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Où font ces peuples fi braves,
Dont les nombreux efcadrons,
Des Anglois & des Bataves
Devoient vanger les affronts ?
Où font ces Chefs fi terribles,
Qui, loin de nous, invincibles,
Par mépris, & comme un jeu,
Vouloient montrer à leurs Bellcs
La mort fur nos Citadelles

Tombant en globes de feu ?

a Ils avoient invité les Dames de Turin an bombardement de Pignerol.

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MADAME LA PRINCESSE DE TOSCANE,

A l'occafion d'une Comedie qu'elle compofa &qu'elle fit representer fecrettement par des Dames de fa Cour, elle-même y joüant le perfonnage d'une Esclave.

Pourquoi, belle Princeffe, envier à nos yeux

De vôtre efprit divin les efforts glorieux ?
Dans le fond d'un palais, loin de nous, renfermée,
Vous efperez en vain tromper la Renommée,
En vain vous écartez la foule des témoins

D'un fpectacle galant préparé par vos foins,
Malgré vous, la Déeffe invifible & prefente
Vous a vûë, au milieu d'une troupe charmante,
Et d'un gefte & d'un ton par les Graces dictez
De vôtre propre ouvrage animer les beautez.
Quelle fut fa furprife! Et quel plaifir pour elle
D'en aller aux neuf Sœurs apprendre la nouvelle !

On fait, Mufes, dit-elle, on fait que mille fois

Du nom de VIOLANTE ont retenti vos bois.
Sa beauté, fon efprit ne peut plus vous furprendre:
Mais qui peut concevoir ce que je viens d'entendre?
Souvent, de la Nature empruntant les couleurs,
De feintes paffions nous ont tiré des pleurs :
Mais ceux qui fur la Scene, en leurs doctes
ouvrages,
En offrent à nos yeux de fi vives images,
Par épreuve ont connu ce que leur Art décrit,
Et leur cœur peut fans peine inftruire leur efprit.
Quel plus rare prodige ! Une jeune Princeffe,
A qui le ferme appui de fa haute fageffe
Fit toûjours ignorer ces tranfports violens,
Qui foûmettent une ame à l'empire des sens ;
A nos regards charmez en trace une peinture,
Où le cœur attendri reconnoît la Nature.

D'un Epoux, il cft vrai, plus charmant que l'A

mour

Le merite la feut enflammer à fon tour;
Mais de ces feux contens, fans trouble, fans foibleffe,
Le Theatre à regret expose la tendreffe.

Il faut aux vils mortels conduits par leur penchant.
Du malheur, qui le fuit, faire un tableau touchant,
Il faut les effrayer par l'exemple funefte,
Ou du crime de Phedre, ou des fureurs d'Orefte
Et lors que d'un Heros on leur peint la vertu,

S'il n'eft des paffions ou du fort combattu,
De l'affiette d'un cœur fi ferme, fi tranquile,
On offre à leur foibleffe un mòdele inutile;
La vertu de fi haut bleffe leurs yeux jaloux,
Leur femble inacceffible, & les rebute tous.
Ainfi d'un ton plaintif, sous l'habit d'une esclave,
Exposée aux rigueurs d'un destin qui la brave,
VIOLANTE aujourd'hui nous montre en ces revers
L'innocente Vertu qui gémit dans les fers.
O Peuples, quel bonheur, de voir vôtre Princeffe
Du cœur humain pour vous revêtir la foibleffe!
De l'Amour & du fort fubir ainfi les coups,
Pour vous montrer en foi ce qu'il faut craindre

Mais vous,

en vous !

favantes Sœurs, par des chants dignes

d'elle,

Rendez un juste hommage à sa gloire immortelle,
Publiez à l'envi l'excez de fes bontez.
VIOLANTE n'eft pas de ces vaines Beautez,
Qui préparant aux cœurs des fers & des allarmes,
Ne s'occupent jamais que du foin de leurs charmes.
De cette même main, qui fait de ses cheveux
Les liens d'un Epoux, digne objet de ses vœux,
Elle fait vous donner les marques les plus cheres
Du zele, qui l'attache à vos facrez misteres.

C'eft ainfi qu'autrefois le fecond des Cefars, D'un accueil favorable honorant les beaux Arts De cette même main, qui lança le tonnerre, Dont le bruit à fes loix foûmit toute la terre, Traçoit un docte ouvrage, où le fort inhumain Forçoit le fier Ajax à fe percer le fein.

Elle dit, & foudain les échos du Permeffe Retentirent de cris & de chants d'allegresse, · De fon onde plus pure il verfa les trésors, Et les lauriers plus verds fleurirent fur ses bords,

L'AVIS INUTILE.

ODE

Alheureux mille fois quiconque dans ces lieux

Voulut faire briller ton éclat à nos yeux,

Fleur fuperbe, fleur fanguinaire. Puiffes-tu déformais naître autour des tombeaux;

Que le Ciel irrité te refuse ses eaux;

Que le Soleil, que tout te devienne contraire,

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Ainfi d'une voix fiere exprimant fes fouhaits,

Iris, qui d'une rose avoit fenti les traits,

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