Imágenes de páginas
PDF
EPUB

rap

leur contester ce principe, ni qu'on puiffe dire d'aucune chofe de ce qui eft porté: Cela ne leur arrivoit point en figure: HAEC non in figura contingebant illis.

Mais fi cela eft, il s'enfuit que Pancien Teftament eft un tableau exposé aux yeux des hommes, afin qu'ils y voyent les verités du Nouveau.

Il leur eft dit en general que c'eft un tableau, une énigme, une parabole. Et de plus pour les aider dans l'intelligence de ce tableau, l'Esprit de Dieu leur en a expliqué certaines parties, & par l'explication de ces parties, il leur a donné une clef & un modele pour enten dre tout le refte.

La clef confifte en ce que certaines figures expliquées fervent à en exprimer

d'autres.

Le modele confifte en ce que l'on voit dans ces figures expliquées un exemple des rapports que Dien a mis entre les figures & les originaux.

On voit, par exemple, par les allegories des Prophetes, que Dieu fe fert quelquefois de quelques fignes qui paroiffent bas pour fignifier les plus grandes chofes. L'on voit qu'il n'exige pas nne reffemblance & un rapport fi par fait.

Tout cela étant fuppofé on ne peut

blamer en general fans témerité le foin que les Peres ont eu de s'appliqner aux allegories; car puifque Dieu a expofé l'ancien Teftament comme un tableau il ne l'a donc pas expofé en vain,& ceux qui s'arrêtent à le confiderer, ne font que fuivre fa conduite.

Mais, dit-on, les allegories ne font pas certaines, & par confequent, elles ne prouvent rien. Qu'importe pourvu que l'on y observe deux choles. La premiere, qu'il y ait un rapport railonnable entre la figure & la chofe figurée. La feconde que l'on les rapporte à une

verirė.

Il eft vrai qu'elles ne peuvent pas fervir précisément à établir ces veritès; mais s'enfuit il de-là qu'elles foient inu→ tiles.

Le nombre des gens qui ont befoin de preuves eft fort petit parmi les Chrétiens, & doit être peu confideré; on pent même dire que les predications ne font pas faites pour eux; car on a droit de fuppofer que ceux à qui on parle font Chrétiens. Ceux qui ne le font pas ont befoin d'autres inftructions, & la Religion n'en manque pas, mais ils ne doivent pas trouver mauvais qu'on parle à des gens qui font profeffion du Chriftianifme, comme s'ils l'avoient dans Le cœur.

Le principal but doit donc être de les édifier, & l'on ne peut nier que les allegories n'y foient utiles, lors inême qu'elles ne font pas certaines. Car elles mettent toujours une verité devant les yeux, & elles la mettent même d'une maniere qui arrête davantage l'efprit, parcequ'elles la font voir dans une image. L'efprit eft fi porté à confiderer les rapports des chofes, qu'il n'y conçoit jamais bien la verité, s'il ne la voit dans une figure. La verité eft en quelque forte comine un foleil, il le faut voir dans Leau ou dans un miroir qui tempere fes rayons, c'eft un éclair qui paffe trop vite, il le faut arrêter & fixer.

Si les allegories ne font pas certainement vraies, elles ne font pas auffi certainement fauffes ; & cette vraisemblance de la fauffe fuffit dans les difcours de morale, lorfqu'elle eft jointe avec la certitude entiere de l'objet representé.

Les allegories quoiqu'incertaines ont encore un avantage réel, c'eft qu'elles empêchent qu'on ne méprife quantité de chofes dans Ecriture qui paroiffent baffes.Car l'efprit eft arrêté par cette confideration qu'elles reprefentent peut-être de grandes chofes, & quand on lui fournit une explication probable, il eft encore plus porté à la retenue, puifqu'il ne

fair

fait pas table.

fi cette figure n'est point veri

XCI.

Ceux qui n'ont pas les défauts ont je në fai quoi qui en donne l'idée.

Il y a des Philofophes qui difent que les objets des fens n'ont pas les qualités fenfibles que nous leur attribuons, & que le feu par exemple n'eft pas chaud, parceque la chaleur eft une ef pece de fentiment dont il eft incapable; mais en même tems ils difent qu'il eft ¿chauffant, c'est-à-dire, qu'il a le porvoir de produire ce fentiment dans nos corps. Quelque indulgens que nous foyons à notre égard, nous ne faurions juftement refufer de reconnoître en nous quelque chofe de femblable; fi nous n'avons pas les défauts qu'on nous attribue, pous avons je ne fai quoi qui en donne idée aux autres.

XCIL

Bizarreries.

Il est dangereux de s'acquerir la repufation de bizarre, parcequ'il n'y a rien qui détruife tant la confiance qu'on pourroit avoir en nous, & qui nous falle plus regarder comme des gens avec qui il n'y a aucunes mefures à prendre: la raiTome VI

N

fon en eft, que le fondement de la confiance qu'on a en certaines gens, & qui les fait regarder comme fûrs, c'est qu'on les croit incapables de s'écarter de l'honnêteté & de la raifon. Or comme la bizarrerie confifte à s'écarter fans raifon des regles communes & à fe conduire par des caprices déraisonnables, elle donne une jufte défiance de ceux en qui on reconnoît ces fortes de procedés, parcequ'on ne fauroit plus fur quoi fe fondeṛ.

La raifon eft un maître commun qui tient unis tous ceux qui s'y foumettent, & qui reconnoiffent fa jurisdiction: mais quand on en a secoué le joug, on épouvante tous ceux que la railon nous tenoit unis. Chacun apprehende de devenir l'objet de notre bizarrerie.

La bizarrerie eft une éclypfe de raifon fans aucune caufe certaine & reglée. Ainfi comme on ne fait quand elle doit arriver, on la craint toujours.

La bizarrerie entiere & univerfelle, eft une folie achevée, la bizarrerie imparfaite eft une folie commencée.

La bizarrerie eft une domination de l'imagination fur l'efprit, qui fait qu'on fuit fes impreffions fans réflexion.

Il arrive de-là que les perfonnes bizarres ne le font pas à l'égard de tout le monde, parcequ'il y en a à qui leur ima

« AnteriorContinuar »