SCENE XII. LE BARON D'AUBIGNAC, LISETTE, SOTANCOUR. A LE BARON Gafcon. H! Monfieur, je vous cherche; eh permettez de grace, Que fans plus differer icy je vous embrasse. SOTANCOUR. Pour la premiere fois l'accueil eft fraternel. N'est-ce pas vous, Monfieur, qui vous nommez un tel. SOTANCOUR. Ouy, je me nomme un tel, mais j'ay ne vous déplaise, Encore un autre nom. LE BARON. Je viens vous montrer l'aife Que j'ay d'avoir appris que vous vous mariez. SOTANCOUR. Je ne merite pas, Monfieur, tant d'amitiez. LE BARON. Nul ne prend plus que moy de part à cette affaire. Er pourquoy, plaire? s'il vous plaift, peut-elle tant vous LE BAR ON. Pourquoy! cette demande eft bonne! maintenant Que vous allez rouler deffus l'argent comptant, Vous ne ferez, je croy, loyal comme vous eftes, Nulle difficulté de bien payer vos dettes, SOTANCOUR. Graces au Ciel, Monfieur, je ne dois nul argent, Cinq cens Louis pour vous, c'est une bagatelle, SOTANCOUR. La demande eft nouvelle. Sotancour eft mon nom, me connoiffez-vous bien ? LE BARON. Sotancour... juftement, c'eft pour vous que je vien. SOTANCOUR. Je vous dois quelque chofe? LE BARON. Hé donc, le tout eft drofle, C'est cet argent, Monfieur, que fur votre parole, Je vous ay tres-gagné l'autre hyver à trois dez, SOTANCOUR. A moy, Monfieur. LE BARON. A vous ? SOTANCOUR. Et parbleu vous révez, Pour connoître vos gens mettez mieux vos lunettes. Comment, chetif mortel, vous déniez vos dettes, SOTANCOUR. Quand elle le feroit encor plus que le Nil, Votre propos, Monfieur, civil, n'eft ny beau ny Je ne vous connois point, ny ne veux vous connoître. LE BARON. Il ne me connoift pas, le fcelerat, le traitre Ne vous fouvient-il plus de cet Hyver dernier, Pas plus qu'auparavant, je ne fçay ce que c'eft. LISETTE l'arreftant. Ah tout beau, dans ce lieu point de bruit, je vous prie, Monfieur eft honnefte homme, & qui vous payra bien, Moy payer: hé pourquoy, fi je ne luy dois rien? Vous ne me devez rien? LISETTE. Un Gafcon n'eft pas homme A venir fans fujet demander une fomme. SO TANCOUR. Un Galcon. Un Gafcon a grand befoin d'argent, Et quoy qu'il mange peu, fi faut-il bien qu'il mange. Donnez-luy feulement deux ou trois cens écus. SOTANCOUR. J'aimerois mieux cent fois yous yoir tous deux pendus. LE BARON l'épée à la main. C'eft trop contre un faquin retenir ma colere. LISETTE, Hé de grace Monfieur!" LE BARON. Que je le perce à jour. Non, non, laiffez-moy faire Pour quel fujet, Meffieurs, criez-vous donc fi fort? LE BARON. Un atome Bourgeois, qui perd fur la parole, GERONTE. Que veut dire cela? SOTANCOUR. Un Gafcon affamé qui cherche à vous furprendre. LE BARON le voulant percer. Retirez-vous, Monfieur. GERONT E. Ah tout beau, c'est mon gendre. LE BARON. Cet homme eft votre gendre? GERONT E. Il le fera dans peu. LE BARON. Tant mieux, vous me payerez ce qu'il me doit au jeu. Je fais arreft fur vous, fur la fille & la dote. GERONTE. Quoy vous avez perdu? Je ne fçay... SOTANCOUR. Je vous dis qu'il radote. LE BARON. Nuit & jour il hante les brelans, Il doit encor au jeu plus de vingt mille francs. GERONT E. Plus de vingt mille francs? LE BARON. Ouy Monfieur. Je vous jure SOTANCOUR. Foy de vray bas Normand, que c'eft une impofture; Vous me gâtez icy bien du temps en paroles; GERONT E. Si mon gendre vous doit.... LE BARON. GERONTE. S'il me doit ! Je pretens Que vous foyez payé, mais fans plus de colere, LE BARON. C'est parler comme il faut ; quand on eft raisonnable, |