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LES DEUX CHATS.

FABLE

VII I.

HEureux celui qu'un Aftre favorable

A pris foin de rendre agréable.

Certain je ne fçai quoi prévient en sa faveur.
Avant que de parler il a gagné le cœur.
Quoiqu'il faffe, il aura la fortune profpére.

Il en eft d'autres au contraire

Que l'on hait fans fçavoir pourquoi. Ils font nez malheureux, & la fuprême Loi De l'être par qui tout refpire

L'ordonne ainfi. Cela nous doit fufire.

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DEUX Chats, l'un blanc & l'autre noir, Logeoient fous même toit. Le blanc aimé du Maître S'apeloit Rodilard. Son nom le fait connoître. Il croquoit maint lardon, & du matin au foir Ne bougeoit du foïer. Le noir n'ofoit paroître; Et s'il entroit dans la maison,

On crioit après au Larron.

L'infortuné Raton, piqué de l'injustice
Qu'on lui faifoit, dit : Eh quelle raison

Fait donc chérir ce beau Mignon?

Seroit-ce fa couleur? A-t-il moins de malice

Pour être blanc ? Je le voi careffé,

Monfieur lui foufre tout, & moi je fuis chaffé.
Monfieur affurément ne fuit que fon caprice;
Et Rodilard dans le logis

N'a jamais pris un rat, pas même une fouris.
Ce n'eft qu'un fainéant. La chose est bien notoire.
Je les prens. Il en a la gloire;

Et s'il fait un larcin, on le met fur mon dos.
Par le Maître des chats j'en tirerai vengeance.
J'y fçais un fort bon tour. Tenons-nous en repos.
Laiffons des rats multiplier l'engeance.
pourra du Maître exciter le couroux.
Que Rodilard ait part à ma disgrace

Cela

Et porte la moitié des coups,

Je fuis content. Raton ne va plus à la chasse.

Rats de troter. C'eft une race

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Ils rongeoient tout impunément.

Monfieur fe mit à la fin en colére.

Raton l'avoit prévû : mais ce reffentiment

Sur quel Chat tomba-t-il? Sur Raton feulement.

Il fut puni. L'éxemple eft falutaire.

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La vengeance nous perd. Il faut toujours bien faire,

LE

LE LIE' VRE

MOINE A U.

ET LE

FABLE

I X.

Ans la faifon où des dons de Cérès

On a dépouillé les guérets,

Saifon où le gibier n'y trouve plus d'afile,

Un Liévre s'étoit endormi.

Un Paffereau l'éveille, & lui dit : Mon ami,
Je fuis furpris que tu fois fi tranquile.
Un Liévre doit veiller toujours.

J'aperçoi des Chaffeurs que pour toi je redoute;
Et c'est toi qu'ils cherchent fans doute.

Croi moi : de ta viteffe emprunte le fecours,
Gagne les bois & les montagnes.

Ne parois plus dans nos campagnes

Jufqu'au tems où les blez couvriront les fillons.
Pareils avis étoient fort bons.

Tel donne à fon voifin des confeils falutaires,
Qui fort fouvent néglige fes afaires.

Nôtre Moineau ne voïoit pas

Certain jeune Ecolier, venant au petit pas,

Qui le long des buiffons dans un temps de vacance

C

Pourfuivoit les petits oiseaux,

Et tiroit fa poudre aux moineaux.

L'Enfant voit celui-ci, par derrière il s'avance
Avec adreffe, & l'ajuftant,

Le coup part. L'Oifillon tombe mort à l'instant.

LA POULE ET LA PIE.

LA

FABLE X.

A Poule caquetoit un jour avec la Pie,
Sa voisine & fa bonne amie.

Après maints frivoles discours
Celle-ci dit: Je vous fuplie,

Racontez-moi comment vont vos amours. Les Coqs font-ils toujours galants à l'ordinaire? En faut-il douter, ma commére?

Faite comme je fuis, vous pouvez bien penser
Qu'à me faire la cour ils doivent s'empreller.
Je ne borne pas ma conquête

A ces oifeaux. Quantité de Faifans
Viennent autour de moi faire les foupirans.

Tout jufqu'au Dindon me fait fête :

Mais, à vous dire vrai, tous y perdent leur temps; Et fi je foufre ces galans,

C'est seulement pour rire à leurs dépens. Je prens plaifir à voir leurs diverfes grimaces, Mais fur-tout celles du Dindon.

A foupirer qu'il a de graces

Avec fon nez pendant ! C'est un joli mignon.
Mais je voudrois aussi sçavoir vos avantures :
Racontez-les à votre tour.

J'ai des amans de toutes les figures,
Dit la Pie, & j'infpire auffi beaucoup d'amour.
Mais, afin que je les écoute,

Il eft jufte qu'il leur en coute.

Il vient des Etourneaux fort fecs: Je les bannis. Il vient des Eperviers : & c'est encore pis:

Ce font efcrocs que je redoute.

Il vient des Ortolans enfin, dont je fais cas.
Voilà ceux que je cherche : ils font refais & gras:
Il faut voir comme je les plume.

L'amour pour les duper m'eft un puiffant fecours.

Que de Cloris fuivent cette coutume!

Que d'Ortolans font plumez tous les jours!

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