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cere de ce manufcrit eft de mil ans; mais l'ouvrage eft du temps de faint Gregoire, comme il paroît par ces mots du titre: Et noftri temporis Gregorio. Nous y vîmes auffi une explication du livre de Job divifée en cinq livres, qui a bien neuf cens ans d'écriture; Caffiodore fur les pfeaumes; quelques ouvrages de Bede & d'Alcuin; un traité de Remy moine d'Auxerre, fur le cantique des cantiques qui n'a point été encore imprimé. Enfin, des actes des martyrs & une vie de faint Germain évêque d'Auxerre, à la tête de laquelle on lit ces vers:

Signat magnificos tomus hic pro parte triumphos,
Magni Germani genefim, miracula, mores,
Qualiter à tenero pueritia floruit ungui,
Aufpiciis quanto Sophie compluta fluento,
Fafces patricios, infignia nobilitatis,
Clarum conjugii rebufque & germine nomen,
Poft habitum tandem conftanti pectore mundum,
Ordinis ut facri metas & pontificatus
Sumferit infignem meritis & nomine dotem,
Indictafque cruces carni, jejunia longa,
Noctes infomnes, & duri firamina lećti,
Longaque quadrifidum documenta afperfa per orbem,
Clara & apoftolicis miracula digna tropæis,
Exceffum ad fuperos & facri jura fepulcri.

On lit encore ces mots écrits en lettres majufcules à la

fin de cette vie:

Vir apoftolicæ recordationis dominus Germanus epifcopus pridie calendas auguftas de hoc corpore deceffit, & migravit ad Dominum. Quem venerabilem diem omnes ecclefiæ, præcipue in provin ciis Gallicanis prædicabili devotione concelebrant, excolunt, venenerantur, ut fuffragiis illius mifericordiam Domini confequi me

reantur.

Cet endroit est remarquable, pour prouver combien le culte de faint Germain étoit étendu dans l'églife, fur tout en celle des Gaules. Je ne parle pas d'un autre livre qui a pour titre : Lectura compilata per bonæ memoriæ magiftrum Thomam de Courcellis regentem in facultate theologia.... fuper prima ad Corinthios, ny d'un autre ouvrage dont l'auteur eft Egidius

de Fofcuriis civis Bononienfis decretorum doctor, parce que ces ouvrages n'ont pas plus de 400. ans.

De la bibliotheque nous defcendîmes dans la facristie, où il y a des tableaux d'un tres-grand prix. Nous en vîmes fur tout un où le mariage de la Vierge & de faint Jofeph est reprefenté. C'est un prefent que la republique de Florence fit à Jacques Hurauld évêque d'Autun, au bas duquel on lit ces mots Jacobo Huraldo, Heduorum epifcopo, Ludovici XII. Francorum regis legato fidissimo, Senatus populufque Florentinus dono dedit anno M. DXII. Pour le trefor de la cathedrale, il n'eft pas fort confiderable; la principale relique eft le corps de faint Raco évêque d'Autun, qui a été découvert il y a peu d'années derriere l'autel de l'églife de faint Nazaire. Nous y vîmes auffi une petite croix qui contenoit une partie de celle à laquelle Notre Seigneur fut attaché, envoyée par notre faint Pere Clement XI, à monfieur l'évêque d'Autun en reconnoiffance d'une autre relique d'un Saint qui est dans fon diocefe, & qui eft invoqué pour les goutes. On nous montra de plus une petite boëte d'yvoire haute de trois doigts, & à peu prés de même largeur, dans laquelle on gardoit autrefois le faint Sacrement, & une croix du bois de fainte Lucie, dont le travail eft admirable.

L'église de faint Lazare, qu'on nomme communément faint Ladre, eft ancienne & fort belle. On y remarque un ordre d'architecture qui reffent affez le goût que les Romains avoient introduit à Autun pour les bâtimens. Je crois que c'est l'église de fainte Croix, qui fut bâtie du temps de l'évêque Jonas, qui prit le nom de faint Lazare, aprés qu'on y eut apporté les reliques de ce Saint, & qu'on eut representé à la porte la refurrection de Lazare. On voit derrière l'autel un tombeau de Lazare, fait en forme d'église par un moi. ne nommé Martin, du temps de l'évêque Etienne. La cathedrale étoit autrefois dans l'églife de faint Nazaire, qui eft tout proche, ayant été détruite, les chanoines en attendant qu'elle fût rebâtie, s'emparerent de l'églife de faint Lazare, & transfererent la cure qui y étoit, en l'églite fouterraine de faint Nazaire dédiée à faint Jean. L'on en commença l'édi fice avec beaucoup de fplendeur: le duc de Bourgogne y contribua de fa part d'une fomme de 1200 livres, & les Papes donnerent des indulgences à ceux qui le favoriferoient de leurs aumônes. Mais le vaiffeau qui avoit été commencé

