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» Comment t'en vas-tu ? De la façon dont >> vous l'avez voulu, comme un être libre, » comme votre bon ferviteur, comme pé» nétré de vos commandemens & de vos » défenses. Mais pendant que je demeure ici » bas, quel homme voulez-vous que je » fois ? Commandant, ou perfonne privée ? » Sénateur, ou plébéien ? Soldat ou capi»taine? Précepteur d'enfans, ou pere de >> famille ? Dans quelque pofte, dans quel» que rang que m'ayiez mis, je mourrai » mille fois (comme dit Socrate) plutôt » que de l'abandonner. Mais encore, où >> voulez-vous que je fois? A Rome? à » Athenes? à Thebes? aux ifles Gyares? » Ah! fouvenez-vous feulement de moi, » en quelqu'endroit que je fois ». dìà ToũTo • xuλòs=μéμvyoo. Là même, pages 509 & 510.

καλός

CHAPITRE VI.

Sur les prieres.

I.

La priere de chaque Athénien étoit : faites pleuvoir, ô bon Jupiter, faites pleuvoir fur nos champs & fur tout le terroir d'Athenes. En effet, il ne faut point prier du tout, ou prier de cette façon, fimplement & noblement. (V.7.) x = iλcudégws.

I I.

Ou les dieux ne peuvent rien, ou (1) ils peuvent quelque chofe; s'ils ne peuvent rien, pourquoi les prier? Et s'ils ont quelque pouvoir, pourquoi, au lieu de les prier de te donner telle chofe ou de mettre fin à telle autre, ne les pries-tu pas de te délivrer de tes craintes, de tes defirs, de

(1) Le mot depiwoai, rejetté par tous les commentateurs, ne fe trouve pas dans le manufcrit du roi, fol. 180, où eft cet article.

tes inquiétudes? Car enfin, fi les dieux peuvent venir au secours des hommes, ils peuvent y venir auffi en ce point.

Tu diras peut-être : les dieux ont mis ces chofes en mon pouvoir. Il vaudroit donc mieux faire usage de tes forces, & vivre en liberté, que de te laiffer tourmenter honteufement & en efclave pour des objets qui font hors de toi. Mais qui t'a dit que les dieux ne viennent point à notre secours dans les chofes mêmes qui dépen dent de nous ? Commence feulement à leur demander ces fortes de fecours, & tu verras. Celui-ci prie pour obtenir les faveurs de fa maîtreffe; & toi, prie pour n'avoir jamais de pareils defirs. Celui-là prie pour être délivré de tel fardeau; & toi, prie d'être affez fort pour n'avoir pas befoin de cette délivrance. Un autre prie les dieux de lui conferver fon cher enfant; & toi, prie pour ne pas craindre de le perdre. En général, tourne ainfi tes prieres, & attends l'effet. (IX. 40.) iros =

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NOTES.

Marc-Aurele dit ailleurs : dans tout ce que tu entreprends, ne manque pas d'invoquer le fecours des dieux. (VI. 23 du texte.)

SENEQUE difoit au contraire (1): « Qu'est-il besoin de les prier? Rends-toi » heureux toi-même. Entre en poffeffion » du fouverain bien, puifque tu le con»nois. Dans le moment tu commences à » être le compagnon, & non le suppliant » des dieux. Demandes - tu comment t'y » prendre? Le chemin en eft fûr, agréable. » La nature t'y conduit. Use des facultés » qu'elle t'a données; & tu deviendras égal » à Dieu (2). ... Il eft fou de fouhaiter ce >> que tu peux obtenir de toi-même. C'est >> en vain que l'on leve les mains au ciel ».

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HORACE, échauffé par l'exemple des fiers fentimens des stoïciens, disoit auffi (3): Que Jupiter me donne une longue vie &

(1) Epître 31.

(2) Epître 41.

(3) Epître 18 du liv. 1.

des richeffes, je faurai bien me former tous feul une ame jufte.

Seneque cependant ne dédaignoit que les dieux fubalternes. Il croyoit que fa raifon faifoit partie de la raison fuprême, & dans ce fens il avouoit qu'on ne peut être homme de bien qu'avec le fecours de Dieu; qu'une ame ne peut s'élever que par ce fecours; que c'eft Dieu qui donne les confeils grands & courageux, &c.

Marc-Aurele étoit dans le même fentiment que Seneque fur la nature de la raifon humaine, écoulement de celle du dieu des dieux; mais regardant, avec Platon, les dieux fubalternes comme les miniftres de l'être fuprême, il préfumoit que ces dieux créés pouvoient auffi venir à son se

cours.

Voici une belle priere au Dieu fuprême, compofée par le platonicien Jamblique (1). C'est un extrait du dialogue de PLATON fur la priere. SYMPLICIUS l'a rapportée à la fin

(1) Des mysteres, à la fin des notes, p. 316 de l'édi tion d'Oxfort.

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