Maurice, Chef de la légion Thébaine fous Maximien, écrivoit à l'Empereur une lettre bien courte, mais bien admirable & bien digne d'être rapportée :

« Nous fommes, Seigneur, vos fol» dats, mais les ferviteurs de Dieu; nous > vous devons le fervice, & à lui notre > innocence. Nous ne pouvons point vous » obéir pour renoncer Dieu, ce Dieu qui > eft le vôtre auffi, Seigneur, soit que > vous le vouliez, ou non ».

Milites fumus, Imperator, tui, fed tamen fervi Dei; tibi militiam debemus, illi innocentiam.

Hift. ancien. tom. XI, pag. 477 & 478.

Et voici ce que les quarante Martyrs

répondoient à leur perfécuteur :

<< Dans la ville de Sebafte fouffroient » quarante foldats chrétiens de différents » pays, tous jeunes, bienfaits, braves, » & déja confidérables par leurs fervices. » Le Gouverneur Agricola ayant publié » les ordres de l'Empereur, ils s'avance→

par

» rent hardiment, & dirent qu'ils étoient > chrétiens. Il effaya de les perfuader >> douceur, de les piquer d'honneur, & » de les tenter par des promeffes; enfin » il en vint aux menaces. Mais les mar» tyrs répondirent généreufement: Que » pouvez-vous nous donner, qui égale ce » que vous voulez nous ôter? Votre pou> voir ne s'étend que fur nos corps, Vous » voulez dominer fur nos ames; & vous » regardez comme une grande injure, si » nous ne vous préférons pas à notre Dieu. » Vous n'avez pas affaire à des lâches, ni » à des gens qui aiment la vie ».

Ada fin. pag. 583, ex Bafil. Hom. 20. Fleury, Hift. Eccléfiaft. tome III, Liv. X, pag. 63 & 64.

Les foldats Payens mêmes refpectoient leurs facrifices, leurs Prêtres, leurs temples, leurs autels, ils les défendoient au péril de leur vie. Des foldats chrétiens de nos jours auroient-ils moins de religion que les Payens, auroient-ils moins de

respect pour le vrai Dieu, que les Payens en porterent toujours au culte de leurs Idoles? Je ne rapporterai que l'action pieuse & hardie du foldat Fabius Dorso.

C. Fabius Dorso descend du Capitole, portant entre ses mains les chofes facrées néceffaires pour un facrifice, traverse les gardes des ennemis fans se laisser épouvanter par le bruit & les difcours, & arrive au mont Quirinal. Après y avoir accompli toutes les cérémonies prescrites, il retourne par le même chemin avec une pareille gravité & une pleine confiance que la protection des Dieux dont il gardoit le culte, au péril même de sa vie ne lui manqueroit point; il arrive heureufement au Capitole.

Hift. Rom. tom. II, pag. 446 & 447

Après la mort d'Alexandre, Ptolomée forma le fiege de Jérufalem, & le prit, parce que les Juifs craignirent de violer la loi, s'ils fe défendoient le jour du fabath. Ptolomée fit donner un affaut gé

néral ce jour-là, & fe rendit maître de la place. Conduite fuperftitieufe, & peu militaire de la part des Juifs, mais qui prouve leur attachement à la loi & à la religion.

Refpecter les Miniftres de l'églife & toutes les personnes confacrées à Dieu, révérer toutes les chofes facrées, ne profaner jamais les lieux faints, n'y jamais paroître qu'avec décence, affifter avec édification à tous les exercices de la religion, fur-tout aux redoutables mysteres de la messe, est, felon Montecuculi, l'indispensable devoir d'un chrétien, & celui qui affure le plus celui d'un foldat.

L'épitôme du 47° Livre de Tite-Live nous apprend que Cn. Tremellius, Tribun du peuple, ayant eu une prise avec M. Emilius Lepidus, grand-Pontife, dans laquelle il s'étoit fervi de termes injurieux, fut condamné à une amende. On fçait quelle étoit la puissance énorme des Tribuns du peuple, qui rendoit même leur perfonne facrée & inviolable : cependant

culi.

le respect dû à la religion l'emporta fur cette magiftrature redoutable, fouvent aux Confuls mêmes, & à tout le Sénat.

N'eft-ce pas être infenfé, répete dans plus d'un endroit un Philosophe du fiecle, n'eft-ce être infenfé que pas de fe voir à tout moment en danger d'être tué, de ne pouvoir éviter ce danger fans la perte de fon honneur, ou celle de fon ame, & ne pas se tenir prêt de paroître au redoutable jugement qui fuit la mort, & duquel dépend notre falut éternel?

Servez Dieu en vérité, difoient Tobie mourant à fa famille, Buffy Rabutin à ses Montecu- enfans, & un des plus grands Généraux de l'Europe à tout ce qui l'environnoit à la Cour & dans les armées ; fervez Dieu en vérité, n'oubliez rien pour vous efforcer de lui plaire; agiffez en tout avec juftice; faites l'aumône; fi vous avez beaucoup, donnez libéralement ; fi vous avez peu, donnez ce peu avec joie; car c'est le moyen de vous acquérir un tréfor pour le tems de votre néceffité : l'aumône délivre du pé