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Capitaine Général y préfidoit, affifté de dix autres perfonnes
choifies, que
l'on appelloit Demiurgi. La charge de Général
ne duroit qu'un an, fauf à reprendre dans la fuite celui qui l'a-
voit auparavant occupée, fi l'on avoit été content de fon ad-
miniftration. Lorfqu'Aratus fut empoifonné par ordre de Phi-
lippe, il étoit dans fon dix-feptiéme Généralat.

p.

Paufan. in

Le Gouvernement étoit fondé fur peu de loix. La premiére Pol... étoit que l'on ne tiendroit d'Affemblée pour aucun Ambaffa- P. 185. deur, qu'auparavant il n'eût montré fes inftructions par écrit. La feconde, qu'aucune Ville de la République n'envoieroit de Achaic. fon chef & en particulier des Députez à aucune Puiffance étrangére. Par la troifiéme, il étoit défendu de recevoir des préfens Pol. t. 11. de quelque Roi que ce fût. La quatriéme bornoit la durée du P. 1181. Confeil à trois jours, & ordonnoit que le Decret fe fît au quatriéme. La derniére portoit qu'aucune Ville n'admettroit perfonne dans la Ligue, que toutes les autres n'y euffent consenti.

DXXXVI.

Tit. Liv.

Ce que fit cette République de plus important pour mainte- An de Rome nir la liberté, fut le Traité d'alliance qu'elle conclut avec Philippe de Macédoine. Ce Prince avoit brigué cette confédération, pendant qu'Annibal étoit en Italie, prévoiant que de quelque Justin 1. 29. côté que tournât la victoire, tournât la victoire, il avoit tout à craindre du victorieux. Il ne fe déclara pas d'abord, il attendit qu'un parti eût quelque avantage fur l'autre. La bataille de Trafyméne n'eut pas été plutôt gagnée, qu'il envoia au Vainqueur cette Ambaffade fameufe dont Tite-Live rapporte les avantures, & qui 12. fut la caufe de la guerre, que les Romains portérent bientôt après dans la Macédoine. Philippe ne fut pas longtems fans fuccomber à fa mauvaise fortune. Preffé tout à la fois par Attalus Roi de Pergame, par Marcus Valerius & par les Dardaniens, & ne pouvant tenir tête en même tems à tant d'enne- An de Rome mis, il fit fa paix avec les Romains, qui aiant Annibal sur les bras, ne furent pas fâchez de pouvoir différer la guerre de Juftin. 1. 29. Macédoine, jufqu'à ce qu'ils euffent terminé celle qu'ils avoient à foutenir dans leur propre patrie.

DXLIX.

DLVII.

Celle-ci finie, fous prétexte de fecourir les Etoliens, Attalus & les Rhodiens, qui le plaignoient de Philippe, on reprit les armes contre ce Prince. Après fa défaite, Flamininus penfa à An de Rome détacher de lui la Ligue des Achéens. Il n'étoit pas aifé d'y réuffir. Ce peuple étoit très-attaché au Roi de Macédoine, il Tit. Lir. en avoit reçû de grands fecours en différentes occafions; il 32. avoit même, par une loi expreffe, défendu que l'on propofât

Tome I.

f

rien dans le Confeil, qui fût contre l'alliance que la Répu blique avoit faite avec Philippe. Cependant une méchante ha‍ rangue d'Aristéne, alors Général, l'emporta fur toutes ces con fidérations. Philippe fut abandonné, il n'y eut que Dymes, Mégalopolis & Argos qui tinrent bon pour lui. Effet furprenant du bonheur des Romains: fans cette foibleffe des Achéens, jamais peut-être ils n'euffent mis le pied dans la Macédoine.

Comment des Magiftrats fi clairvoians ne prévirent-ils pas, que les Romains ne leur pardonneroient jamais de s'être déclarez contre eux, & qu'ils leur feroient de leur alliance avec Philippe un crime, qu'ils n'expicroient que par la perte de leur liberté ? Ils ne virent leur faute que quand il ne fut plus tems de la réparer. En vain élevérent-ils jufqu'aux nues le Conful, pour la liberté qu'il avoit rendue à la Gréce à Nemée en plein théâtre. En vain fignalérent-ils leur zéle pour les Romains contre Nabis Tyran de Lacédémone, contre Antiochus, contre les Etoliens & les Gallo-Grecs, ils s'apperçûrent bientôt, qu'en faifant alliance avec les Romains, il ne leur restoit plus de leur ancienne liberté, qu'autant qu'ils en uferoient pour étendre la puiffance & la domination de ces impérieux Maîtres.

Sur des plaintes mal fondées de la part des Mefféniens, Flamininus donna le tort aux Achéens, & fit de fanglans reproches à leur Capitaine Général d'avoir ofé mettre le fiége devant Mefféne fans fon ordre. L'Ifle de Zacynthe, qu'ils avoient achetée d'un homme à qui l'on n'en conteftoit pas la propriété, ils furent obligez de la lâcher aux Romains fur une décision de Flamininus, laquelle condamnoit plus les Romains mêmes que les Achéens. Ce Conful compara le Péloponéfe à une écaille, Plut. in Fla- & fes peuples à la tortue qui y eft enfermée; & là-deffus il

min.

Tit. Liv. 1.33.

Id. 1. 38.

pro

nonça gravement, que comme la tortue n'eft en fûreté, contre les infultes du dehors, qu'autant qu'elle ne s'étend pas au-delà de fon écaille, de même il étoit dangereux pour les Achéens de pofféder quelque chofe hors du Peloponéfe. Quel coup de foudre pour le brave Philopomen!

