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FARN

CORBEAU D'ARCHIMEDE SELON POLYBE ET PLUTARQUE

QUI SERVOIT A HARPONNER ET A ENLEVER LES VAISSEAUX

cule, pendant que l'autre fe relevoit ber dans la mer, en coupant le gros cable qui tenoit le vaifleau fufpendu.

& enlevoit le vaiffeau à une certaine hauteur, qu'on laiffoit enfuite tom

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Echec réciproque des Romains & des Carthaginois. Bataille d'Ecnome. Ordonnance des Romains & des Carthaginois, Choc, &

victoire des Romains.

L

il

'Année fuivante Régulus aborde à Tyndaride, & y aiant apperçu la flotte des Carthaginois qui paffoit fans ordre, part le premier avec dix vaisseaux, & donne ordre aux autres de le fuivre. Les Carthaginois voiant les ennemis les uns monter fur leurs vaiffeaux, les autres en pleine mer, & l'avantgarde fort éloignée de ceux qui la fuivoient, ils fe tournent vers eux, les envelopent, & coulent à fond tous leurs bâtimens, à l'exception de celui du Conful, qui courut lui-même grand rifque; mais comme il étoit mieux fourni de rameurs, & plus léger, il fe tira heureusement de ce danger. Les autres vaiffeaux des Romains arrivent peu de tems après, ils s'assemblent & fe rangent de front, ils chargent les ennemis, prennent dix vaiffeaux, & en coulent huit à fond. Le refte fe retira dans les Ifles de Lipari. Les deux partis fe faifant honneur de la victoire, on penfa plus que jamais de part & d'autre à se faire des armées navales, & à fe difputer l'empire de la mer. Pendant toute cette campagne les troupes de terre ne firent rien que de petites expéditions, qui ne valent pas la peine d'être remarquées.

L'été fuivant on se met en mer. Les Romains mouillent à Meffine avec trois cens trente vaiffeaux pontez : (a) de là laif

(a) Les Romains mouillent à Meffine avec trois cens trente vaisseaux. ] Ceux qui n'ont aucune connoiffance de la marine des Anciens, s'imaginent, affez fauffement, que leurs bâtimens de guerre à plufieurs rangs de rames n'étoient pas comparables aux notres de haut bord, & qu'une flotte comme celle dont parle Polybe de trois cens trente vaiffeaux, n'étoit pas affi confiderable en appareil & en dépenfe, que nos armées navales de quatre-vingt vaiffeaux de ligne.

Je conviens que notre armement coûte
Tome I.

infiniment davantage, fi l'on met l'artillerie
en ligne de compte. Mais il ne s'agit point
ici de cela. Il n'eft queftion que du corps
du vaiffeau. Il eft hors de doute que ceux
des Anciens à plufieurs rangs de rames, de-
puis le triréme jufqu'au quinquiréme, & fi
l'on veut, jufqu'au dixiéme rang de lames,
devoient contenir beaucoup plus de monde &
de combattans que les nôtres du premier rang.
Je ne crois pas que les vaiffeaux dont parle
Polybe fuflent autre chole que des birémes.
Toute cette armie, dit-il, parlant des Ro-

N

Bataille d'Ecnome.

fant la Sicile à leur droite, & doublant le cap Pachynus, ils cinglent vers Ecnome, parce que l'armée de terre étoit aux environs. Pour les Carthaginois, ils allérent prendre terre à Lilybée avec trois cens cinquante vaiffeaux pontez. De Lilybée ils furent à Heraclée de Minos. Le but des premiers étoit de paffer en Afrique, d'en faire le théâtre de la guerre, & de réduire par là les Carthaginois à défendre, non la Sicile, mais leur propre patrie. Les Carthaginois au contraire, sçachant qu'il étoit aifé d'entrer dans l'Afrique, & de la fubjuguer, ne craignoient rien tant que cette diverfion, & vouloient l'empê cher par une bataille.

Comme ces vûes oppofées annonçoient un combat prochain, les Romains se tinrent prêts, & à accepter le combat, fi on le leur préfentoit, & à faire irruption dans le païs ennemi, fi l'on n'y mettoit pas obftacle. Ils choififfent dans leurs troupes de terre ce qu'il y avoit de meilleur, & divifent toute leur armée en quatre parties, dont chacune avoit deux noms : la premiére s'appelloit la premiére légion, & la premiére flotte, & ainfi des autres. Il n'y avoit que la quatriéme qui n'en eut pas. On l'appelloit les Triaires, comme on a coutume de les. appeller dans les armées de terre. Toute cette armée navale

mains, étoit composée de cent quarante mille hommes d'équipage, chaque vaiffeau portant trois cens rameurs & fix vingt foldats, c'eft affez pour me faire comprendre que c'étoient des birémes; car de s'imaginer qu'il n'y eût qu'un feul homme à chaque rame, cela me paroît impoffible. A peine cinq hommes fuffifent-ils à chaque banc de nos galéres, & cependant ces fortes de bâtimens ne portent que cinq cens hommes d'équipage. Quelle puiflance que celle de ces deux peuples! Cent quarante mille nommes de mer d'un côté, & plus de cent cinquante mille de l'autre ! Ne droit-on pas que l'h ftorien a romanifé, fi tous les hiftoriens ne convenoient fur ce point? Ce qu'1 y a de bien surprenant, c'eft le peu de tenis qu'ils empio érent à un fi grand armement. L'Auteur dit qu'ils pouvoient mettre alors de plus grandes armées fur mer que quand ils fe trouvérent dans le plus haut point de leur grandeur & de leur opulence. J'aurois fouhaité qu'il nous en eût donné des raifons. Illes remet à un autre endroit, il faut que cela foit perdu.

Plufieurs fiécles après, & vers la décadence de leurs affaires, on voit fous l'empire d'Honorius un Heraclien, Comte d'Afri

que, qui fe mit en tête de détrôner son Empereur; un rebelle, en un mot, qui part de ce païs-là avec une flotte de fept cens voiles, ou plutôt, dit Tillemont, de trois mille fept cens vaiffeaux de toute espéce. Orofe la met un peu au rabais, car il ne l'a fait monter qu'à trois mille deux cens navires, c'est toujours plus que Xerxès n'en avoit, puifqu'Herodote la borne à 1207. de combat. Suppofons que ceux d'Heraclien fuffent plus petits, & que ce nombre de vaiffeaux foit confondu avec ceux de tranfport, il y auroit au moins une moitié de combat. Cela n'eft-il pas furprenant? Il y eut une bataille à Otricoli, dans l'Ombrie, dit Orofe, où cinquante mille hommes demeurérent fur la place, fûrement on ne tua pas tout, & la perie fut fi grande qu'Heraclien fut réduit à un feul vaiffeau fur lequel il porta la nouvelle en Afrique. Charles VỊ. Roi de France, en 1386. voulant porter la guerre en Angleterre, dreffa une flote de douze ou de treize cens voiles; mais la jaloufie du Duc de Berri, oncle du Roi, renverfa une fi grande entreprise avec toute la malice & la lâcheté dont cette paffion eft capable.

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