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n'ayant, comme nous l'avons dit, aucun fon déterminé. Nous avons de plus fuivi en eela l'orthographe Italienne qui donne à l'h dans les mots, ghengheria, ghiottola, &c. le fon rude & la même valeur que l'u donne aux mots françois, guerre, guinder, &c.

Les Anglois, il est vrai, prononcent durement le g devant les voyelles e, i, fans l'adjonction d'aucune autre lettre dans le mot gilt & femblables; & les Grecs dans gelao, agios & femblables: mais cet ufage étant généralement reçu dans ces Langues, il n'y a point d'erreur à craindre. Nous fommes dans un cas bien différent nous faisons une nouvelle orthographe pour une Langue qui n'en avoit point de fixe & qui lui fut propre; nous faifons des conventions nouvelles inconnues au françois fur lequel on fe regle communément : & fi, par ex. àu lieu d'écrire ghilia, qui fignifie tromper, lorfque le g fonne durement, nous avions écrit, gilia, nos Languedociens accoutumés à l'orthographe françoife, auroient prononcé comme jilia, & n'y auroient rien compris, n'étant avertis par aucun figne, que le g dans ce terme n'a pas le fon ordinaire, ou adouci des mots françois, gille, gilet, &c.

Prononciation des lettres n, S.

La lettre n a deux prononciations en Languedocien, & toutes deux étrangeres au François. L'n finale eft nazale dans cette Langue-ci, ou caractéristique des nazales, an, en, ou ain, on, un ; & l'on doit la prononcer fourdement dans les mots françois van, vin, bon, brun: au lieu que cette lettre eft liquide à la fin des mots languedociens; tels que, pan, fën, prin, fon, lun, que nous prononçons, à ce que prétendent les Parifiens, comme pane, fene, prine, fone, lune.

Cette derniere prononciation très-correcte en Languedocien & en Latin, eft très-vicieuse en François : mais par une bifarrerie affez ordinaire, les Languedociens prennent fur cela le change, ils prononcent fourdement I'n finale d'amen, hymen, forfan, nomen, &c. dont ils font une voyelle nazale; & ils la font liquide dans van vin, bon, &c. ce qui est le contraire de ce qu'il faudroit faire. (a)

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(a) On doit confulter fur ceci, comme fur les autres parties de

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En fecond lieu la lettre n fuivie dans les mots Languedociens d'un i & d'une autre voyelle, fe change en gr mouillé, pareil au gn de, magnifique. Ainsi au lieu de, nia, nie, nio, niu, ils prononcent, gna, gne, gno, gnu; & c'eft de cette façon que nous avons écrit ces fyllabes, conformément à la regle d'orthographe ci-deffus rapportée mais il arrive que fans s'en appercevoir, ils portent cette prononciation dans le François ; & rien n'eft fi ordinaire que de leur entendre prononcer, graigner, commugnon, pagnier, magnere, \dergné; au lieu de, grainier, communion, panier, maniere, &c. défaut qui leur eft commun avec le bas peuple de Paris. Voyez fur la prononciation du gn le commencement de la lettre G, & l'article Vâou mágno.

La lettres ne fe fait point fentir ordinairement à la fin des mots françois, à moins que celui qui fuit ne commence par une voyelle : nous ignorons cette regle dans le Languedocien; & l'ufage contraire où nous fommes à cet égard décele notre pays, lorfque nous parlons françois & nous expofe dans les Provinces du nord du Royaume à de fréquentes railleries.

Nous renvoyons au corps de l'Ouvrage, fur-tout au commencement des lettres C, G, L, O, R, S, les autres remarques de cette efpece.

la prononciation, les Grammaires de Reftaud, ou de Wailli: on verra bien avec un peu d'attention,que nous n'avons pas toutembraffé dans ces remarques; qu'il faut regarder comme un fupplément aux ouvrages compofés fur la langue françoife, auxquels les Languedociens (que ce fupplément regarde) feront bien de recourir, apprendre à parler & à prononcer correctement le françois.

pour

$. SECOND

Sur les voyelles E, I, 0.

Prononciation de l'e.

Nous avons comme les Italiens, les Espagnols &

d'autres nations, un e que nous appellons très fermé, dont la prononciation eft très-difficile à ceux qui ne font habitués qu'au françois; tels font les e des mots italiens, fatezze, tormento, &c. & des mots Espagnols, hombre, llamen, hazer, &c. C'eft celui que nous prononçons dans destezi, feramento, ëntrëfôirë, & femblables.

Le fon de cette efpece d'e differe plus de l'e fermé françois, que celui-ci ne differe de l'è ouvert. Pour le former il faut rétrécir beaucoup plus la capacité du palais & rapprocher davantage les dents & les levres, que pour l'é fermé ordinaire ; c'eft pour cela que nous avons appelé très-fermé cet e, que les Italiens appellent ftretto.

Nous voulions pour le diftinguer dans la prononcia tion, le marquer de deux accens aigus mais cette même voyelle reçoit quelquefois un accent circonflexe; ce qui auroit produit une confufion d'accens: nous avons préféré de le diftinguer par deux points comme un ë tréma¿ ainfi qu'on l'a déjà vu dans les mots, dëglëzi, fèramento, &c.

On fentira mieux la différence des fons de ces deux è, l'un fermé & l'autre ftretto, par la comparaifon qu'on peut en faire dans les mots fuivans. Miralié; miroitier Miralië; petit miroir. Rés; treffe d'oignon. Rës j rien. Pezës; les pieds. Pizes; des pois. Iranjhé; oranger. Iranjhë; une orange, &c..

