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Codrus pro

celebre, qui se dévoua genereuse. ment à la mort pour son païs. Horace en fait mention , patria non timidus mori. Piltrate fut celui, qui chassé deux fois d'A. thenes, dont il s'étoit fait Roi, eut l'addresse d'y rentrer une troifiéme fois, & de s'y rétablir.

On n'est pas bien d'accord sur le nom du Pere d'Anacreon. Les u:'s l'appelloient Scytimus, les autres Eumelus, les autres Parthemius, & les autres Aristocritus. Il a vécu du tems que Polycrates regnoit à Samos; c'est-à-dire cinq cens ans avant la venuë de JesusChrist.

Son esprit le rendit si agreable à ce Prince, qu'il eut l'honneur d’ê. tre admis dans ses conseils & dans ses plaisirs; & ressentit personnellement les effets de la liberalité. On dit qu'ayant une fois reçu de lui cinq talens; il palla deux nuits sans dormir,de l'inquietude que lui donnoit la garde de cette somme , & qu'il la lui rendit, pour se débarrasser, disoit-il , de ce qui lui causoit tant de soins.

Ce trait ne me paroît pas fi hors de vrai-semblance, qu'il a semblé à quelques Interpretes. Anacreon, il est vrai, se montre dans ses Ouvrages si détaché de richesses,qu'on a de la peine à croire que la peur de perdre cet argent, le pût troubler à ce point-là. Cependant il faut songer que cinq talens font environ dix mille francs de notre monnoie ; & qu'il est très-probable que cette somme, qui ne nous paroît pas presentement fort confiderable, pouvoir l'être au païs,& dans le fiecle d'Anacreon, puis qu'il y a eu même des tems en France, où c'eût été être richeque de la posseder. Un passage d'Herodote favorise cette opinion. Il dit que Clysthenes, Prince de Sicyone, aiant fait choix de Megacles

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pour son gendre , qu'il préfera à plusieurs Princes, qui etoient venus briguer le mariage de sa fille ; il leur donna à chacun un talent, pour les dédommager des dépences de l'allée & du retour , & de celles qu'ils avoient faites pendant une année de sejour en ses Etats. Anacreon aimoit fort ses aises, & son détachement pour les richesses pouvoit bien aller jusqu'à ne vouloir pas

se donner les soins & les peines qu'il faut pour les acquerir : mais il pouvoit bien d'abord être flaté de la poffeffion d'une somme considerable qui ne lui coutoit rien, & qui lui donnoit le moien de gouter encore mieux les agrémens de la vie. Ajoutez qu'il étoit peutétre peu accoutumé à fe voir devant lui une si grosse somme à la

fi fois; & par toutes ces raisons il n'est pas

'étonnant qu'il ait apprehende de la perdre. Mais en la rendant, comme il fit , ne la perdoit

il

pas aussi réellement que si elle lui eût été volée ? Il en faut bien convenir : mais il vouloit avoir l'honneur de s'en être dépouillé volontairement, & il aima mieux que son Bienfacteur en profitât qu'un voleur. Polycrates ne fut

pas

le seul Prince qui lui donna des marques de son estime. Hipparchus, fils du même Pisistrate, dont il est déja parlé, lui envoya une galere à cinquante rames, le preffant par des lettres de passer la mer Egée, & de venir en la Cour , où le bruit de sa reputation donnoit à tout le monde,

& à lui en particulier, une grande impatience de le voir.

Outre les Odes, qui sont pafsées jusques à nous, il avoit com

à pofé encore des Elegies & des Hymnes

. Il ne reste plus aucune de ses Elegies, & l'on ne yoit plus que quelques fragmens de Tes Hymnes. Mais il suffisoit de ses

Odes,

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Odes, pour établir fa reputation. Ce n'est ni la quantité, ni la longueur des Ouvrages, qui immortalisent un Auteur: c'est leur bonté, dit Martial.

Sæpiùs in libro memoratu Perfius

ung

Quam levis in totà Marsus Amd.

zonide. Il n'est pas besoin que je parle ici de son esprit & de ses mæurs. Il nous en donne dans ses Ouvra. ges une image trés vive & trés nacurelle. L'amour & le vin qui furent ses deux passions dominantes, ne devoient point dans la morale de ce tems-là passer pour de grands vices : puisque Platon , le divin Platon, ne fait point de dif. ficulté de lui donner dans ses écrits le nom de Sage. Mais il n'est pas étonnant que n'étant point éclairé des lumieres de la veritable Religion , & n'aiant aucune idée des récompenses qu'elle nous promet dans l'autre vie, quelques

í

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