LETTRE Attribuez, s'il vous plaît, le reXIII. tardement de ma réponse à la perfuafion où je fuis qu'elle ne vous étoit pas néceffaire. Vous pouviez par vous-même réfoudre toutes les queftions que vous me propofez; & fi par modeftie vous n'ofiez vous fier à votre lumiere, il vous étoit facile de trouver dans la fageffe de celui qui vous conduit, la décision de tous vos doutes. Ce n'en eft pas un que la néceffité d'avoir un ordre, & de le fuivre: c'est un devoir pour tous, & qui devient d'une obligation plus étroite pour ceux qui aiment l'indépendance & qui craignent l'affujettiffement. C'est une vérité dont vous convenez, mais que vos inclinations & que divers prétextes combattent. Il faut lui facrifier vos réfistances & vos raifonnemens, & de LETTRE mander à Dieu avec inftance, qu'il vous infpire l'amour de l'obéiffan-XIII. ce & de l'ordre, la crainte de lui déplaire en fuivant vos penchans ou vos dégoûts, & le defir fincere de n'agir que par fon efprit. Il est aifé de defirer une régle, mais difficile de s'y affujettir. Le cœur toujours inquiet, aime le changement, & l'efprit ne fe fixe qu'avec peine à un ordre qui le met à la gêne, en arrêtant fa légereté & fes caprices. Mais plus ces maux font grands, plus le remede eft néceffaire ; & il ne faut pas attendre que l'âge ait fortifié des inclinations dont les racines font profondes, & qui peuvent infecter du fecret poifon de l'amour-propre une vie dont tout l'extérieur eft innocent. Il est vrai qu'il ne faut pas devenir efclave pour s'être fait une loi de certains éxercices arbitraires; & que des raisons, non-feulement de néceffité, mais de bienféance, peuvent en difpenfer. Mais il ne faut pas que le feul dégoût, la pareffe, le LETTRE defir de fubftituer un éxercice qui XIIL plaît à un autre dont le tems eft ve nu, la curiofité pour des lectures qui ne font pas néceffaires, interrompent. l'ordre qu'on s'eft-prefcrit. On doit confidérer comme des fautes toutes les actions qui s'écartent de cette régle. Il faut les porter au tribunal de la Pénitence, fupplier celui qui en doit juger, de les confidérer moins en elles-mêmes, que dans leur principe & dans leurs fuites, & tâcher de les expier par de légeres aumônes, des profternemens accompagnez de quelques. verfets des Pleaumes propres à la pénitence, & fur tout par une févere éxactitude à fes devoirs. On furmonte ainfi l'amour de l'indépendance par l'application continuelle à la réprimer ou à la punir 3 & l'on trouve enfin une folide paix à porter le joug de l'obéiffance, & à n'être plus le jouet de fes propres defirs, qu'on ne peut calmer qu'en ne les écoutant plus. Puifque vous ne pouvez, Mon LETTRE feur, donner à l'étude que cinq ou fix heures par jour, vous devez me- "XIII. furer vos éxercices fur ces bornes étroites, & ne pas vous accabler par des occupations qui ne conviendroient pas à votre peu de loifir. Si Dieu vous accorde une longue vie, & le repos dont vous jouiffez, vous fera facile, en ménageant utilement le tems, de vous avancer dans les fciences, quoique ce foit avec un peu de lenteur. il Il est néceffaire que vous lifez un Commentaire fur l'Ecriture, & je vous confeille de commencer par le Nouveau Teftament, parce que l'on ne peut approfondir les myfteres & les figures de l'Ancien que par la lu iere de l'Evangile. Le Commentaire de Janfenius, Evêque d'Ypres, eft excellent. Celui de Maldonat eft auffi très-bon. Vous leconfulterez avec foin, & vous de stinerez une heure entiere à cette étude. Après l'Evangile de faint Jean, vous lirez les Epitres de S. Paul, XIII. avec le fçavant Commentaire d'ELETTRE ftius, que vous lirez, s'il vous plaît, très-éxactement, en y joignant celui de Fromond,au moins pour l'Epitre aux Romains. Après l'Epitre aux Hébreux, vous commencerez la Genese, pour continuer jufqu'aux derniers Livres de l'Ancien Teftament. Le Commentaire de Janfenius fur les cinq Livres de Moïfe, vous fervira de guide. Vous y joindrez les explications de M. de Sacy, qui font pleines de lumieres, & qui peuvent vous difpenfer de confulter beaucoup d'autres Interprétes. Lorfque vous voudrez les confulter, vous préférerez Vatable & Ménochius. Une plus grande difcuffion vous méneroit trop loin, & ne ferviroit peut-être qu'à vous rendre plus in certain. Vous donnerez tous les jours un tems confidérable à la lecture des faints Peres, mais fans vous propofer de les lire tous. Vous commencerez par les Epitres de S.Ignace; & |