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Morimond

gogne frere audeffufdit comte en l'églife dudit Charlieu devant l'autel faint Martin.

Outre ces fepultures des comtes de Bourgogne, on en voit encore quelques unes des feigneurs de Chauvirey, dont nous prîmes les épitaphes que je rapporterai icy.

Ci-gift madame MARGUERITE fille à monfeigneur d'Oyfe-
laye, dame de Chavirey & de Soille, qui trefpaffa l'an M. CCXC.
Hic jacet GIRARDUS miles de Chauvirey dominus,
Eternis divitiis plenus, probitate quievit,

Quos vivens previt, moriens fibi conciliavit,
Pacem dilexit. Pax fit æterna fibi.

Cy gift damoifelle de Chauvirey dame du Chaftel dessous dudit lieu, veufve de feu GUILLAUME de Chaufour, écuyer, feigneur de Marault, qui deceda le 15 Juin м. CCCCXXXIII.

Cy gift dame MARGUERITE de Neufchateau, femme de Claude de Chauvirey, feigneur du Chastel-damont,qui trespassa le XXVIII. feptembre l'an M. CCCCLXXVIII.

Comme nous ne trouvâmes point de travail à Charlieu, Val-la- nous en partîmes l'apréfdîné pour aller à Val-la-douce, où douce. il y a un abbé regulier, & de-là à Morimond la quatrième fille de Cîteaux. L'accés de cette abbaye eft difficile à cause des bois & des chemins par lefquels il nous fallut paffer. La fituation nous parut affreufe; elle eft dans un fond environné de tous côtez de montagnes. Elle termine trois évêchez, celui de Langres, de Toul & de Bezançon. Elle est fur les confins de la France & de la Lorraine. L'églife pourtant eft fur les terres de France: c'est pourquoi on voit à la porte ces mots écrits en lettres Gotiques Vive le Roy notre fouverain Seigneur ; & au milieu de la fleche il y a une couronne de fleurs-de-lys. Mais la moitié du refectoire eft fur les terres de Lorraine. Cette abbaye fut fondée l'an 1115. le même jour & la même année que celle de Clairvaux, & elle ne cede le pas à celle.cy, qu'à caufe de fes grandes dépendances, & de S. Bernard qui en a été le premier abbé & la plus brillante lumiere de l'ordre. L'abbaye de Morimond ne laiffe pas d'avoir au moins une centaine d'abbayes de fa filiation, & elle eft mere de cinq ordres militaires, fçavoir, Calatrave, Alcantara, Montefe, l'Oyseau,

& Chrift. Elle a eu pour abbé le fameux Othon évêque de Frifingue, qui y mourut en revenant d'un chapitre general de Cîteaux, & y fut enterré prés du grand autel du côté de l'évangile, où il a encore un tombeau affez fimple. Les feigneurs de Choifeul & d'Aigremont, qui en font regardez comme les fondateurs, ont leur fepulture dans l'églife qui eft belle. Il y a trente ans que l'abbaye n'avoit rien de fplendide; mais monfieur l'abbé y a commencé un bâtiment magnifique, qui ne cedera à aucune maifon de l'ordre. Il fait fecher les étangs & couper les montagnes pour donner & l'agreable & le commode à fon monaftere. Le dortoire eft un des plus beaux que nous ayons vû. Il n'y manque qu'une bibliotheque. Il y a pourtant encore quelques manufcrits, & monfieur l'abbé, qui nous rendit maîtres de fon chartrier avec une honnêteté qui ne fe peut exprimer, nous en fit voir un tres curieux. Il contient un dialogue De ftatu profpero & adverfo ordinis Ciftercienfis contra falfas & fchifmaticas AntiCiftercienfium affertiones. L'abbé de Clairvaux y eft fort mal traité dans cet ouvrage, on l'y fait paffer pour un broüillon, qui n'ayant pû réüffir dans le deffein qu'il avoit de se faire élire abbé de Cîteaux, faifoit tout ce qu'il pouvoit pour caufer de la divifion dans l'ordre. Cet ouvrage eft fuivi d'un autre qui a pour titre : Speculum elevationis, exaltationis, depreffionis & enervationis ordinis Ciftercienfis. On voit enfuite plufieurs lettres écrites pour reformer l'ordre de Cîteaux, dont plufieurs font imprimées dans le Nomafticon Ciftercienfe. Il y a plus de cent ans que ce manufcrit fut apporté de Cîteaux à Morimond. Nous n'eumes pas affez de temps pour en tirer tout le profit qu'on auroit pû faire.

