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Mr de la Motte avoir raison. La conféquence n'eft pas bien difficile à tirer; il a donc tort : & voilà la majeure secrete de tous les fyllogifmes de MD.

De la Narration & de la Répétition.

On ramene encore ici l'Ecriture fainte pour juftifier la narration d'Homere, des défauts que je lui impute, & fur tout des répétitions. J'ai dit dans ma prémiere Partie, ce que je penfois de ce parallele; & me réservant à faire un ufâge plus utile des Livres faints, je prie Mc D. de trouver bon que je les écarte refpectueusement d'une difpute auffi frivole que la nôtre : qu'ont-ils à faire avec Thétis qui chaffe les mouches du corps de Patrocle, & avec Junon qui fe pare pour tromper Jupiter.

Elle n'a donc qu'à combattre fimplement mes principes en eux. mêmes, qu'à examiner fi, comme je l'ai dit, la narration du Poëte & celle du fimple Historien doivent être différentes. Si celui-ci ne s'eft pas acquitté de fon devoir quand il a dit exactement & nettement la vé

rité ; & fi celui-là n'eft pas obligé de choifir entre les chofes vrai-femblables, celles qui peuvent plaire, & d'écarter tout l'indifférent pour raprocher ce qui intéreffe. Si ces principes font faux, Homere eft irréprochable, mais s'ils font vrais, qu'on les life dans Mc D. même, & qu'on le juge.

Quintilien le louë d'une excellente précision fur cet endroit d'Antiloque à Achille: Patrocle eft mort. Cette loüange eft très-jufte; mals je l'employe comme la meilleure cenfure de plufieurs autres endroits de l'Iliade, où le Poëte s'appéfantit fans égard fur les circonftances les plus indifférentes.

Rien ne décele plus l'efprit des partifans outrez de l'Antiquité, que l'envie de justifier, jufqu'aux répétitions de l'Iliade. Ce feroit une folie après cela d'espérer la moindre compofition avec eux, nous aurions beau rabattre de nos dégoûts, pour avoir la paix, tant que nous ferons ennuyez des répétitions nous ne fommes pas dignes de leur alliance.

En vérité ce préliminaire eft bien difficile à paffer. Le moyen de convenir qu'il ne foit pas mieux de dire qu'un mes=fager s'acquitta fidellement de fa commiffion, que de répéter mot pour mot le difcours qu'on l'a chargé de faire, & que le Lecteur fçait déja: Encore s'il n'y avoit que cette espece de répétition, on en seroit quitte pour paffer le discours déja connu, mais il y en a plus de dix autres efpeces beaucoup plus vicieuses, dont Mc D. n'a pas dit un mot, & fur lef quelles il lui faudra interroger Euftathe & Denys d'Halicarnaffe, fi elle entreprend de les juftifier. Homere, par exemple, décrit la maniere dont Pâris s'arme pour combattre Ménélas, & il employe ailleurs la même defcription pour un autre Héros. Le même facrifice revient plus d'une fois, la même peinture fert à plufieurs batailles. Dans le combat des Dieux, un des combattans dit à fon adverfaire les mêmes fanfaronades que quelque Grec a dit à un Troyen. Il n'y a que deux ou trois formules pour la mort de plus de deux cens hommes.

Qu'allegue-t-on pour fauver tout

cela? Prémierement, la pratique d'Ho. mere qui avoit plus d'efprit que nous. Cette raison est décifive; mais on veut bien encore nous en donner d'autres par furabondance de droit. Ceux qui ont recueilli les Ouvrages d'Homere, n'ont point retranché ces répétitions ; ils les ont donc jugez raisonnables. Deux réponses: la prémiere, que hors les difcours des meffagers qu'il eut été facile de retrancher, il n'étoit pas poffible de fupprimer les autres répétitions, fans fubftituer quelqu'autre chofe à la place, ç'auroit été faire un nouvel Homere. La feconde, qu'on refpectoit fes Poëmes par d'autres endroits; qu'on rendoit même une espèce de culte religieux à leur auteur; & qu'ainfi c'eft la fuperftition & non le plaifir qui a confervé le tout. On ajoûte que ces répétitions n'ont pas ennuyé les grands Hommes qui ont jugé d'Homere. Cela ne fignifie autre chofe, finon que ces grands Hommes n'en ont rien dit; & l'on qualifie gratuitement leur filence d'approbation. Mais Macrobe, dit-on, les a louées expreffement. Je ne fçaurois qu'y faire: Macrobe & M© D. n'empêcheront

n'empêcheront pas que la plupart des hommes n'en foient bleffez; & ce qu'il y a de pis, qu'ils ne rendent de bonnes raifons de leur dégoût.

Mc D. fe récrie fur le retranchement que j'ai ofé faire d'une de ces répétitions. Ulyffe preffe Achille de rendre son secours aux Grecs; il avoit à lui faire le détail des offres d'Agamemnon; mais Agamemnon venoit de faire lui-même ce détail dans le confeil des Rois: ainfi pour éviter la redite, je me fuis contenté de dire qu'Ulyffe fit à Achille le détail des offres de fon Général. Me D. prétend qu'il faloit répéter le discours qu'on vient de lire un instant auparavant. Com ment Achille, demande-t-elle, peut-il fçavoir ce qui s'eft paffé dans le confeil où il n'étoit pas comment il le peut fçavoir, Me? parce qu'Ulyffe le lui dit.

?

Vlyffe en cet endroit De tous les dons offerts fait un détail adroit. Qu'est-ce qui vous arrête là? Ne fçauriez-vous croire le Poëte fur fa parole? quand il dit expreffément qu'un homme fit à un autre le même discours II. Partie.

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