Imágenes de páginas
PDF
EPUB
[ocr errors]
[merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small]

Du Pere Parennin, Miffionnaire de la Compagnie de Jefus, au Pere *** de la même Compagnie.

,

A Peking, ce 20 Juillet 1725.

MON RÉVÉREND PERE,

La paix de N. S.

Je ne doute point que vous n'ayez été édifié du détail que je vous envoyai A j

413780

l'année derniere, fur le progrès que la Religion a fait dans une nombreufe famille du fang Impérial, & fur la générofité toute chrétienne avec laquelle ces Princes encore nouveaux dans la foi, fe font vus dépouillés de leur dignité, & condamnés à un pénible exil. Mais peut-être êtes-vous en peine de fçavoir s'ils fe font foutenus dans la même ferveur qu'ils ont fait paroître au commencement de leur difgrace, & fi la continuité de leurs fouffrances n'a point à la fin ébranlé leur courage. Non, mon Révérend Pere, la vertu de ces illuftres Néophytes n'a point chancelé ; leurs maux qui croiffent chaque jour, ne fervent qu'à augmenter leur patience, & ils nous donnent de continuels exemples d'une conftance & d'une fermeté héroïque.

Je ne vous rapporterai que ce que j'ai appris, foit des Chrétiens qui font venus du lieu de leur exil, foit de quelques lettres que ces Seigneurs m'ont écrites; mais j'ignore plufieurs traits particuliers de vertu, que leur humilité a pris grand foin de nous cacher.

Au refte, il eft bon de vous avertir; 1o. qu'en parlant du lieu de leur exil, que les Chinois nomment Yeou-ouée, je

he me fervirai que du nom Tartare qui eff Fourdane, & qui fignifie en général face de guerre, bâtie dans les paffages de la grande muraille, ou ailleurs dans des gorges de montagnes, pour fermer aux ennemis l'entrée du Royaume; 2°. que quand je parlerai du vieux Régulo , pere des Princes Chrétiens, je l'appellerai déformais de fon nom honorable Sourniama, & non pas Sou-nou, dont je me fuis fervi dans ma premiere: lettre. Sou-nou eft fon petit nom qui n'eft employé que par l'Empereur, ou par ceux qui parlent de lui à Sa Majefté.. Ses enfans ont auffi des noms Tartares; mais comme je ne parlerai gueres que de ceux qui font Chrétiens, je continuerai à leur donner le nom du faint qu'ils ont reçu au baptême.

Les Mantcheoux entretiennent dans Fourdane quarante mille hommes de garnifon avec un Général, & grand nombre d'Officiers fubalternes. Ce Général eft en même temps Gouverneur de la ville & de toutes les petites places d'alentour où il y a garnifon. On compte dans Fourdane cinquante mille habitans. Ce font tous ou des ouvriers ou des négocians qui commercent avec

les Montgoux. La police y eft adminiftrée par les Mandarins de lettres.

Il y a encore deux chofes que je vous prie d'obferver; la premiere, que parmi les domeftiques qui fuivirent ces Princes dans leur exil, il y en avoit de deux fortes; les uns font proprement efclaves de leur maison ; les autres font des Tartares ou Chinois tartarifés, que l'Empereur donne en grand ou petit nombre, à proportion de la dignité dont il honore les Princes de fon fang. Ces derniers font l'équipage du Régulo, & on les appelle communément les gens de fa porte. Il y a parmi eux des Mandarins confidérables, des Vices - Rois & des Tfongtou (1); quoiqu'ils ne foient pas efclaves comme les premiers, ils font prefque également foumis aux volontés du Régulo, tant qu'il conferve fa digni; ils paffent après fa mort au fervice de fes enfans, s'ils font honorés de la même dignité. Si le pere, pendant fa vie, vient à décheoir de fon rang, ou fi le confervant jufqu'à la mort, il ne paffe point à d'autres de fes enfans

(1) Nom d'un grand Mandarin, qui a la furintendance de deux Provinces, & qui est audeffus des Vice-Rois.

« AnteriorContinuar »