Belmont,

Aprés deux jours de fejour à Morimond, nous allâmes à l'abbaye de Belmont, où nous trouvâmes des religieuses, qui pour empêcher qu'on ne fit paffer leur maison à des mains étrangeres, s'étoient mifes en clôture, & avoient embraffé une petite reforme. Dieu fçait tirer fa gloire de la vexation, & il s'en fert affez fouvent pour nous faire rentrer dans notre devoir, lorfque des voyes plus douces ne nous y ramenent pas. De Belmont nous fumes à l'abbaye de Thuley qu'on rebâtit entierement. On y voit à l'entrée de Thuley. l'églife fous le portique plufieurs tombeaux, qu'on croit être ceux des fondateurs, & plufieurs autres de meffieurs de Ver. gi, qui font dedans l'église même, & qu'on eft perfuadé

Baife,

Dijon.

que

monfieur du Chefne aura mis dans fon hiftoire de la maison de Vergi. Le jour fuivant nous vînmes à l'abbaye de Baise bâtie dans un fond prés de la fource de la riviere de Baife. Cette fource a cela de particulier, qu'à l'endroit même où elle fort de terre, elle forme une riviere, & fait tourner un moulin, & à trente pas de là une forge. Les truites y fo ntadmirables.

Nous nous rendîmes à Dijon la furveille de l'affomption de la Vierge. La ville n'eft pas extrêmement grande; mais en récompenfe elle eft une des plus belles du royaume; & aprés Paris, nous en avons vû peu qui l'égale en beauté. Toutes les rues font grandes, larges & bien bâties, les places fpacieuses & embellies d'édifices fuperbes, les églifes magnifiques & tres bien decorées, les dehors admirables, &toutes les perfonnes honnêtes. La principale église eft celle S. Benigne de l'abbaye de faint Benigne. Elle eft grande, large, élevée & bien percée. Au milieu de la nef on voit le tombeau d'un roy de Pologne, qui quitta autrefois fes Etats, pour embraffer dans ce monaftere la profeffion de frere convers. Les chaires du chœur font d'un travail admirable, & quoyqu'elles foient d'un goût different de celui d'aujourd'hui, elles ont neanmoins je ne fçai quoy de grand, que les plus habi. les ouvriers viennent tous les jours copier. Le corps de faint Benigne eft au deffus de l'autel dans une fort belle châffe. Les faintes reliques font confervées à côté dans une armoire, où on gardoit autrefois le faint Sacrement dans un vase de pierre comme de l'albastre, élevé d'environ un demi pied, dont la coupe qui a un bord d'un doigt ou deux, a un pied de diametre, fon couvercle en a autant. Sur la fenêtre de l'armoire on lit ce vers: Hoftia falveto,noftræ fpes fanita faLutis.

De cette église on entre dans la Rotonde, c'est à dire, dans une églife à trois étages, faite en rond, foutenuë par une infinité de colonnes d'une pierre tres- précieuse, & ouverte par le haut, qui eft prefque l'unique endroit d'où elle tire du jour. Le fepulcre de faint Benigne eft dans l'étage d'en bas, tel que le dépeint Gregoire de Tours, autour duquel ont été enterrez fainte Leonille & fainte Pafchafie mar. tyres, faint Euftade & faint Tranquil les deux premiers abbez du monaftere, fainte Floride religieufe, faint Hilaire fenateur, & fainte Quitte sa femme, les pere & mere de S. Jean

de Reome; faint Jacob évêque de Toul, Bertillon abbé de
faint Benigne, & chorevêque de Langres, Alix de Mombard
mere de faint Bernard, Ifaac, Argrin & Bruno évêques de
Langres. Je crois que c'eft dans cette églife baffe que nous
vîmes fur un autel le baptême de faint Symphorien martyr
par faint Benigne, donné par immersion &
immerfion & par infufion tout
enfemble; de même que le Pere Mabillon dit qu'il a vû à
Rome le baptême de faint Romain par faint Laurent. Cette
figure eft fort inftructive pour fçavoir de quelle maniere se
donnoit anciennement le baptême, ou du moins dans le temps
qu'elle a été faite. Car on voit faint Symphorien tout nud
dans un vaiffeau jufqu'à la ceinture; fur le bord de ce vase un
linge, qui apparemment étoit mis pour couvrir fa nudité,
& à côté faint Benigne habillé de ses habits facerdotaux,
comme s'il alloit dire la meffe, qui tient une aiguiere dont
il verse de l'eau fur le Saint, & affifté d'un autre prêtre ha-
billé comme luy, & la tête rafée, avec un petit cer-
cle de cheveux, tel que le portent aujourd'hui la plupart
des religieux. Dans l'étage d'en haut de la Rotonde nous
remarquâmes un autel d'une pierre foutenue par une seule
colonne.

