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blable, que fi le foir eft proche de la nuit, qui eft le tems où la tranfpiration eft plus abondante, fuivant le calcul du célebre Sanctorius (a), qui a trouvé que cette évacuation eft de beaucoup plus copieufe pendant la nuit, que pendant le jour. Ce fera donc placer la plus forte nourriture tout à la fois dans le tems où les vaiffeaux font plus vuides, où la force mufculeufe eft plus libre & plus puiffante, & où les diftributions font plus abondantes. Il feroit mal-aifé d'imaginer de plus heureuses conjonctures pour placer un gros repas, pour en affurer le fuccès & pour en prévenir les mauvaises fuites. Mais après toutes ces réfléxions il faudra convenir que le jeûne du Carême, pratiqué même dans fon exactitu de, pourroit bien ne pas devenir fi pernicieux à la fanté, fi on effayoit de s'y accoutumer, puifqu'il ne va qu'à placer le diner au foir, & peut-être a-t-on là deffus plus de frayeur que de raison. Du moins eft-il manifefte par tout ce qu'on vient d'avancer, que le jeûne: mitigé, qui accorde un repas & une: collation, n'eft prefque d'aucun dan→→ ger pour la fanté, fi l'on joint à cess

(a) De med. static.

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raifons ce que nous avons dit ailleurs fur la frugalité, & fur le petit nombre de repas des anciennes nations.

Q

CHAPITRE IV.

De l'antiquité du jeûne. Qu'il eft de tous les tems de toutes les Religions. UAN Dil refteroit quelque doute fur l'utilité & l'avantage du jeûne, l'antiquité de fon ufage acheveroit de raffurer les efprits. Ce fut la premiere leçon que l'homme reçut en fortant des mains du Créateur, Ne comedas (a); & il feroit refté innocent & heureux s'il avoit fçu jeûner. Moyfe (b). ne connut rien de plus propre que le jeûne, pour obtenir de Dieu la connoiffance de fa loi, & le jeune entra dans: la fuite prefque dans toutes les pratiques, qui compofoient le culte de la religion du peuple Hébreu. N'étoit-ce pas en effet accoutumer ce peuple à un jeû ne de tous les jours, que de l'obliger à tant de privations, & le foumettre à tant d'obfervances (c) légales, tou

(a) Genef. c. 2. v. 17. (b) Exod. C..24. (6)

Levit. C, 11.

chant le choix des chofes qui devoient fervir à nourrir leurs corps & leur piété? De là vint la coutume des Juifs, d'employer le jeûne dans toutes les occafions (a) périlleufes ou difficiles, tant pour le bien de l'état que pour celui de la Religion. S'ils avoient à fléchir Dieu, à le prier ou à le remercier, ilss'impofoient des jeûnes, car ils les croyoient également utiles pour témoigner leur reconnoiffance, pour expier leurs péchez, & pour obtenir des gra-ces. On vit David (b) le plus faint des Rois s'humilier devant Dieu par le jeûne. L'impie Achab (c) s'en fervit à propos, pour éviter le jufte châtiment dont il étoit menacé, & le jeûne mérita au pieux Jofaphat (d) une victoire, qui paroiffoit impoffible fans le fecours du Ciel. Ce fut encore par le jeûne qu'Efther (e) fauva fon peuple, & Judith (f) Bétulie; qu'Efdras (g) & Nehémie( b ) garantirent le peuple, & rétablirent Jérufalem. Le peuple lui-même s'y condamnoit dans les calamitez (i), il y trouvoit une reffource affurée, & nulle pratique ne lui paroiffoit fi propre,

(a) Polydor. Vergil. p. 414. (b) Rois, 2. 1. c. 12. v. 16. (c) Rois, 3.1. c. 21. (d) Paralipp. 1. 2. C. 20. v. 16. (e) Efther. c. 4. (ƒ) Judith, c. 4(8); Efdr. 1. 1. c. 8. (h) Nehem. c. 1, (i) Juges, c. 20%

pour témoigner fon refpect pour la loi de Dieu; ainfi on le vit gémir & jeûner en écoutant lire cette loi par la bouche d'un prophête (a). On fe préparoit encore par le jeûne aux grandes fêtes & aux actions d'éclat, d'où vinrent les jeûnes des 4. §. 7. & dixième mois ( b ) parmi les Hébreux; les femmes Juives faifoient du jeûne l'objet de leur piété, ou la matiere de leurs vœux (c). Ce ne fut enfin qu'après un long & pénible jeûne, que tant de merveilles furent révélées au prophête Daniel (d), & qu'Elie (e) en opera tant d'autres. La piété dès lors trouvoit fa fureté & fa force dans le jeûne. Ce fut par fon moyen, par exemple, que les enfans de Jonadab (f) fe rendirent fi eftimables, & que les Effeniens (g) fe firent dans la fuite fi fort admirer, qu'on les a même foupçonnez (h) d'avoir moins été les difciples de la Synagogue, que ceux de Jesus-Chrift. Mais les chrétiens auroient-ils pû eux-mêmes faire davantages, en matiere de jeûne, que les Juifs, fi on en jugeoit uniquement par les dehors, veu que ceux-ci n'en crai

(a) Baruch. c. 1. (b) Zachar. c. 8. 19. ( c ) Nombr. c. 30. v. 14. (d) Dan. 10. (e) Rozs, 1. 3. c. 19. &c. (f) Jerem. c. 35. (g) Philo. (h) Hie ronym, adverf. Jovin.

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gnoient rien pour leur fanté, & qu'ils aimoient mieux mourir que d'y manquer? Car ce fut par refpect pour une forte de jeûne, que Daniel (a) refufa au péril de fa vie d'user de viandes défendues, pour le faire de l'embonpoint: ce fut encore pour n'avoir point voumanger de la chair de porc, que. le faint vieillard Eleazar (b),se condamna généreufement à perdre la vie; la moindre diffimulation même lui parut un crime en cette occafion; de forte qu'il aima mieux mourir que de prévariquer, en feignant d'obéir. Ce fut à de pareilles épreuves qu'on mit les généreux Machabées & leur fainte mere (c); mais la vie leur parut méprifable, comparée au plaifir de mourir fidéles.

Les idées que les Payens s'étoient faites du jeûne, reffembloient affez à celles des Hébreux. Comme eux ils jeûnoient pour honorer leurs dieux, pour les appaifer, pour leur rendre graces: Et apud paganos funt jejunia (d). A l'imitation peut-être du faint légiflateur des Juifs, (car combien de chofes avoient-ils empruntées du peuple

(a) Dan..c.1. v.. 11. (b) Macchab. 1 2. c. 6, (c) Ibid. c. 7. &c. (d) S. Leo. ferm. 2. de jejun.

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