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un fiege où toute fon attitude eft contrainte, les bras enchaînés par un ou vrage fur lequel on la force encore d'affujettir fa vue, la tête relevée par des fers qui offenfent également l'eftomac & le cerveau, la taille déformée par une cuiraffe qu'inventa la laideur pour fe ménager des compagnes, obligée de proportionner fa nourriture à la quantité de liens qui preffent fur fes visceres, ne refpirant même qu'avec les plus grands efforts, la jeune fille, pour recouvrer quelques instans de liberté, n'a que la reffource de prétexter quelques befoins dont on lui fait bientôt un crime s'ils deviennent trop fréquens.

Ainfi les jours de fon printemps fe paffent à contrarier la nature. Quel automne leur fuccédera? N'eft-il pas fenfible que fi elle eft affez heureuse pour ne pas perdre la vie en la donnant, les enfans qui appelleront fon époux du tendre nom de pere, naîtront bien moins à la lumiere qu'à la.

tre les divers principes de l'économie animale? Pourquoi écarter d'elles ces alimens groffiers, mais fains, qui diftribuant à tous les organes, des fucs moins fubtils & plus nourriffans, portent par-tout la vie & la force? Tu voulois, je le fais, que tes Lacédémoniens te donnaffent des foldats. Ne nous faut-il pas des hommes ? Et comment en aurons-nous, fi l'éducation phyfique en affoiblit la race dans les êtres que leur conformation destine à la régénérer ?

Voyez s'échapper des bras de fa nourrice, cette enfant qui, toute fiere de tenir à la vie, va, vient, faute, bondit, & ne paroît occupée qu'à effayer fon existence; c'eft la nature dans fa fleur. Bientôt une gouvernante diffi cile ou une mere aux nerfs délicats ; vont étendre le crêpe de la douleur fur les jeux de fon premier âge, arrêter les progrès de fon organisation, & femer autour d'elle les germes des infirmités & de la mort. Immobile fur

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un fiege où toute fon attitude eft contrainte, les bras enchaînés par un ou vrage fur lequel on la force encore d'afsujettir sa vue, la tête relevée par des fers qui offenfent également l'eftomac & le cerveau, la taille déformée par une cuiraffe qu'inventa la laideur pour se ménager des compagnes, cbiigée de proportionner fa nourriture à la quantité de liens qui preffent fur fes visceres, ne refpirant même qu'a vec les plus grands efforts, la jeune fille, pour recouvrer quelques inftans de liberté, n'a que la reffource de prétexter quelques befoins dont en lui fait bientôt un crime s'ils deviennent trop fréquens.

Ainfi les jours de fon printemps fe paffent à contrarier la nature. Quel automne leur fuccédera? N'eft-il pas fenfible que fi elle eft affez heureuse pour ne pas perdre la vie en la donnant, les enfans qui appelleront fon époux du tendre nom de pere, naîtront bien moins à la lumiere qu'à la.

douleur? Comment puiferoient-ils une conftitution forte dans le fein d'une mere à qui l'éducation l'a refufée ? Si tu veux que tes arbrisseaux se couvrent un jour de bons fruits, garde-toi de tourmenter leur végétation.

La fable peint à nos yeux étonnés des géants qui déracinent les montagnes. C'eft qu'ils étoient fils de la terre. Que ne peut fur le tempérament des enfans, la constitution phyfique des meres?

Que ne peut auffi leur conftitution morale? Une académie avoit propofé d'indiquer comment l'éducation des femmes pourroit contribuer à rendre les hommes meilleurs. Ce magnifique fujet eft encore à traiter. L'auteur couronné a pris le change. Il a difcuté un com bien qu'on ne lui demandoit pas, & il n'a point montré le comment qui étoit la feule chofe qu'on attendoit de lui.

Difcuter moi-même ce point important, m'éloigneroit trop du plan qui m'eft tracé. D'ailleurs, plus j'en con

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nois l'importace, moins je dois m'exposer à tromper un fujet auffi beau, en ne le traitant que rapidement & par occafion.

CHAPITRE

1 I.

De l'éducation des femmes du peuple dans les mêmes rapports.

Dès qu'il eft prouvé que le physi

que & fouvent le moral de l'homme dépendent de l'éducation des femmes, il faut en tirer cette conféquence, que P'éducation des femmes du peuple, de ce peuple qui eft par-tout le foutien des états, mérite infiniment d'arrêter les regards de l'adminiftration. Qui veut les effets, doit vouloir les causes. Vous ne fauriez avoir des hommes tels que la chofe publique les demande, fans avoir des femmes capables de les lui donner.

L'éducation de celles-ci n'exige peutêtre pas des attentions moindres que

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