De la Rotonde on entre dans la chapelle de la Vierge, qu'on prétend avoir été la premiere église bâtie par faint Gregoire évêque de Langres. Comme l'église de faint Benigne eft l'églife matrice de Dijon, l'abbé eft le chef du clergé de la ville, & prefide à toutes les affemblées ecclefiaftiques, & dans le parlement il a rang parmi les confeil

lers.

Aprés l'abbaye de faint Benigne, les principales églifes font faint Etienne & la fainte Chapelle. Saint Etienne eft S. Etienne. une collegiale, qui étoit autrefois une abbaye de chanoines reguliers, qui fe feculariferent dans le fiecle paffé. Ils prétendent avoir le corps de faint Medard évêque de Noyon; mais la maniere qu'ils difent que la tranflation s'en est faite, reffent tant la fable, qu'il femble qu'on doive plûtôt en croire les religieux de l'abbaye de faint Medard de Soiffons, qui croyent le poffeder encore, & qui ont fon tombeau.

Pour ce qui eft de la fainte Chapelle,c'eft une Collegiale de La fainte vingt-quatre Chanoines, fondée par les Ducs de Bourgogne, Chapelle, qui est immédiate au faint Siege: L'église est fort belle & fort

délicate. On y voit affez près de l'autel, le fépulcre du maréchal de Tavane. Mais ce qui rend cette église plus vénérable, c'est la fainte Hoftie, qui ayant été percée de coups de canif par un Juif enragé, rendit du fang dans tous les endroits où elle avoit été frappée. Eugene quatrième pour reconnoître les fervices que Philippe le Bon, Duc de Bourgogne avoit rendu au faint Siege, la tira de fon trefor de Rome, & l'envoya à ce Prince, qui la reçut à l'Ifle en Flandre, où on fait encore aujourd'hui une fête folemnelle de cette reception, & de-là l'envoya à la fainte-Chapelle de Dijon, où elle a été confervée & révérée depuis ce temps-là. On l'expofe tous les ans durant l'octave du faint Sacrement; & tous les jours durant cette octave, le matin avant que de l'expofer, & le foir en la refferrant, on permet à tous ceux qui font prefens de la regarder de près: mais hors de ce tempslà, on ne la montre à perfonne; cependant Monfieur le Doyen eut la bonté de nous procurer la confolation de la voir tout à nôtre aise, & l'ayant bien confiderée, nous remarquâmes en effet que les endroits qui avoient été piquez, étoient encore un peu roux. On nous fit voir auffi l'original des lettres que Eugene IV. écrivit au Duc de Bourgogne lorfqu'il lui en fit prefent, & celles que le Roi de France Louis XII. écrivit au Chapitre, lorfqu'enfuite d'une guerison miraculeuse, il lui envoya la couronne d'or qu'il avoit portée fur fa tête toute la journée de fon facre, pour la mettre fur la fainte Hoftie Le foleil où on l'expofe eft d'or, enrichi de pierres précieuses & tres-bien travaillé : c'eft un prefent d'Ifabel, femme de Jean Duc de Bourgogne. Le coffre dans lequel on la conferve dans. la facriftie, eft auffi d'or, long d'environ un pied & demi, large d'un bon demi pied, & élevé pour le moins autant. Il eft tres bien travaillé, & orné de plufieurs agathes. C'est un prefent du Duc d'Epernon. Auparavant on la mettoit dans un autre coffre plus petit, de vermeil dorë, émaillé fi délicatement, qu'on ne fe peut laffer de le voir.

Entre les églifes des paroiffes de Dijon, celles de NôtreDame, de faint Michel & de faint Jean, meritent quelque attention. Celle de Nôtre Dame eft remarquable par fa délicateffe, qui eft telle, que les murailles, vers les fenêtres, n'ont pas un pied d'épaiffeur. Celle de faint Michel fe diftingue par fon portail, dont le travail eft d'une délicateffe &. d'une magnificence qui le fait admirer. Celle de faint Jeana.

cela

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