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VALERE.

Cette éponge entre nous ne vaudroit pas ce soin.
HECTOR.

C'est dans fon caractere une efpece parfaite,
Un ambigu nouveau de prude & de coquette,
Qui croit mettre les cœurs à contribution,
Et qui veut époufer, c'eft-là fa paffion.

Epoufer:

VALERE.

HECTOR.

Un marquis de même caractere, Grand époufeur auffi, la galope & la faire.

VALERE.

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C'eft, à vous parler net, Un Marquis de hafard fait par le lanfquenet: Fort brave, à ce qu'il dit; intriguant, plein d'affaires, Qui croit de fes appas les femmes tributaires, Qui gagne au jeu beaucoup, & qui, dit-on, jadis Etoit valet de Chambre avant d'être Marquis.

Mais fauvons-nous, Monfieur, j'apperçois votre pere.

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GERONTE.

HECTOR.

Doucement, j'ay deux mots à vous dire, Va

lere.

Pour toi, j'ay quelques coups de canne à te prêter,

HECTOR.

Excufez-moy, Monfieur, je ne puis m'arrêter,

GERONTE.

Demeure là, maraut.

HECTOR.

Il n'eft pas temps de rire.

GERONTE.

Pour la derniere fois, mon fils, je viens vous dire
Que votre train de vie eft fi fort scandaleux,
Que vous m'obligerez à quelque éclat fâcheux;
Je ne puis retenir ma bile davantage,
Et ne fçaurois fouffrir votre libertinage.
Vous êtes pilier né de tous les lanfquenets,
Qui font pour la jeunesse autant de trébuchets ;
Un bois plein de voleurs eft un plus feur paffage:
Dans ces lieux jour & nuit ce n'est que brigandage,
Il faut opter des deux, être dupe, ou fripon.

HECTOR.

Tous ces jeux de hafard n'attirent rien de bon.
J'aime les jeux galans où l'efprit fe deploye.
C eft, Monfieur, par exemple, un joli jeu que l'Oye.
GERONTE.

Tai-toi. Non, à prefent le jeu n'eft que fureur:
On joue argent, bijoux, maifon, contracts, hon-

neur

Et c'eft ce qu'une femme en cette humeur à crain

dre,

Rifque plus volontiers, & perd plus fans fe plain

dre.

HECTOR.

Oh, nous ne rifquons pas, Monfieur, de tels bijoux.
GERONTE..

Votre conduite enfin m'enflâme de courroux,
Je ne puis vous fouffrir vivre de cette forte :
Vous m'avez obligé de vous fermer ma porte,
J'étois las, attendant chez moy votre retour,
Qu'on fift du jour la nuit, & de la nuit au jour,
HECTOR.

C'est bien fait. Ces Joueurs qui courent la fortu

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Dans leurs déréglemens reffemblent à la Lune,
Se couchant le matin & fe levant le foir.

GERONT E.

Vous me pouffez à bout, mais je vous feray voir,
Que fi vous ne changez de vie & de maniere,
Je fçaurai me fervir de mon pouvoir de Pere,
Et que de mon courroux vous fentirez l'effet.

HECTOR.

Votre Pere a raison.

GERONT E.

Comme le voila fait !

Débraillé, mal peigné, l'œil hagard! A fa mine On croiroit qu'il viendroit dans la forest voisine De faire un mauvais coup.

HECTOR.

On croiroit vray de luy, Il a fait trente fois coupegorge aujourd'huy.

GERONTE.

Serez-vous bien-tôt las d'une telle conduite ?
Parlez, que dois-je enfin efperer dans la fuite?
VALERE.

Je reviens aujourd'huy de mon égarement,
Et ne veux plus jouer, mon Pere, absolument.

HECTOR.

Voila du fruit nouveau dont fon fils le regale.
GERONTE.

Quand ils n'ont pas un fou, voila de leur morale.

VALERE.

J'ay de l'argent encore; & pour vous contenter, De mes dettes je veux aujourd'huy m'acquitter.

GERONTE.

S'il eft ainfi, vrayment j'en ay bien de la joye.
HECTOR bas.

Vous acquitter, Monfieur ? avec quelle monnoye?

VALERE.

Te tairas-tu? Mon Oncle afpire dans ce jour
A m'ôter d'Angelique & la main & l'amour ;
Vous fçavez que pour elle il a l'ame blessée,

E

Et qu'il veut m'enlever...

GERONTE.

Ouy, je fçay fa pensée,

Et je feray ravy de le voir confondu.

HECTOR.

Vous n'avez qu'à parler, c'est un homme tondu.

GERONT E.

Je voudrois bien déja que l'affaire fût faite.
Angelique eft fort riche, & point du tout coquette,
Maîtreffe de fon choix: avec ce bon deffein,
Va te mettre en état de meriter sa main,

Payer tes Creanciers...

Hé? plaît-il ?

VALERE.

J'y vais, j'y cours.....Mon Pere..... GERONTE.

VALERE,

Pour fortir entierement d'affaire,

Il me manque environ quatre ou cinq mille francs. Si vous vouliez, Monfieur...

GERONTE.

Vous m'avez mille fois bercé de ces fornettes.

Ah, ah! je vous entens.

payer vos dettes.

Non, comme vous pourrez, allez

VALERE.

Mais, mon Fere, croyez...

GERONTE.

A d'autres, s'il vous plaît,

VALERE.

Prêtez-moy mille écus.

Au denier un.

HECTOR.

Nous payerons l'interêt

VALERE,

Monfieur...

GERONTE.

Je ne puis vous entendre.

VALERE.

Je ne veux point, mon Pere, aujourd'huy vous furprendre ;

Et pour vous faire voir quels font mes bons deffeins, Retenez cet argent, & payez par vos mains.

HECTOR.

Ah parbleu, pour le coup, c'eft être raisonnable.

GERONTE.

Et de combien encore êtes-vous redevable?

V ALERE.

La fomme n'y fait rien.

GERONTE.

La fomme n'y fait rien?
HECTOR.

Non; quand vous le verrez vivre en homme de bien,
Vous ne regretterez nullement la dépenfe,

Et nous ferons, Monfieur, la chole en confcience.
GERONTE.

Ecoutez, je veux bien faire un dernier effort:

Mais aprés cela, fi.....

VALERE.

Moderez ce transport.
Que fur mes fentimens votre ame fe repose.
Je vais voir Angelique, & mon cœur se propose
D'arrêter fon couroux déja prêt d'éclater.

HECTOR.

il fort.

Je m'en vais travailler, moy, pour vous contenter, A vous faire, en raifons claires & pofitives,

Le memoire fuccint de nos dettes paffives,

Et que j'auray l'honneur de vous montrer dans Il fort.

peu.

GERONTE feul.

Mon frere en fon amour n'aura pas trop beau jeu.
Non, quand ce ne feroit que pour le contredire,
Je veux rompre l'hymen où fon amour aspire,
Et j'auray deux plaifirs à la fois, fi je puis,
De chagriner mon frere, & marier mon fils.

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