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LE ROSEAU

A

ET LE PINÇON.

FABLE I V.

U Printems, quand Phoebus ramène les beaux jours,

Saifon aimable où les Amours

Ont à leurs Loix affervi la Nature,
Quand les prez font couverts de fleurs & de verdure,
Le Rofeau difoit au Pinçon:

Où placez-vous vôtre nid, mon mignon?
Croïez vous être bien tranquile

Sur la branche de ce pommier ?

Vous aurez des petits : mais c'est pour l'Epervier.
Je vous ofre un meilleur afile.
Repofez-vous fur moi. Vous vivrez fans fouci.
Aucun Epervier, Dieu merci,

Ne vient troubler la paix de ce rivage.
Ami, dit le Pinçon, me croiroit-on bien fage
De fonder ma maison sur toi,
Lorfque tous les jours je te voi

Joüet des vents & de l'orage?

• Je te fuis obligé : mais je n'en ferai rien.

Ta vanité me femble extrême.

Tu veux me fervir de foutien,
Et tu ne peux te foutenir toi-même.

L'Homme inconstant & vain eft un mauvais apui : C'est mon Roseau. Ne fondons rien fur lui.

LE RAT, LA SOURIS,

LE CHAT ET LE CHIEN. FABLE Ꮴ .

LE Rat un jour rencontrant la Souris

Dans un fromage de Holande,

Lui dit: Je vous y prens, friande,
Sortez vite de mon logis.

Ignorez-vous que ce fromage
Eft mon bien & mon héritage?
Nous le rongeons de pére en fils.
Je l'ignorois, répondit-elle.

Je le croïois à Rominagrobis.

Il eft vrai, dit le Chat écoutant leur querelle,
Et vous me le paîrez. Il les croque tous deux,
Enfuite le fromage. Alors un Chien fidèle

Fait fuir le Chat, & lui dit : Malheureux! Eft-ce donc pour cela que tu fais fentinelle? Tu punis les larrons, & tu voles comme eux!

LE MOUCHERON.

FABLE VI.
1.

CEtt

Ette impitoïable Hirondelle

Nous fait fans ceffe une guerre cruelle, Difoit un Moucheron. Je pense que l'Enfer Pour nous perfécuter tout exprès l'a fait naître. Point de trève avec elle, & nous n'ofons paroître. Il nous faut abandonner l'air.

Alors l'Infecte misérable,

Fuïant la fureur de Progné,

Va se loger dans une étable.

Nouveau péril. Sous ce toit Arachné
Tendoit aux moucherons un filet redoutable.
Me voici pis encor, dit-il. Cet animal
En veut à mes pareils; & ce tiffu fatal

Eft fait pour m'atraper. Cherchons un autre afile.
Que l'on eft malheureux d'être né moucheron!

Auffi-tôt dit, d'un vol agile

Il entre dans une maison.

Cette retraite étoit fûre & tranquile.

Point d'Araignée en ce logis.

Il n'y craignoit point l'Hirondelle:

Mais nous fommes fouvent nos plus grands ennemis. La nuit vient. L'étourdi se brûle à la chandelle.

LA COLOMBE, L'HIRONDELLE ET LA PIE.

FABLE VII.

UNe Colombe blanche eut autrefois querelle

Avec une jeune Hirondelle.
Chacune vantoit fa couleur,
Et croïoit n'avoir point d'égale.
Vous êtes noire à faire peur,

Dit la Colombe à sa rivale.

Ofez-vous avec moi faire comparaison ?

Vous n'êtes tout au plus qu'une beauté d'Afrique, Où l'on dit que main Nègre auffi noir qu'un Démon Paffe pour Adonis. L'Hirondelle replique:

Vous avez trop de vanité,

Et vous chantez trop tôt victoire.

La couleur blanche eft fade, & vaut moins que la

noire.

De mon plumage enfin chacun eft enchanté.
La brune au goût de tout le monde
Eft plus piquante que la blonde.

Mais pour terminer nos débats

Prenons pour arbitre la Pie,

Noire & blanche à la fois, nôtre commune amie. Elle me paroît propre à décider le cas.

La Colombe y confent. On va trouver l'Agace, Qui leur dit : Ah vraiment vous avez bonne grace De difputer de la beauté!

Vôtre couleur eft fans varieté.

J'admire ici vôtre infolence

De vanter vos atraits, fur tout en ma présence.
Pour plaire il faut me reffembler.

C'est à peu près ainfi que raisonnent nos Belles:
Mais chut, il n'en faut point parler.

Je ne veux pas me broüiller avec elles.

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