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œuvre, ils ont par cette raison entre eux le même rapport d'union qui fe trouve entre les membres d'un feul & même corps. Pour te rendre cette penfée plus touchante, il faut te dire fouvent à toi-même : je fuis un membre du corps de la fociété hu→ maine; car fi tu te dis fimplement : je fais partie de ceux de la fociété (1), c'est c'est que tu n'aimes pas encore du fond du cœur les autres hommes; c'eft que tu n'aimes pas à leur faire du bien, comme étant de leur efpece; c'eft que tu leur en fais encore par pure bienséance; c'est que tu ne t'y portes pas encore comme à ton bien propre. (VII. 13.) otov

ἓν ποιων.

X X I.

Perfonne ne fe laffe de recevoir du bien.

en

(1) M. Menage, dans une note écrite de fa main, marge d'un exemplaire de Marc-Aurele que j'ai, observe que dans l'édition latine de Bafle, on ne trouve pas la traduction de ces mots dia rỡ gã Florgelov, pour dire que melos, membre, differe de meros, partie, par la lettre r, qui eft une puérilité de copifte, que l'éditeur Xylander, & après lui Cafaubon le fils, ont jugée indigne de MarcAurele. Le cardinal Barberin l'a cependant adoptée & rendue dans fa traduction italienne.

ce

Or c'eft fe faire du bien que de faire des actions conformes à la nature. Ne te laffe donc point de faire du bien aux autres, puifque par-là tu t'en fais à toi-même. (VII. 74. ) έδεις — ὠφελεῖς.

X X I I.

Ai-je fait quelque chofe pour la fociété? j'ai donc fait mon propre avantage. Que cette vérité foit toujours préfente à ton efprit, & travaille fans ceffe. (XI. 4.)

πεποίηκά = παύου.

XXIII.

Les Lacédémoniens, dans leurs fpectacles, plaçoient les étrangers à l'ombre, & fe mettoient eux-mêmes où ils pouvoient. (XI. 24.) Saxıdasovios=ixatiZorro.

X X I V.

Perdiccas ayant demandé à Socrate pourquoi il ne venoit pas chez lui: c'eft, répondit Socrate, pour ne pas mourir désespéré de recevoir du bien fans pouvoir en faire à mon tour. XI. 25.) τῷ Περδίκκα = ἀντεοποῆσαι,

NOTE S.

Nous fommes compofés d'un efprit &

d'un corps.

Nous vivons en fociété.

Nous faifons partie du monde.

Tel eft à notre égard l'état des choses établi par la nature.

Un stoïcien se demande : pourquoi fuisje fait? Et il fe répond: pour vivre conformément à la nature. C'eft ma loi naturelle, c'eft ma condition, ma conftitution, & pour ainfi dire, ma structure.

1o. J'ai un esprit & un corps.

En vain je rechercherois quelle eft leur nature. Je fais que la connoiffance intime de leurs effences paffe ma portée. Mais quelles font leurs fonctions? L'un pense & fent; l'autre eft une machine organisée qui fe meut & fe nourrit. J'apperçois d'abord ces grandes différences. Mais pour connoître ma loi, il faut que je porte mon attention plus avant; & comme je vois

que

que ces deux fubftances font unies par des liens & des rapports dont la nature passe auffi ma portée. Sans chercher à la définir, je m'arrête uniquement aux effets de qua lité morale que j'éprouve, & qui me font communs avec tous ceux de mon efpece.

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D'un côté j'ai des paffions de colere, d'amour, de defir, d'averfion, de plaifir, de douleur; & de l'autre, je fens en moi une faculté fort curieufe de connoître le vrai & la jufte valeur des chofes, qui examine toutes mes imaginations, qui raifonne, décide, choifit librement, jusqu'à préférer, si elle veut, le défagréable à ce qui plaît, dans la feule vue de fe prouver à elle-même fa liberté. Je conclus de là que cette faculté est la principale partie de moimême, & que je peux diftinguer en moi, comme dans un cavalier, l'homme d'avec le cheval. Mes appétits naturels font les fantaifies du cheval; mais le cavalier les réprime, guide & gouverne le cheval. Or ce cavalier n'eft autre chofe que la raifon divine & humaine dont il a été traité

au chapitre précédent. Voilà donc mon vrai législateur : la raison commune & universelle dont Marc-Aurele a parlé cideffus.

Voyons encore, en rapprochant plufieurs pensées éparfes de Marc-Aurele, ce qu'il penfoit du fuprême légiflateur de l'homme.

Il n'y a qu'un feul Dieu qui eft par-tout.... une feule loi qui eft la raison commune à tous les êtres intelligens. (VII. 9. )

L'efprit de chacun est un dieu, & une émanation de l'être fuprême. (XII. 26.)

Celui qui cultive fa raifon doit être regardé comme un prêtre & un miniftre des dieux, puisqu'il se confacre au culte de celui qui a été placé au dedans de lui comme dans un temple. (III. 4.)

Il fe garde bien de faire injure à ce génie divin qui habite au fond de fon cœur..... il fe le conferve propice & favorable, en lui faifant modeftement cortege comme à un dieu. (III. 16.)

Dédaigne tout le refte pour t'occuper uni

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