Le Languedocien n'a point d'e muet, ou féminin françois. On fait que cette forte de voyelle fe fait entendre fourdement & fi à demi, qu'elle n'a prefqué d'au tre fon que celui de la confonne qui la précede. Ainfi on prononce la phrafe fuivante. Que faites-vous de ce petit livre? comme fi elle étoit écrite de cette façon-ci. Q fet vou de pti livr

Cette

Cette prononciation qui eft aifée à ceux qui habitent de là la Loire, eft une de celles qui réuffit le moins aux Languedociens, par l'habitude prife d'enfance de donner à toutes les lettres un fon plein, entier & diftin&t. C'est ce qui les jette par rapport à l'e muet françois, dont ils n'ont point d'idée, dans des prononciations qui lui font étrangeres & dans des équivoques qui apprê tent à rire à leurs dépens.

Le plus grand nombre donne à l'e féminin le fon de l'e mafculin: d'où il arrive qu'on prononce les articles, le, de, ce, comme s'ils étoient au pluriel, les, des, ces; ou que l'é fut marqué d'un accent aigu: en forte qu'on dira de quelqu'un, par ex. qu'il s'égorge; tandis qu'il ne fait que fe gorger; & qu'au lieu de dire qu'on a volé le tronc d'une Eglife, on dira tout autre chose par la feule mauvaise prononciation de l'article: mais ces fortes de fautes font trop communes, pour que nos oreilles en foient bleffées; quoiqu'il en résulte des équivoques & des contrefens de toute efpece.

Il y a des Languedociens, qui fe piquant de mieux parler, croient avoir faifi la vraie prononciation de l'e muet, en lui donnant celle de l'o: ils diront en conféquence, lo, do, ço, quo; au lieu de, le, de, ce, que; ou bien, l, d, e, q; & ils s'applaudiront de prononcer, par ex. lo pain do munition, ou faito ço quo la loi do Diu ordonne. (a)

Il eft certain que l'e féminin eft auffi étranger à la prononciation languedocienne, que l'é très-fermé l'eft au françois, où l'on remarquera encore, que les ha

(a) Les fautes de cette espece & bien d'autres qui étoient trèsfréquentes il y a vingt-cinq ou trente ans, ne fubfiftent prefque plus dans certaines villes où les lettres ont fait depuis cette époque des progrès sensibles; progrès qui fe font quelque peu répandus par imitation parmi le peuple même le moins letrré de ces villes: nous n'avons pas eru cependant devoir rayer ces fautes, ou les omettre dans cette nouvelle édition : elle pourra fervir dans bien d'autres endroits où ces progrès ont été plus retardés dans la claffe même de ceux qu'on appelle honnêtes gens, ou gens comme il faut ; qui croyant devoir par honneur parler françois, pour fe diftinguer du peuple, manquent pour le faire avec fuccès de fecours néceffaires de celui fur-tout d'un livre élémentaire qui foit à leur portée; tel que pourroit l'être fur bien des points le préfent Dictionnaire.

Tome I.

d

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bitans de-là la Loire, en prononçant à leur façon le Languedocien mettent une ou féminin, ou ouvert par-tout où nous prononçons l'ë très-fermé: comme on peut le voir en prononçant à la françoife les mots lan. guedociens fuivans: gollë, ëfpoumpi, fanabrêgou, pëbërou, &c.

i

De la voyelle i.

La voyelle prend fouvent en françois un fon qui lui eft étranger. Nous lui donnons dans notre prononciation celui qui lui eft propre. En conféquence nous la faifons fonner dans, pêiro, fôirë, máirë; comme nous le dirons plus au long en parlant des diphthongues ái, êi, ôi, oûi; au lieu que dans la prononciation françoife, on lit les mots précédens comme, père, fouère, mère où l'i n'entre pas plus que dans les mots boire, faire, j'ai aimé, j'aimai, &c. qu'on rendroit par, bouère, fèro, jé émé, &c. fi on les écrivoit comme on les prononce.

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C'est ce qui jette dans de fingulieres équivoques les habitans des Provinces françoifes dont l'organe ne fe plie qu'à peine à notre prononciation : ils diront, par ex. M. la Veffe, pour M. la Vâiffe; une Meffe, pour une máiffo; c'eft-à-dire, mâchoire; des feffes, pour des fâiffos, ou des terraffes en emphithéâtre, &c. Ils ne ren. contrent pas mieux notre prononciation, lorfque pour faire fonner l'i des mots précédens, ils en font un ï tréma, & qu'ils difent, va-iffe, ma-ïsse, fa-ïsse; ce qui défigure la fignification de ces mots, & les rend encore de trois fyllabes; au lieu de diffyllabes qu'ils font dans notre façon de prononcer, felon laquelle nous faifons fonner l'i en le liant avec la voyelle qui précéde; ce qui fait une vraie diphthongue, ou comme fi dans les mots françois théyere, fayance, par ex. on s'arrêtoit aux fyllabes they & fay: & telle eft la prononciation des mots italiens, poi, fui, lei, qui font de vraies diphthongues, comme dans le grec, tais emerais.

C'eft pour n'avoir pas bien réfléchi, foit dit en paffant, fur l'y grec placé au milieu d'un mot, que des Grammairiens ont imaginé que cette voyelle équivaloit à deux i bien exprimés: il eft certain cependant qu'on n'en fait fonner qu'un, lequel on lie, foit avec la voyelle

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