Imágenes de páginas
PDF
EPUB

Il eft vrai que ces fautes ne donnent pas par elles-mêmes la mort à l'ame, puifqu'on les fuppofe venielles, mais elles la défigurent, elles en terniffent l'éclat; elles l'affoibliffent en diminuant la charité interieure en quoi confifte fa beauté & fa force ; & en diminuant la force de l'ame, elles la disposent à des chutes plus dangereuses; elles rendent les prieres plus languiffantes & moins efficaces, les communions moins fructueufes, & fouvent même inutiles, & capables de rendre l'aine malade, au lieu de la fortifier. Enfin il ne faut pas confondre les fautes mêmes avec la negligence à les réparer. Car files fautes font venielles, la negligence à en faire pénitence ne left pas toujours. La pénitence est un précepte dont l'accompliffement eft une difpofition neceffaire pour avoir part au royaume de Dieu. Ceft un precepte que de porter fa croix, de mener une vie crucifiée, d'annoncer la mort du Seigneur en mourant fans ceffe au peché, puifque c'elt une difpofition neceflaire pour communier dignement, felon faint Bafile. C'est donc en un fens une neceffité de jeûner, comme faint Auguftin le recommande ici, c'est-à-dire, d'embraffer la mortification & la privation des plaifirs; c'est une neceffité de faire l'aumône.cor-

porelle & fpirituelle au prochain : c'est enfin une neceffité de prier avec componction pour obtenir de Dieu le pardon' de fes pechés.

XVIL

Cette priere de componction n'est pas feulement neceffaire en elle-même : mais il eft neceffaire de plus, comme, faint Augustin a eu foin de le marquer, qu'elle foit accompagnée de la condition à laquelle JESUS-CHRIST à proprement attaché la remiffion de nos pechés, qui eft que nous remettions fincerement aux. autres les offenfes qu'ils ont pu nous faire. Il fant donc que cette priere foir pare, c'eft-à-dire, fincere,& que le com s'ac corde avec les paroles en ne confervant pas-interieurement contre le prochain un venin, qui fubfifte aux yeux de Dien, dans le temps même que nous témoi-. gnons exterieurement que nous fui pardonnons. Car c'eft le cœur qui pardonne & non pas la langue; c'eft en quoi confifte fa pureté. Ceft la haine & l'aigrene qui le fouille; ainsi c'est la charitè & la douceur pour le prochain qui le purifie, & à laquelle Dien ne peut refufer le pardon de nos pechés, quand il la voit dans notre can,lorfque nous pardonnons finccrement & veritablement à nos freres

19

SECOND TRAITE.

DES DEVOIRS MUTUELS des inferieurs & des fuperieurs.

P

[ocr errors]

OUR nous acquitter de ce que nous devons aux hommes, il faut leur rendre ce qu'on leur doit, non seulement felon la juftice, mais auffi felon la charité, car la charité eft un devoir & une espece de juftice.

Ces devoirs font differens: il y en a d'invariables, parcequ'ils naiffent de quelque raifon qui eft toujours fubfiftante; & d'autres qui changent & fe diverfihent en plufieurs manieres, parcequ'ils naiffent des difpofitions particulieres des hommes, qui font changeantes.

[ocr errors]

Ceft un devoir invariable que celu de l'affection, nous la devons à nos ennemis, & à plus forte raifon à nos amis. Ceft encore un autre devoir indifpenfable que celui du refpect envers tous

ceux qu'on eft obligé de regarder au deffus de fot felon l'ordre de Dieu, parceque cet ordre eft une chofe fubfiftante, & qui ne dépend point des qualités perfonnelles.

Mais il faut bien examiner en quoi confifte ce refpect, parcequ'il y a un combat mutuel entre la concupifcence des inferieurs qui tend à le diminuer, & celle des fuperieurs qui tend à l'aug menter. L'Homme defire naturellement de n'être fujet à perfonne, & de dominer fur tout le monde. Par la premiere inclination il eft porté à refuser tout aux fuperieurs, & par la feconde à exiger tout des inferieurs.

L'une & l'autre inclination est éga lement vicieufe, & vient de la même racine d'orgueil, qui porte d'un côté à l'indépendance, & de l'autre à la tyrannie. Il n'eft point vrai que nous foyons fujets en tout à nos fuperieurs. Il n'eft point vrai que nous ne leut foyons foumis en rien. Il y a un milieu, & c'eft ce milieu que nous cher chons.

FIL

Il y a dans les Hommes un defir naaurel d'être crûs, d'être eftimés, & de n'être foupçonnés, ni accufés d'aucun

Béfaut ; & ainfi les perfonnes qui font en quelque rang, defireroient qu'on kur rendit cette forte de respect, & ils comptent pour rien tout le refte, sil neft accompagné d'une eftime inteneure & exterieure, afin que l'une empêche qu'on ne les condanne, même dans l'efprit, & l'autre qu'on ne leur dife ce qu'on trouve à redire dans leur conduité & dans leurs fentimens.

Il faut examiner fi cette pretention eft raisonnable ou en tout, ou en partie, & c'est ce qu'il femble que l'on pourra tirer des principes fuivans.

IV.

left certain qu'on peut faire diverfes fautes dans les jugemens que l'on fait de ceux qui font au deffus de nous, en confiderant même ces jugemens comme pu

rement interieurs.

Ces jugemens peuvent être faux & injeftes, quand on juge d'eux contre la verité,& qu'on les condanne injuftement &exceffivement. Et ces fortes de jugemens qui feroient blåmables à l'égard de qui que ce foit, le font encore plus, quand ils regardent des perfonnes à qui Ton doit de l'honeur & du refpect, parce que ce devoir nous doit rendre plus attentifs à ne les pas condanner injufte

ment

« AnteriorContinuar »