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étoit fi magnifique, qu'on n'a jamais pû achever que le chœur, qui eft un des plus beaux qui foit en France. Si la nef avoit été faite, elle auroit rendu dans l'églife de faint Ladre, & on feroit entré d'une églife dans l'autre, ce qui auroit fait une des belles chofes qu'on puiffe voir en ce genre. On voit derriere l'autel de l'églife de S. Nazaire la chaire épifcopale, qui est de marbre. C'est dans cette églife que l'évêque prend poffeffion de fa cathedrale, qu'il benit les faintes huiles le Jeudy faint, qu'il fait prêcher l'Avent & le Carême, & tous les jours un chanoine y dit la meffe. Nous vîmes dans l'églife de faint Ladre le martyrologe qu'on lit dans le choeur aprés prime; la regle qui fut dreffée pour les chanoines au concile d'Aix la Chapelle, eft à la fin de ce martyrologe; on en lit encore tous les jours quelque chofe aprés le martyrologe; autrefois on en lifoit un chapitre entier.

Aprés avoir parlé de la cathedrale d'Autun, il nous faut dire quelque chofe des trois abbayes que la reine Brunehaut y bâtit. Saint Martin étoit fans contredit la plus illustre. Je crois qu'elle eft conftruite dans le même lieu où faint Martin évêque de Tours avoit détruit un temple d'idole. Ce qui refte de ses anciens monumens se reffent beaucoup de la ma. gnificence d'une puiffante reine, telle qu'étoit Brunehaut. L'église est toute bâtie de groffes pierres de taille liées ensemble, non avec de la chaux ou du ciment, mais comme je crois avec des crampons de fer, qui ne paroiffent pas Tous les piliers font autant de colonnes d'un tres beau marbre avec leurs chapiteaux d'une hauteur extraordinaire. L'arcade qui termine le chœur vers le grand autel portée fur deux colonnes, paffe pour un chef-d'œuvre dans l'efprit des experts. L'autel eft tout de marbre, & dans le retable eft reprefenté NotreSeigneur reconnu par les deux difciples d'Emmaüs dans la fraction du pain. La reine Brunehaut fut inhumée dans la cha pelle fouterraine de Notre Dame, où elle avoit cette épitaphe:

Brunechil fut jadis reine de France,
Fondatreffe du faint lieu de ceans.
Cy inhumée l'an fix cens quatorze ans
En attendant de Dieu vraye indulgence.

Comme cette chapelle menaçoit de ruine, le cardinal Ro

lin abbé du monaftere fit transferer le tombeau dans l'églife proche de la facriftie fous une arcade de pierre de taille. Il eft d'un fort marbre gris en forme d'une auge, couvert d'un gros marbre noir marqueté de blanc; long de fix pieds, larde deux pieds, & haut d'un pied trois pouces, élevé fur quatre piliers de marbre avec cette épitaphe:

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A quoy l'on a ajouté cette anagramme avec les vers fuivans:
Brunechilde reine de France

ANAGRAMME.
Benite fleur d'innocence rare
N'écoutez donc pas ces efprits,
Qui traitent cette bonne reine
D'ambitieufe, d'inhumaine,
Et d'autres termes de mépris.
On ne doit condamner fa vie.
Ny fur un tres lugubre fort,
Croyez qu'elle est pour affurance
Une fleur benite en fa mort,
Mais fleur d'une rare innocence.

L'an 1632. Nicolas de Caftille, qui étoit abbé de faint Martin, fit ouvrir ce tombeau, dans lequel on trouva un coffre de plomb où il y avoit des cendres, des offemens, du charbon, & une molette d'éperon, on les y remit & on le referma. Il y a encore dans l'églife plufieurs tombeaux d'abbez, parmi lefquels celui de Jean Petit le dernier regulier eft à remar quer. Car il y eft reprefenté tout nud, la mitre hors de la tête. On dit que c'eft parce qu'on le dépouilla de fon abbaye, pour la donner au cardinal Rolin, quoiqu'il fût homme de

bien, & qu'il gouvernât fon monaftere avec édification. L'abbaye de faint Andoche fut bâtie pour des religieufes Benedictines dans le même lieu où les infideles honoroient la déeffe Minerve. On y voit les reftes du temple qui lui étoit confacré. Il est élevé & bâti en quarré de petites pierres dures. Les religieufes en font aujourd'hui leur cuifine. Tout proche de ce temple, on voit une cave affreufe dont les voûtes & les piliers femblent avoir le caractere d'antiquité. On prétend que c'est la prison dans laquelle ont été renfermez tant de martyrs, qu'on tenoit proche du temple, afin que s'ils venoient à renoncer la foy, ils fuffent tout portez pour offrir des facrifices profanes. On montre une petite fenêtre par laquelle on croit qu'on leur portoit à manger, & une autre par la quelle on leur parloit. On conferve dans cette abbaye, les corps de faint Siagre, de faint Simplice & de faint Caffien évêques d'Autun,du refte il n'y a aucune antiquité que les burettes de faint Andoche, qui font, ce me femble, de bronze & bien travaillées, & ont tout le caractere d'antiquité. En voicy la figure.

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