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reusement privé du secours de la révélation & de la foi chrétienne: mais il dit en général que Dieu regarde les efprits comme étant émanés de lui, & qu'il les touche fon intelligence. (XII. 2.) Il ajoute que l'efprit humain réduit à lui-même brille d'une lumiere qui lui découvre la vérité de toutes choses. (XI. 12.) Comment l'homme, ditil, tient-il à Dieu? Par quelle partie, ET QUAND Y TIENT-IL? Et quel repos cette partie de l'homme ne trouve-t-elle pas en Dieu! (Article 3 de ce chapitre à la fin. )

Ces mots, quandy tient-il, conviennent fur-tout à l'état de l'ame après la mort; & le repos en Dieu fuppofe une continuation d'existence à part.

Mais Marc-Aurele n'ignoroit pas à quelles conditions il pouvoit obtenir ce repos en Dieu. Oublie le passe, se disoit-il; remets l'avenir entre les mains de la providence..... Te voilà bientôt à la fin de ta course. Si tu dédaignes tout le refte,pour t'occuper uniquement de cet efprit dont la fource eft divine & qui te guide; fi tu ne crains pas de mourir,

mais feulement de n'avoir pas affez tôt commencé à vivre conformément à ta nature, tu te rendras digne [ de l'auteur] du monde qui t'a donné l'être. (XII. 1.) En quel état faut-il que fe trouvent & le corps & l'ame quand la mort arrive? Cette vie eft courte ; elle eft précédée & fuivie d'une éternité. (XII. 7.) Conferve dans fa pureté le génie qui t'anime, comme fi dans l'inftant tu devois le rendre. (III. 12.) Paffe ta vie avec la même pureté de confcience que ton pere Antonin, afin que ta derniere heure te trouve au même état que lui. (VI. 30 à la fin, &c. &c.)

En adoptant ces conditions du repos en Dieu, Marc-Aurele fait affez entendre que le fort des méchans ne fera pas le même. Il reconnoît expreffément la justice diftributive de Dieu felon les mérites. ( IV. 10.) Il ne parloit que pour lui, & n'a pas fans doute écrit tout ce qu'il avoit pensé en fa vie. Il n'avoit pas tout à fait 59 ans lorfqu'il mourut, & il avoit employé beaucoup plus de tems à agir qu'à écrire. que Marc

C'en eft affez pour faire voir

Aurele croyoit l'immortalité de l'ame. Ceux qui ont cru qu'il en avoit toujours douté n'avoient pas affez médité ses penfées. J'ai déja obfervé que Marc-Aurele parle fouvent dans d'autres fyftêmes que le fien, pour se mieux exciter à être vertueux, quelque fuppofition qu'on voulût faire; & il en a ufé de même, foit pour faire une énumération complette des différentes hypothefes (dans lesquelles il comprend celle du fimple déplacement ou tranfmigration de l'efprit), (IV. 21. VII. 32.) foit pour faire fentir l'égalité naturelle de tous les hommes, (VI. 24.) foit pour fe mieux détacher de toutes les chofes d'ici bas. (V. 33. VIII. 25 & 58.)..

L'opinion de Marc-Aurele fur l'immortalité de l'ame étoit une fuite néceffaire de celle qu'il avoit fur une providence pleine de juftice, & j'ai déja observé qu'il tenoit à cette derniere opinion plus qu'à fa propre vie: Qu'ai-je à faire, s'écrioit-il, de vivre dans un monde fans providence & fans dieux !

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Après cela, on peut raisonnablement croire que Marc-Aurele, à la fin de fa vie, fit à l'être fuprême cette priere d'Epictete, dont il remercie Rufticus de lui avoir donné le recueil :

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« C'est affez; j'éleve mes mains vers toi.............. » Je n'ai pas négligé les lumieres que tu m'as don»nées pour connoître ton gouvernement & » pour m'y foumettre du fond du cœur. Je ne » t'ai fait repentir de m'avoir fait une partie » de toi-même. Vois l'usage que j'ai fait de mes

pas

fens & de mes réflexions. Me suis-je jamais »plaint de toi? Ai je fupporté impatiemment » quelqu'accident de la vie? Ai-je fouhaité qu'il »m'arrivât autre chofe? Suis-je allé contre tes » difpofitions? Je te rends graces de m'avoir fait » naître. J'ai toujours usé de tes dons comme les »tenant de toi. C'eft affez, reprends-les, & » mets-moi en tel lieu qu'il te plaira ». (Arrien d'Upton, IV. io. p. 652.) ἀρκεῖ μοὶ = χώραν,

CHAPITRE

CHAPITRE XXXV & dernier.

Récapitulation de quelques maximes.

Ï.

Ce que je dois penser fur les autres hommes.

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PREMIEREMENT, quelles qualités naturelles me lient avec eux & que nous fommes nés les uns pour les autres ; & que, dans un autre rapport, j'ai été fait pour les conduire, comme le bélier fon troupeau, ou le taureau le fien. Remonte plus haut s'il n'y a point d'atomes, c'est la nature qui gouverne tout; & fur ce pied là les moindres êtres font faits pour les meilleurs, & ceux-ci les uns pour les

autres.

Mais, fecondement, quelles font les actions de plufieurs d'entre eux à table, au lit, ailleurs? Sur-tout à quelles néceffités ils font affervis par leurs opinions? Et cependant quel fafte dans ces baffeffes!

Ee

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