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LETTRE

X.

tôt regardez comme ennemis par un Seigneur Catholique, que comme fes vaffaux; qu'il n'employe un jour contre eux l'autorité & la 'jouiffance qu'ils auroient contribué à lui faire rendre ; & qu'il ne fe serve du prétexte de la Religion pour inquierter par différentes voies un grand nombre de perfonnes que les Loix reçûes dans fes Terres mettent en fûreté.

Il faut guérir ces préjugez & ces frayeurs par des affurances trèsprécifes, qu'on eft infiniment éloigné de ces fentimens; & fi l'on peut réuffir à en perfuader ceux qui ont du crédit parmi les Proteftans, il fera très-facile d'en perfuader auffi tous les autres.

Ce Seigneur ne peut avoir trop de haine de l'erreur & du fchifme. L'indifférence fur ce point feroit criminelle.Il manqueroit de reconnoiffance pour la miféricorde que Dieu lui a faite, s'il ne comprenoit toute la grandeur du mal dont il l'a délivré. Mais la bonté de ce Sei

LETTRE

gneur pour les vaffaux ne fe mefu-
re point fur ces principes. Il ne peut x.
leur être utile qu'en leur faifant ai-
mer la Religion qu'il profeffe; & il
ne peut la leur rendre aimable que
par la clémence, fa protection, fon
équité, fa fidélité à fa parole, fon
amour pour la tranquillité publi-
que, fon attention à faire du bien
à tous, fon éloignement des con-
feils violens & fuggérez par des
hommes moins intéreffez que lui
au repos de fes vaffaux, fa fageffe
& fon discernement à connoître &
à récompenfer ceux qui ont un fo-
lide mérite, son averfion de la flat-
terie & de l'artifice, & fur-tout fa
piété fincere envers Dieu, qui lui
attirera l'amour & le refpect de
tout le monde.

XIV.Ce feroit en vain qu'on chercheroit des éxemples ou dans l'antiquité, ou même dans les derniers tems, pour autorifer le confeil qu'on donne à ce Seigneur d'accepter la conférence éxigée par les

Proteftans.

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La Conférence tenue à Carthage entre les Evêques Catholiques de l'Eglife d'Afrique & les Evêques Donatiftes, avoit été demandée à P'Empereur, & obtenue par les premiers contre les fchifmatiques, qui n'y affifterent que malgré eux. Les Prélats Catholiques ne mettoient pas en doute l'unité de l'Eglife dont il s'agiffoit. Ils vouloient feulement guérir l'aigreur des fchifmatiques par une conférence tranquille; & its étoient infiniment éloignez de paroître douter de la vérité, pour rétablir plus facilement la charité fraternelle.

XV. L'Eglife a toujours cherche ceux qui s'étoient féparé d'elle par P'héréfie ou le fchifme; mais jamais elle ne leur a permis de parler - pour l'inftruire; jamais elle ne leur a fait efpérer qu'ils pourroient réuffir à la détromper ou à la rendre plus traitable; jamais elle n'a confenti de diffimuler pour un moment, la haine qu'elle portoit à leurs erreurs, quoiqu'elle ait tou

jours été remplie de compaffion pour leurs perfonnes; jamais l'Eglife n'a paru flotante entre le menfonge & la vérité; jamais elle n'a permis à aucuns de fes enfans d'écouter après elle, ou avec elle, des maîtres étrangers. Elle leur a commandé au contraire, à l'éxemple de S. Paul, de dire anathême à quiconque leur annonceroit une autre doctrine que celle qu'ils avoient apprife d'elle, quand même ce fecond Evangile paroîtroit defcendre du Ciel, & expliqué par un Ange.

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XVI. Dès qu'on ne parle point aux hérétiques par ce feul motif de les convertir, on ne leur doit point laiffer la liberté de nous entretenir de leurs erreurs. Sur cette matiere tout commerce eft rompu avec eux. On ne leur doit pas le falut, dès qu'ils prétendent nous inftruire, comme l'ordonne S. Jean. On les 2. Ep. fuit, quoiqu'ils cherchent à lier converfation par des manieres infiauantes, comme l'Hiftoire Ecclé

. 10. 1

Eufeb. &
St Iren

LETTRE

fiaftique nous l'apprend de S. Poly x. carpe à l'égard de Marcion. Et les premiers Pafteurs de l'Eglife, tels Tit.3.10. que S. Tite difciple de S. Paul, ont ordre d'éviter les hérétiques, dès qu'ils ont connu par une ou deux expériences, qu'on leur parle inutiment pour leur falut.

XVII. Il feroit hors de pro pos de citer ici le Colloque de Poiffy. La Cour n'écoutoit pas les Proteftans dans le deffein de s'inftruire; & ceux-ci n'avoient pas la témériré de le prétendre. Le Cardidinal de Lorraine & quelques Prélats catholiques penfoient que c'étoit un moyen fûr pour confondre l'héréfie. Quelques perfonnes d'Etat avoient des vûes différentes & mêlées d'une fauffe politique. Le fuccès ne fut pas heureux, & les perfonnes lages ne regardent point ce qui fe fit alors comme un éxemple qu'elles puiffent fuivre.

XVIII. Celui du Roi Henri IV. prouve bien qu'un Proteftant agit raifonnablement quand il confulte

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