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ÉVÉNEMENS REMARQUABLES fous LOUIS XV.

articles 21 & 22, qu'aucune autre puiffance, que celles qui font de la maifon de Bourbon, ne pourra être invitée ni admise à accedér à ce pacte de famille. Les autres articles aboliffent le droit d'aubaine dans les états des princess contractans, en faveur de leurs fujets refpectifs; déclarent qu'ils auront, dans tous les états de la maifon de Bourbon, les mêmes prérogatives dont jouiffent les nationaux, & les mêmes avantages réciproques pour le commerce, & reglent le cérémonial que les miniftres de France & d'Espagne devront obferver entre eux, au fujet de la pré féance dans les cours où ils réfideront.

Les conditions & les claufes de ce traité étoient absolument étrangeres à l'objet & aux événemens de la guerre entre la France & la Grande-Bretagne; la garantie même des états françois ne s'y trouvon fpécifiée que pour l'étendue qu'ils auroient lors de la conclufion de la paix entre les deux puiffances. La France offroit de faire à l'Angleterre des ceffions confidérables en Amérique; le miniftere britannique tergiverfoit. Cette conduite fit impreffion à la cour de Madrid; on comprit clairement que l'entreprenante Angleterre, après avoir achevé de ruiner la marine françoife, & de conquérir le peu de jooffeffions que les François confervoient encore en Amérique, ne chercheroit enfuite qu'un prétexte pour attaquer villon efpagnol, afin d'être feule maîtreffe de laq gation & du commerce en Amérique. Dans ces circonftances, le roi de la Grande-Bretagne ayant ordonne au lord Bristol de demander au miniftere efpagnol fi Ira étoit dans le deffein de s'unir à la France, d'exigerec réponse prompte & catégorique, & de déclarer quil prendrois le refus de répondre à fa demande pour toune

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aggreffion & une déclaration hoftile, le roi d'Efpagne fit répondre à l'ambaffadeur anglois que l'aggreffion & déclaration de guerre avoient été faites à Londres dès le moment qu'on y avoit réfolu de lui faire une demande auffi peu mefurée. Les négociations furent rompues entre la France & l'Angleterre. Sir Stanley eut des paffe-ports pour retourner à Londres à la fin de septembre, & M. de Buffi eut ordre de revenir en France.

Le duc de Bourgogne meurt, à Versailles, le 22 février, fur les trois heures du matin.

Le 6 juin, le paffage de Vénus fous le difque du foleil eft obfervé avec beaucoup de foin, à l'obfervatoire de Paris. D'habiles aftronomes furent chargés, par le roi, de faire les mêmes obfervations dans différens pays éloignés.

Le parlement de Paris enregiftre, le 19 juin, un édit portant création de deux cents mille livres de rentes viageres fur l'ordre de Saint-Efprit, au principal de deux millions prêtés au roi par l'ordre. Le roi fait enregistrer dans un lit de juftice tenu le 21 juillet, un édit portant création de neuf cents mille livres de rentes héréditaires. fur les cuirs, à trois pour cent, & une déclaration portant prorogation, pour deux ans, de l'édit du mois de février 1760, qui ordonnoit le paiement du troifieme vingtieme, du doublement de la capitation pour les nontaillables, & du triplement pour les financiers..

Le roi remet les fceaux, le 13 octobre, à M. Berrier, fecrétaire d'état de la marine; réunit le département de la marine à celui de la guerre, qu'avoit le duc de Choifeul, & remet celui des affaires étrangeres au comte de Choifeul Pralin, auparavant ambassadeur à Vienne, & qui avoit pris féance au confeil, en qualité de miniftre, le 19 août.

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Ordonnance de police pour la ville de Paris, dans laquelle il eft ordonné que toutes les enfeignes & étalages des marchands en boutique, qui excéderont les bâtimens dans les rues, feront ôtés, ou du moins appliqués contre les murs, pour la fûreté des paffans & l'embelliffement des rues qu'ils offusquoient.

1762.

Les querelles des rois, comme celle des particuliers, perdent, à la longue, une partie de l'intérêt qu'elles infpiroient d'abord; &, quelle que foit l'iffue d'une guerre, lorfqu'elle dure long-temps, on n'y voit plus que les calamités publiques qui en font la fuite inévitable. Depuis les fept années que les hoftilités s'étoient communiquées de proche en proche aux quatre parties du globe, aucune ne produifit des événemens auffi variés que 1762; cependant on parut prefque oublier, en France, les fiéges & les batailles, pour ne s'occuper que des Jéfuites, & du procès qui produifit leur extinction.

