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mes remarques fur Homere, la nottë capitale d'impiété, je ne fçaurois, à l'entendre, condamner quelques comparaifons, ni les répétitions mêmes de l'Iliade, fans me rendre fufpect d'héréfie. Heureusement je fuis bien raffuré de ce côté-là. Beaucoup de Théologiens, des Archevêques mêmes, puifqu'il en faut, ont lû mon Ouvrage, & ils m'ont félicité pofitivement de ce que j'ai dit làdeflus.

Je vais donc une fois pour toutes faire ma declaration fur l'Ecriture, afin de ne la plus mêler dans une difpute prophane, & où l'on eft fcandalifé, je le repete, de la voir entrer.

L'Ecriture ne nous a point été donnée pour nous rendre fçavans, encore moins pour amufer nôtre imagination. Je n'y cherche point à devenir Phyficien, ni Aftronome, ni Poëte, ni Orateur. J'ai donc lû tous les Livres Saints, quoique Mc D. fe plaife à croire que je les ignore: je les ai étudiées comme la science de l'unique néceffaire, comme la fource divine de la doctrine & des mœurs, mais nullement comme une poëtique, aliment frivole

frivole de l'imagination des hommes. J'avoue que je lis Homere avec des fentimens bien oppofez: & quoique quelques Ecrivains que Me D. adopte, veüillent qu'on le life comme les Prophetes, en cherchant les grandes véritez cachées fous fes fables, je le regarde au contraire, comme un organe du pere du menfonge, dont il s'eft fervi, non pas pour établir le Paganisme, ainfi que Mc D. me le fait dire, mais pour en fortifier l'extrava gance & l'abfurdité.

Un fçavant Théologien avoit déja reproché à Mr Dacier, le deffein apparent de chriftianifer quelques Philofophes Payens; d'avoir voulu faire des œuvres de Marc Antonin, un livre de piété ; d'a voir dit, que quand on juge de Socrate par les véritéz qu'il a connuës, on ne fe contente pas de dire qu'il étoit grand Philofophe 3 mais qu'on eft prefque tenté d'affurer qu'il étoit Prophete,& que Dieu lui avoit révélé les Myfteres qui devoient être accomplis. D'avoir ajoûté fur les Stoïciens, qu'il n'y a rien de plus parfait que leurs maximes: &qu'après l'Ecriture Sainte, rien ne méritoit davantage d'être mis entre les mains des I. Partie.

C

hommes. Sans doute l'amour de Mr Da cier pour la vérité & la vertu, lui en ont groffi les apparences dans les Philofophes Payens, où il a pris l'ombre pour le corps. Mais que diroit ce Théologien critique, s'il avoit vû dans Me D. qu'Homere avoit trouvé le denouement de la Prédeftination & de la liberté de l'homme? Voilà une preuve bien fenfible des excez où nous jettent de fauffes conformitez : jugeons plus fimplement-des chofes, ne cherchons la vérité qu'où elle eft sûrement, & n'érigeons point des fictions & des bagatelles en réalitez importantes & refpectables: il ne faut point mettre l'Arche auprès de Dagon, l'idole se brisera infailliblement.

Si l'on fe contentoit de trouver entre l'ouvrage Divin & l'ouvrage Payen quelque rapport de ftile, comme une preuve hiftorique du génie commun des Orientaux ; fi l'on n'y cherchoit qu'à véri fier des ufages & des mœurs, rien ne seroit plus raifonnable: mais d'aller jusqu'à vouloir faire respecter les plus grandes folies d'Homere par les miracles de l'Ecriture, & par quelques figures des Pro

phetes, par exemple, le cheval parlant d'Achille par l'âneffe de Balaan, les Hommes combattans contre les Dieux, par Jacob luttant contre l'Ange, le fonge d'Agamemnon, par celui d'Acab, &c. j'avoue que c'eft ce que j'ai trouvé fcandaleux, & j'ai dit fur cela un mot dans mon Difcours auquel M D. n'a pas répondu. Les vrais caracteres de la Divinité, font pofez en principes en tant d'endroits de l'Ecriture Sainte, que quand les Auteurs facrez viennent à employer les figures, on les reconnoît d'abord pour ce qu'elles font, & on ne les aprétie que ce qu'elles valent: au lieu que dans Homere ces prétendues figures font elles mêmes les principes, & qu'il n'y a rien qui avertiffe l'efprit de ne les pas prendre à la lettre. Si je difois làdeffus, comme Me D. le fait souvent à mon égard, qu'après ma remarque, je fuis furpris qu'elle ait ofé revenir à fon paralelle, elle trouveroit fans doute que J'aurois mauvaife grace, j'en conviens, cela ne fied bien qu'à elle.

Je penfe donc avec Mr l'Archevêque de Cambray, que les Dieux de l'Iliade

ne valent pas nos contes de Fées : C'est pourtant de ce merveilleux puérile que nous difputons Me D. & moi. Cette quef tion dont on fait tant de bruit est peutêtre la plus frivole qui puiffe occuper des gens raisonnables, & j'ai grande peur qu'elle ne foit mife un jour au rang des paroles oifeuses.

De l'ignorance du Greċ.

Ais, me dit Me D. vous ne fçavez pas le Grec; comment avez-vous l'audace de juger d'un Auteur dont vous ignorez la langue? c'eft l'objection qui regne le plus dans fon Ouvrage, celle qui a féduit le plus de gens, & fur laquelle on me croit fort embaraffé peut-être fera-t-on furpris de voir combien elle est frivole dans la question dont il s'agit.

Je ne fais point vanité d'ignorer le Grec, il feroit mieux que je le fçuffe ; cette connoiffance a fans doute fes utilitez; mais elle ne m'auroit fervi de rien dans ce que j'ai fait.

Je fuppofe toûjours dans mon Ouvrage que l'expreffion d'Homere eft éle

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