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Et tu vois bien ce bois fi beau, fi fpatieux,
Ou tout me plaît, où tout m'attire ;
S'il falloit que l'on me vînt dire:
Tu ne fortiras plus de ces aimables lieux,
Fais-y pour jamais ta demeure ;
Auffi-tôt ce bois à mes yeux

Ne paroîtroit qu'un fejour ennuyeux,
Qu'une étroite prifon où je mourrois fur l'heure.
Pour bornes à mon vol je ne veux que les Cieux.
De ce difcours, je le confeffe,
Je goûtai la folidité,

Et puis lorfque vers la tendrefle

On fe trouve auffi porté,

Que les Oiseaux de mon efpece,

pour un cœur, fans l'amour point de felicité.

Or pouvois-je chez vous en gouter les doux char

mes

Vous qui par vôtre exemple, & par vos entretiens; Des tendres cœurs décriant les liens,

Infpirez encor vos allarmes

A la jeune Beauté mife par vous au jour,
Et lui mettez en main les armes >
Dont vous fçavez vaincre l'Amour?
Certe elle a fait, fous votre empire,
Un progrès bien digne de vous.

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Un Amant lui vient-il d'un air foumis, & doux,

Découvrir en tremblant fon amoureux martire?
Elle ne montre à fes yeux nul chagrin :
Mais elle le regarde avec un air malin,

Le quitte fans rien dire, en hauffant les épaules,
Puis fe met à chanter, ou par un faut badin
Répond à fes difcours frivoles.

J'enrageois de bon cœur de voir ainfi chez vous
Condamner un penchant fi doux.

Hé, qui t'empêchoit de le fuivre, (Me direz-vous ici) t'avois-je pas donné Un Amant avec qui vivre ?

Oui, le tour eft, ma foi, d'un efprit raffiné.
Vous me l'aviez choifi fi groffier, fi ruftique,
Qu'on voioit bien que vôtre envie unique

Etoit de dégoûter mes jeunes fentimens

De l'Amour, & des Amans.

Et puis, ne tient-il qu'à dire :

Vîte, aimez cet Amant qui vous aime aujourd'hui, Et pour lui d'abord on foupire ?

'Aime-t-on, ou par l'ordre, ou par les yeux d'autrui? Dans ces reflexions j'avois l'ame plongée,

De divers foucis rongée,

Quand un Zephir, fans doute envoyé par l'Amour, Que j'implorois chaque jour,

Ebranle une fenêtre, & l'eut bien-tôt ouverte.
Je fus prompte à faifir l'occafion offerte.
Je pars, & le fuivant dans le vague des airs,
J'arrive dans un bois, où des arbres divers
L'épaiffe & verte chevelure,

Le murmure des clairs ruiffeaux,
La mufique de mille oiseaux,
Ont fait le plus beau lieu de toute la nature.
Dans tout le bois en un moment
Courut de bec en bcc, la nouvelle certaine
Qu'il venoit d'arriver une Parifienne,

Jeune, & dit-on, d'un air charmant.
A ce bruit auffi-tôt des oiseaux de tout âge,
De tout fexe, de tout plumage,

De toutes fortes de noms

Viennent de tous les environs.

On me regarde, on m'examine.

Ils me trouvoient certains airs fins, touchants,
Dans le regard, dans le port, dans la mine,

Et qu'ils convenoient tous que l'on n'a point aux champs. Je pris, fur leur loüange, une nouvelle audace,

Je déploiai mes aîles à leurs yeux,

Et par un vol ingenieux,

Dans les airs auffi-tôt je trace

Ces chiffres amoureux, ces cercles fi charmans,

Qu'en un bal, avec tant de grace,
Sait former vôtre fille, au fon des inftrumens.
Pour m'applaudir, chacun battoit des aîles,

Et par là je déplus beaucoup à quelques belles.
Une Alloüette fur-tout,

Voiant fon Amant prendre goût

Aux agrémens de ma perfonne,

Me dit d'un ton malin: Bel oiseau de Paris, Montrez-nous quelque effai de vôtre voix mignonne, Da nouvel Opera n'auriez-vous rien appris ? Comme l'on fait, celles de mon efpece

Savent mieux aimer que chanter;

Et la Jalouse crut trouvant cette fineffe,

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Que ma voix alloit tout gâter.

Mais je rabbatis bien fon caquet, & sa gloire.

Je m'apprêtai, je pris mon ton,
Et je leur chantai fans façon

Un air, qui me vint en memoire,

Un air tendre & touchant, que d'un genie aifé

Vôtre fille en charmes feconde

A nouvellement compofé.

Que vous dirai-je enfin je ravis tout le monde.

Surprise, & confuse à la fois,

L'alouette en perdit la voix,

Apprenant par cette avanture

Qu'en moi vos foins heureux corrigeoient la nature. C'eft ainfi que je fçus des hôtes de ce bois

Charmer & l'oreille, & la vûë,

Et je n'y vêcus pas long-tems, fans faire choix

'D'un Amant qu'attache à mes loix

Une ardeur fincere, affiduë....

Mais je fuis contrainte à finir.

Adieu je l'apperçois venir.

Vous

A IRIS,

Le jour de fa fete.

Ous m'avez fait, Iris, une deffenfe expreffe D'ofer faire en ce jour éclater ma tendresse

Par un leger prefent de fleurs.

O Ciel il faudra que je voie

Le bouquet d'un Rival superbe & plein de joye,

Sur vôtre fein étaler fes couleurs.

De quel chagrin mortel mon cœur fera la proye?
Non, quoi qu'il coûte à mon amour,

Je ne vous verrai point, Iris, de tout le jour.
Il cft vrai que vôtre deffense

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