Le pere de la Valette, fupérieur des Jéfuites de la Martinique, s'étant affocié des correfpondans dans les principales villes de l'Europe, & en particulier le jéfuite Sacy, procureur-général des miffions, demeurant à la maison profeffe de Paris, faifoit un commerce, lequel, par fon étendue, & les facilités qui en réfultoient, faifoit tort à celui des particuliers, trop peu riches pour en foutenir la concurrence. Sur les plaintes adreffées au miniftere, par les habitans des ifles du vent, en 1753, ce jéfuite négociant fut rappellé. Ses confreres obtinrent fa reinté

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gration dans fon pofte, après avoir donné fa promeffe, par écrit, de ne fe mêler déformais d'aucune opération de négoce. Il ne tint pas fa parole; fes fupérieurs le nommerent préfet apoftolique à la Martinique, &, avec cette qualité, il alla y continuer fes fpéculations mercantiles. Elles furent dérangées par les Anglois, lefquels, pendant les années qui précéderent la guerre, s'emparerent de quelques vaiffeaux fur lefquels les Jéfuites avoient des fonds. La Valette & Sacy firent une banqueroute plus confidérable que la fomme qu'ils avoient perdue; car les effets dont les Anglois s'étoient emparés fur les Jéfuites, ne furent vendus que douze cents mille livres de notre monnoie, & la banqueroute des Jéfuites fut d'environ trois millions.

Deux négocians de Marfeille, Lioncy & Jouffre, perdirent, dans cette faillite, quinze cents mille livres. Le pere Sacy, procureur-général des miffions, eut ordre, du général, de leur offrir cinq cents mille livres pour les appaifer, mais cette fomme ne leur fut pas donnée; le jéfuite Sacy fe fervit de cet argent pour fatisfaire quelques créanciers de Paris, dont les cris lui paroiffoient plus dangereux que ceux qui fe faifoient entendre de plus loin. Les deux Marseillois fe pourvurent devant la jurifdiction confulaire de leur ville. La Valette & Sacy y furent condamnés folidairement, le 19 novembre 1759. Les négocians obtinrent enfuite, par fentence du 19 mai 1760, que la premiere fentence fût exécutée contre toutes les maifons de Jéfuites établies en France. Les Jéfuites fe pourvurent, contre cette fentence, au parlement de Paris, & cette démarche leur devint funeste, en donnant à cette affaire une célébrité fcandaleufe. Me Gerbier fe fit, en

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plaidant contre eux, la même réputation qu'avoient obtenue autrefois les Arnault & les Pasquier.

Sur les conclufions des gens du roi, il fut rendu arrêt, le 8 mai 1761, par lequel le général des Jéfuites, & toute la fociété, furent condamnés folidairement à payer les créanciers, aux dépens, & à cinquante mille livres de dommages & intérêts. Pendant qu'on plaidoit cette étrange caufe, les efprits s'étoient tellement échauffés, & les anciennes plaintes contre cette compagnie s'étoient renouvellées fi hautement, qu'avant de rendre l'arrêt, le parlement avoit ordonné, dès le 17 avril, que les Jéfuites remettroient, au greffe de la cour, un exemplaire de leurs conftitutions. Les Jéfuites obtinrent que le roi fe réferveroit la connoiffance des conftitutions de la fociété ; &, le 6 août, le parlement enregistra une déclaration du roi, par laquelle il étoit enjoint aux fupérieurs des différentes maifons des Jéfuites, de remettre, dans fix mois, au greffe du confeil, les titres de leur établissement en France. Le même jour, le parlement rend arrêt par lequel le procureur - général eft reçu appellant comme d'abus de plufieurs bulles, brefs & conftitutions, concernant les Jéfuites. Par un fecond arrêt, le parlement condamne vingt-quatre livres de théologiens Jéfuites à être brûlés par la main du bourreau; &, pour prononcer définitivement fur ce qui réfulte defdits livres, de l'en feignement conftant & non interrompu de la doctrine de la fociété, & de l'inutilité des aveux & rétractations defdits Jéfuites, joint la délibération à l'appel comme d'abus pour être fait droit par un même arrêt, & cepen dant, par provifion, fait défenfes à tous fujets du roi trer dans ladite fociété, aux prêtres de ladite fociété

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