SOTANCOUR. Dans ce jour Nous ne ferons plus qu'un, vous & moy Sotancour. LISETTE. Ah! la belle union ! SOTANCOUR. Moy bien fait, vous gentille, Nous allons mettre au monde une belle famille. cris, On a beau faire, il faut prendre femme à Paris ; L'on y taille en plein drap. Nos femmes de Province L'air attractif, fur-tout la croupe rebondie; MATHIEU CROCHET. On dit qu'à forligner il a propenfion. SOTANCOUR. Je veux croire pourtant, malgré la deftinée, Hem vous ne dites mot. LISETTE. Qui ne dit mot, confent. Beau-pere, jufqu'icy, s'il faut que je le dife, Tant mieux pour une femme. C SOTANCOUR. 3 Ouy, quand par retenue Elle caquette peu: mais fi c'eft une grue... Dans la famille au moins on ne voit point de fots. Luy, par exemple, il a plus d'efprit qu'il n'eft gros. MATHIEU CROCHET. Le Coufin me connoift; oh! je ne fuis pas cruche, Tel que vous me voyez. SOTANCOUR. Luy... c'est la coqueluche Des filles de Falaife: Il étudie en Droit, Et fçait tout fon Cujas fur le bout de fon doigt. Oh! quand on a du Code acquis quelque teinture Vous etes Avocat' ? MATHIEU CROCHET. Et de plus, Maître és Arts. Tres alteré, beau pere, au moins ne vous déplaise. Mr. GERONTE. Allons, c'eft fort bien dit. SOTANCOUR. Je me fens là-dedans un terrible appetit. MATHIEU CROCHET. Depuis trois jours je jeûne, afin d'eftre capable LISETTE. Monfieur eft prevoyant. SOTANCOUR. Vrayment c'eft fort bien fait; Allons, fuivez-moy donc, Coufin Mathieu Crochet. Bien-tot nous reviendrons, ô Beauté mon idole, Voir fi vous n'avez point rétrouvé la parole. SCENE VIII. LEONORE, LISETTE regardant partir Mathieu Crochet. LISETTE. Voila ce qui s'appelle un garçon fait au tour! LEONORE. Lifette, que dis-tu de Monfieur Sotancour ? Et de Mathieu Crochet, qu'en dites-vous Madame De Monfieur Sotancour je deviendrois la femme? A ne t'en point mentir, je fuis au defefpoir. LISETTE. Oh! qu'il ne vous tient pas encor en fon pouvoir ? SCENE IX, MERLIN en Maiftre de Mufique, avee des porteurs d'Inftrumens, dans l'un def. quels et Valere: Il entre en chantant» AIR. Pour attraper un Roffignol, Je difois un jour à Nanette Il faut aller au bois; mais chut y C Je me trouvay dans fa cachette, Et fi toft qu'il fut fur la branche', Elle le prit de fa main blanche, LISETTE. Que cherchez-vous, Monfieur, avec cet équipage?; MERLIN. Vous voyez un Breton preft à vous rendre hommage. Depuis plus de vingt ans je rode l'Univers Ou je fais admirer l'effet de mes Concerts. LISETTE. Tant mieux pour vous, Monfieur, j'en ay l'ame ravie, Mais nous ne fommes point en goût de fimphonie ; Laiffez-nous, s'il vous plaift, avec tous nos ennuis. MERLIN. Quand vous me connoîtrez... vous fçauray qui je fuis. Je le croy bien. LISETTE. MERLIN. Je fais un Muficien rare Charmé de mon fçavoir, gueux, yvrogne & bizare. LISETTE. Pour la profeffion voila de grands talens. MER LIN. Voudriez-vous m'entendre ?: LEONORE. Oh, je n'ay pas le temps. De chagrins trop cuifans j'ay l'ame penetrée. MERLIN. Tant mieux, je vous voudrois encor defefperée. 1 LISETTE. Elle n'en eft pas loin. MERLIN. C'est comme je la veux, Pour donner à mon Art un exercice heureux. LEONORE. Pour des Bretons, Monfieur gardez votre fcience. MERLIN. J'ay tout ce qu'il vous faut, autant qu'homme de France. Tout Breton que je fuis, je fçay votre befoin. LISETTE. Ne le renvoyons pas, puifqu'il vient de fi loin. Dans un concert d'hymen, lorfque quelqu'un difcorde, Oh vous aurez grand' peine, avec votre industrie, MERLIN. J'ay dans cet étuy-là, Madame, un inftrument LISETTE. Ne peut-on point l'entendre? LEONORE. Ah! laiffe-moy, Lifette, en proye à mon malheur. LISETTE. Madame, un air ou deux calment bien la douleur. Ecoutez-le, de grace, un feul moment fans peine |