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bonheur que tu defires, & autour duquel tu ne fais que tourner. Tu n'as qu'à oublier le paffé, remettre l'avenir entre les mains de la providence, & ne t'occupant que du préfent, le diriger vers des objets de fainteté & de juftice. Je dis de fainteté, en aimant ta destinée telle qu'elle eft, car la nature l'a faite pour toi & t'a fait pour elle; & de juftice, en difant toujours librement & fans détour la vérité, & faifant tout ce qu'exigent les loix & le mérite des circonftances.

Que rien ne t'en empêche, ni la mẻchanceté des autres, ni leurs opinions, ni leurs difcours, ni même ce qu'ils pourroient faire fouffrir à cette maffe de chair que tu nourris autour de toi; car c'est elle qui fouffre: c'est son affaire.

Te voilà bientôt à la fin de ta course. Si tu dédaignes tout le refte pour t'occuper uniquement du culte de cet efprit dont la source eft divine & qui te guide; fi tu ne crains pas de mourir, mais feulement de n'avoir pas affez tôt commencé à vivre

conformément à ta nature, tu te rendras digne du monde qui t'a donné l'être (1). Tu ne feras plus un étranger dans ta patrie, tu ne recevras plus avec furprife comme des événemens inefpérés, ce qui arrive journellement; tu ne dépendras plus de ceci ou de cela. (XII. 1.)

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(1) Notre efprit, dit-il ailleurs, eft un écoulement de la divinité. Nous n'avons rien qui foit à nous de notre fond. Nos enfans, notre corps, notre ame, font venus dê là. (XII. 26 du texte.) Ainsi le monde qui nous a donné l'être eft Dieu même, felon Marc-Aurele, qui défigne encore l'être fuprême par ces expreffions: la raifon de Punivers, ou du monde, laquelle produir toutes choses, (IV, 14, 21. VI. 24.) l'esprit de l'univers, (V. 30. VIL 75.) & par conséquent toujours Dieu, l'auteur du monde & de tout ce qui a été fait; d'autant mieux qu'au commencement de ce même article, Marc-Aurele fe remer pour l'avenir entre les mains de la providence.

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COMMENCER le matin par se dire: aujourd'hui j'aurai affaire à des gens inquiets, ingrats, infolens, fourbes, envieux, infociables. Ils n'ont ces défauts que parce qu'ils ne connoiffent pas les vrais biens & les vrais maux. Mais moi qui ai appris que le vrai bien confifte dans ce qui eft honnête & le vrai mal dans ce qui eft honteux; moi qui sais quelle eft la nature de celui qui › me manque, & qu'il eft mon parent, non par la chair & le fang, mais par notre commune participation à un même efprit émané de Dieu, je ne peux me tenir pour offenfé de fa part. En effet, il ne fauroit dépouiller mon ame de fon honnêteté ; & il eft impoffible que je me fâche contre un frere & que je le haïffe; car nous avons été faits tous deux pour agir de compagnie,

à l'exemple des deux pieds, des deux mains, des deux paupieres, des deux mâchoires. Ainfi il eft contre la nature que nous foyions ennemis; or ce feroit l'être que de fe fupporter l'un l'autre avec peine & de fe fuir. (II. 1.) ¿wdev =ùπoo7péQeodas.

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Ils font nés pour faire néceffairement de ces actions, & celui qui le trouve mauvais ne veut pas que le figuier ait du lait. Après tout vous mourrez bientôt l'un & l'autre, & fort peu après, on ne fe fouviendra pas même de vos deux noms. (IV. 6.) Taïla =

ὑπολειφθήσεται.

I I I.

C'eft folie d'afpirer à des chofes impoffibles; or il eft impoffible que des méchans ne faffent pas quelques actions conformes à

leur naturel. (V. 17.) sò và ➡xostTY,

I V.

Te mets-tu en colere contre quelqu'un qui fent du gouffet? Te mets-tu en colere

le

contre celui qui a l'haleine puante? Qu'y peuvent-ils faire ? La bouche de l'un, gouffet de l'autre font ainfi faits; il eft impoffible que d'un tel corps il ne forte pas une telle odeur. Mais, dira-t-on, l'homme a de la raifon; il peut, avec de l'attention, reconnoître à quoi il manque. Hé bien, tu as auffi de la raison; fers-t-en pour exciter la fienne, remontre-lui fon devoir, avertisle de fa faute; s'il t'écoute tu le guériras. Il eft inutile de fe fâcher. (V. 28 prefqu'entier. ) sẽ param n

V.V

Le miel paroît amer à ceux qui ont la jauniffe. Ceux qui ont la rage craignent L'eau. Une petite bale eft aux yeux des enfans un bijou. Pourquoi donc me fâcher contre des hommes pleins de préjugés? Croistu que leur imagination féduite ait moins de force fur eux, que n'en a la bile fur celui qui a la jaunisse & le venin fur celui qui a la rage? (VI. 57.) ïnregiãoï—avooodíxrw.

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