. premier. Augufte b l'avoit choisi pour fon fuccef- b Sueton. feur, & ce fut plûtôt par complaifance pour Li- in Tiber. vie, que de fon propre mouvement, puifqu'il cap. 25. connoifsoit mieux que perfonne les défauts de ce

aid. ibid. Prince. Quelques-uns ont prétendu a que ce fur par un principe de politique & d'ambition, afin de fe faire regreter davantage après la mort.

Quoiqu'il en foit, Tibere parvenu à l'Empire

prit tout l'oppofé de fon prédéceffeur. Il eft bidem, vrai b qu'il fe contrefit dans les commencemens, sbid. cap. & qu'il prit un grand foin de cacher fes défauts 24.25 fous une apparence de douceur : mais on connut Leq. bientôt qu'il n'étoit rien moins que ce qu'il af fectoit de paroître. Jamais Prince ne fut plus fourbe, plus jaloux de fa puiffance, plus diffimulé, plus cruel, & ne fe porta à des débauches. plus outrées. On ne fera peut-être pas fâché de voir ici ce que M. de faint-Evremont a dit de cet Empereur.

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La vertu Romaine, dit-il, s'étoit adoucie a,, près la mort de Brutus & de Caffius qui en foutenoient la fierté. Depuis la perte d'Antoi„ne, ce fut un agrément prefque général pour la conduite d'Augufte, & une complaifance égale pour fa perfonne. A l'avenement de Tibere, cette complaifance fe tourna en baffeffe & en adulation. On peut dire que ce Prince naturellement irréfolu n'auroit pris qu'une autorité bien médiocre ; mais les Romains plusdifpofés à fervir que Tibere à commander, lui prêterent eux-mêmes leur fervitude, lorsqu'à ,, peine il ofoit efperer leur fujetion. Tel fut alors le génie du peuple Romain.

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20

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280.

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Pour Tibere, fon deffein le plus caché & le mieux fuivi, fut de changer toutes les maximes d'Augufte. Celui ci devenu Empereur donnoit au bien général tout ce que lui infpiroit une politique jufte & prudente: Tibere fit une fcience de cabinet, où étoit renfermé un faux & mifterieux interêt du Prince, féparé: de l'interêt de l'Etat, & prefque toujours oppofé au bien public..

Le bon fens, la capacité, le fécret furent

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