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Ny le cerf qu'il vouloit, ny le dain qu'il regrette.
J'ay vû moy-même un jour un berger dédaigneux,
Pour avoir un hautbois qui feul flatoit ses vœux,
D'un frêle chalumeau méprifer l'harmonie.
Il n'eut ny l'un ny l'autre, & fa fierté punie
Vit qu'un autre berger, pour le confondre mieux,
Du même chalumeau vint jouer à fes yeux.
C'eft ainfi, Nemefis, qu'éclatte ta vangeance,
Ainfi tu fçais tromper une vaine efperance.

Tels & d'autres difcours, par les vents emportez,
Ces Belles, à l'envi, m'ont fouvent repetez.
Mais le chien voudra plaire à la louve attendrie,
Du taureau fur les monts l'ourfe fera cherie,
La lionne rendra le chevreil amoureux,
Quand Lycifque ou Melis pourront changer mes

vœux.

Ouy, tout fera plutôt changé dans la nature,
Les zephirs,les ruiffeaux perdront leur doux murmure.
On n'eftimera plus les rofes ny les lis,

Quand je n'aimeray plus la belle Amarillis.

De mon cœur amoureux l'ardeur tendre & fidelle.

A commencé par elle, & finira par elle.

REMARQUES

SUR L'IDILE PRECEDENTE.

CE

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Ette Idile eft le chef d'œuvre de Bucchanan, & à mon avis, elle ne cede en rien à celles de Bion & de Mofchus. Echo feule fenfible, &c.] C'est l'Echo Nimphe, dont on parle ici, & non pas Echo pris pour bruit; car alors il est masculin.

Ai-je dit aux Zephirs. ] Bucchanan s'addreffe aux Zephirs, parce que ce font les vents qui foufflent de Portugal vers Paris. Plus bas il demande des nouvelles d'Amarillis à Eurus, parce que c'eft le vent qui fouffle de Paris vers le Portugal.

Comme fur les rofeaux, &c.] Il y a fix comparaifons de fuite dans l'Original. J'ai cru qu'il fuffifoit de trois dans ma traduction. Encore en ai-je changé quelques

unes.

Il faut de Nemefis redouter la puiffance.] Nemefis fille de la Nuit & de l'Occean étoit regardée chez les Anciens comme une Déeffe, qui a foin de punir l'orgueil immoderé des hommes. Son nom derive de viunors, Diftribution, parce qu'elle di

ftribue à chacun fa peine felon fon crime. Les Grecs l'appelloient auffi Adraftée. Quelques uns difent qu'elle fut ainfi nommée,parce qu' Adrafte fut le premier qui lui bâtit un temple: mais il y a plus d'apparence que ce nom vient de Spacuès, Fuite, avec un alpha privatif, pour fignifier que les méchans ne fauroient éviter fa pourfuite. Et c'eft auffi pour cela qu'on la peignoit avec des aîles. C'est ainfi qu'Ariftote explique les deux noms de cette Déeffe, dans fon Livre du monde.

Du même chalumean, &c. ] J'ai obmis une autre comparaison qui fuit dans l'Original. J'ai cru que les deux premieres fuffifoient.

On n'eftimera plus les rofes ni les lis. ] J'ai mis cette comparaifon à la place d'une autre qui eft dans le latin.

Au refte dans l'antepenultieme vers de l'Original il y a un folecisme que j'ai vû dans toutes les editions. C'eft meum pectora, au lieu de meum pectus, ou mea pectora. Il n'y avoit, pour le corriger., & faire le vers, qu'à mettre mihi, au lieu de meum.

Illa mihi rudibus fuccendit pectora flammis. Cela eft fi aifé, que j'ai de la peine à croire. malgré la conformité de toutes les éditions, que Bucchanan ne l'ait pas écrit ainfi.

ELEGIE

茶茶

ELEGIE

SUR UNE PASSION DIMINUE'E.

C'est une Femme qui parle.

Non, vous ne m'aimez plus, & vôtre ame infidelle

N'a plus rien d'une ardeur, que j'ay crue immortelle.
Je n'en puis plus douter. Je voulois en ce jour
Par vos chagrins jaloux juger de vôtre amour.
Devant vous, prés de vous mon cœur s'eft pû con-

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traindre

A flatter un Rival, qui pût vous faire craindre.
Je voulois dans vos yeux voir briller le courroux :
Mais, loin d'y rien trouver qui marquât un Jaloux
Vous ne fûtes jamais d'humeur plus agreable.
Quel changement fi promt vous rend fi raisonnable?
Autrefois un fouris, ou le moindre regard,
Vers ce même Rival échappé par hazard,

De tout vôtre courroux m'attiroit les allarmes,
Qu'a peine j'appaifois par des torrents de larmes.
Vous vouliez qu'en vous feul fixant tous mes defirs,
Je fiffe tout ceder au foin de vos plaisirs.
Une heure, par hazard écoulée à m'attendre,

d

Etoit un crime affreux, qu'on ne pouvoit deffendre.
Vos chagrins excufoient, ny befoin, ny devoir.
Maintenant que je fois, tout un jour, fans vous voir;
Quand vous me revoyez, vos feux dans le filence
Ne me demandent plus compte de mon absence,
Sans que vous m'en preffiez, je vous dis mes rai-
fons,

Et vous les écoutez tranquile, fans foupçons.
Rien de moy ne peut plus vous paroître une injure.
Ah! ton crime eft certain, tu me trahis, Parjure
Tes carreffes icy ne me raffurent point.

Ton fexe fans amour eft prodigue en ce point.
C'eft par là tous les jours qu'il ébloüit le nôtre. ·
Par tes transports jaloux diftingue-moy d'une autre.
Reprens ce fier courroux, ces mouvements confus,
Que l'on ne reffent point pour ce qu'on aime plus,
De reproches cruels accable-moy fans ceffe,
Et demande à mon cœur encor plus de tendresse,
A mon parfait amour impute des defauts,
Et dans tous tes amis pense voir des rivaux.
Quoy que jure à tes yeux mon ardeur fi visible,
Helas! qu'on aime peu, quand on eft fi paisible!
Si tu m'aimes enfin, fur quelle feureté
Gardes tu fi long temps cette tranquilité ?
Jamais cœur n'a brûlé d'une plus vive flame,

Je t'adore, il eft vray: mais enfin je fuis femme,

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