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n'être jamais éclaircie: & on le doit avec d'autant plus de fondement, Qu'on prend des routes diamétralement oppofées à celles qu'il faut tenir pour arriver au but: Qu'on n'étudie pas affez le génie, le caractere & l'humeur des Gaulois, leur Religion, leur courage, leur intrépidité, leur franchise, leur équité, leurs migrations, leurs conquêtes; Qu'on ne confidere pas la pofition des Gaules dans fon véritable jour; Qu'on n'a qu'une légere teinture de l'Hiftoire de fes habitans ; Qu'on s'efforce d'affujettir les coûtumes, les usages, & les maximes de ces derniers, aux coûtumes, aux usages, & aux maximes de leurs voifins, qu'il eft néanmoins certain que les Gaulois ont foûmis pendant plufieurs fiécles, & auxquels par conféquent ils ont communiqué leur efprit, leurs loix, leur Religion & leurs manieres, comme c'eft l'ordinaire des vainqueurs.

Voilà à peu près les obftacles, qui arrêtent les progrès que l'on pourroit faire dans la connoiffance de

nos antiquités; mais il y en a un plus fort encore, qui eft peut-être la fource des autres ; & celui-ci ne regarde pas l'origine des Gaulois, que je viens d'affûrer être condamnée, auffi bien que celle de prefque toutes les au tres nations,à n'être jamais débroüillée. Il a pour objet leur hiftoire & celle de leurs conquêtes. On la croit impoffible, fans fuite, fans liaison avec celle des autres peuples, obfcure, peu intéreffante, & dépourvûë de titres & d'originaux. C'eft un préjugé, dont perfonne n'eft peutêtre exempt: j'en ai été moi-même infecté comme les autres pendant plufieurs années: & c'eft le feul prétexte que j'ai oppofé aux fortes inftances, que mon traité de la Religion des Gaulois donnoit occafion de me faire affez souvent, d'entreprendre un travail de cette nature.Le hazard feul a contribué à diffiper mon aveugle ment. Il y a trois ou quatre ans, qu'obligé de garder la chambre à caufe d'une maladie qui m'y retenoit, je ne fçai quel efprit de curiofité me

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porta à repaffer ce que j'avois lu au trefois des Gaules & des Gaulois dans les différens Auteurs, qui m'étoient tombés entre les mains : je paffai ainfi alternativement des Grecs aux Romains,& des anciens aux modernes ; & je les comparai enfemble: le tems que je mis à les comparer fut long; mais il ne me le paroif-, foit point, parce que je découvrois toûjours quelque nouveau jour, & que le plaifir qui y étoit attaché, changeoit en rofes les épines dont eette forte d'occupation étoit hérif fée. C'eft ainfi que je parvins peu à peu à ouvrir entiérement les yeux, & à reconnoître deux chofes qui é-, toient d'un grand prix: la premiere, que les anciens fourniffoient des matériaux en abondance, pour faire une Hiftoire fuivie des Gaulois, qui au→ roit non-feulement tout le mérite de la houveauté, puifqu'outre que ce fujet n'avoit jamais été entamé, il paffoit même pour ne pouvoir, & ne, devoir jamais l'être mais encore qui corrigeroit l'Hiftoire Grecque iv }

& l'Hiftoire Romaine dans tous les points qui concernent les Gaulois, répandroit fur l'une & fur l'autre de grandes lumieres, & les rendroit bien plus complettes qu'elles ne le font. La feconde, que les modernes, à l'exception d'un fort petit nombre, qui ont affez bien éclairci quelques difficultés détachées qui regardent les Gaules, n'ont prefque vû goute dans notre Hiftoire, ni dans fes rapports. On n'entrera dans aucun détail fur cela, afin qu'on ne puiffe point nous attribuer des vûës, que nous n'avons fûrement point. Nous nous contenterons de proposer le commencement des Annales des Gaules de notre façon, autant pour le foûmettre au jugement des Sçavans, avoir leur avis, & profiter de leurs lumieres, qu'afin que le Lecteur ait comme fous fes yeux la diftance infinie qu'il y a entre l'idée qu'on s'eft formée jufqu'ici de notre Hiftoire, & celle qu'on doit s'en former, felon les regles éxactes de la Chronologie, de la Géographie & de la vérité.

En dreffant ces Annales, on s'eft moulé fur celles que les Collecteurs des Hiftoriens des Gaules & de la France ont tracées : &, comme eux, on a fuivi le calcul des Faftes Capitolins.

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