Il eut bien plus à souffrir dans la fuite. Quand le même Conful rendit, au moins en apparence, la liberté à tous les peuples de la Gréce, il fut réglé que les Achéens auroient la garde de toutes les places maritimes de la Laconie. Les Lacédémoniens, malgré ce Traité, aiant infulté une bourgade de la côte, toutes les autres places, craignant pour elles-mêmes, envoiérent aux Achéens des Députez. Philopomen, qui gouvernoit alors, fit

affembler le Confeil, & il y fut conclu qu'on obligeroit les Spartiates à livrer tous ceux qui avoient eu part à l'infraction du Traité. On porte cet ordre aux Lacédémoniens: mais ceux-ci, 1bid. loin d'obéir, députérent à Fulvius, qui étoit à Céphalénie, pour le prier de venir dans le Péloponéfe, & de prendre leur ville fous la protection du peuple Romain. A cette nouvelle les Achéens prennent les armes contre ces rebelles, & ne ceffent pendant tout l'hiver de les harceler.

Pour mettre ordre à ces brouilleries,leConful vient dans le Péloponéfe,leConfeil par fon ordre s'affemble à Elis,& il y eft défendu aux deux partis de fe faire la guerre, jufqu'à ce qu'ils aient député àRome, pour fçavoir les intentions & recevoir les ordres du Ibid. Sénat. Diophanes & Lycortas y allérent de la part des Achéens: celui-ci plein de zéle pour les intérêts de faRepublique,& inftruit par Philopomen, demanda qu'il fût permis aux Achéens d'agir selon leurs loix, & d'ufer de la liberté que les Romains eux-mêmes leur avoient rendue : l'autre, lâche adulateur, fe contentoit que les Romains fuffent les arbitres de la contestation. Le Sénat eut affez de peine à fe déclarer. Il auroit bien voulu qu'il ne fût rien changé de ce qui avoit été réglé au fujet des Lacédémoniens ; mais d'un autre côté il craignoit de choquer les Achéens qui étoient à Rome en grande confidération. Le parti qu'il prit, fut de répondre d'une maniére fi équivoque, que les Achéens crurent avoir obtenu tout ce qu'ils fouhaitoient, & que les Lacédémoniens ne leur crurent pas tout accordé.

Au retour des Députez, Philopomen, interprétant l'oracle ibid. en sa faveur, se met à la tête de ses Achéens, & campé fur les frontiéres de la Laconie, il envoie demander à Sparte les auteurs du défordre qui étoit arrivé l'année précédente fur la côte, promettant que fi l'on fe foumettoit à cet ordre, la ville ne feroit pas inquiétée, & qu'il ne feroit rien fait aux coupables fans avoir entendu leur juftification. Les Lacédémoniens se rendirent au camp, mais on ne leur tint pas parole. Le tumulte commença par les bannis de Lacédémone que Philopomen avoit menez avec lui, & qu'il avoit envie de rétablir. Dix-fept des infracteurs du Traité furent maffacrez fans avoir été entendus, & foixante-trois des autres eurent à peine dit deux mots pour leur défense, que livrez à la multitude irritée, ils perdirent la vie dans les fupplices. On ne fut pas plus fidéle à l'autre partie de la promeffe. Après cette éxécution, Philopomen ordonna aux Lacédémoniens d'abattre les murailles de leur ville,

An de Rome

DLXVI.

Pol to 11.

p. 1.86.

d'en chaffer toutes les troupes auxiliaires, de bannir tous les efclaves que les Tyrans avoient mis en liberté ; & ce qui fut de plus déplorable, d'abolir les loix & les coutumes établies par Lycurgue, & d'élever leurs enfans à la maniére des Achéens.

Nouvelles plaintes de la part des Lacédémoniens. Ils font venir Métellus, qui étoit alors dans la Macédoine. Ce Conful demande un Confeil aux Achéens, qui le lui refusent, en vertu de la loi qui ne le permettoit que pour les Ambaffadeurs qui auroient montré leurs inftructions. Métellus retourne à Rome très-mécontent de ce refus, y méne Areus & Alcibiades, tous deux Lacédémoniens, tous deux très-ennemis des Achéens, & tous trois ensemble irritent le Sénat contre ces derniers. Sur le bruit qui en courut d'abord dans l'Achaïe, Lycortas, alors élû Général, affemble le Confeil, & l'on condamne à mort Areus & Alcibiades.

Peu de jours après, Appius arrive dans le Péloponése, député par le Sénat pour appaifer les troubles, dont ce païs étoit Tit. Liv. 19. agité. Dans le Confeil, Appius, qui avoit avec lui les deux accufateurs Lacédémoniens, fe plaignit de la part du Sénat, que les Achéens euffent mis à mort ceux que Philopomen n'avoit fait venir de Lacédémone que pour les entendre dans leurs défenfes, qu'ils euffent donné ordre de renverfer les murailles de cette ville, & qu'ils euffent aboli les loix de Lycurgue.

Lycortas fut vivement touché de ces reproches. Il étoit plus difficile de répondre là qu'à Rome. Alors il n'avoit affaire qu'aux Lacédémoniens, au lieu qu'ici les Romains mêmes étoient fes accufateurs & fes Juges. Mais il ne fe déconcerta point. Il répondit qu'il étoit furpris que l'on cherchât querelle aux Achéens fur la mort des Lacédémoniens, qui étoient venus pour se défendre; qu'en les faifant mourir, les Achéens n'avoient qu'éxécuté le Traité d'alliance conclu avec les Romains, qui leur avoient confié la garde des places maritimes de la Laconie ; que les Dieux mêmes avoient approuvé cette entreprise, puifqu'ils avoient voulu qu'elle eût un heureux fuc cès ; que d'ailleurs, quand il y auroit eu du crime, les Achéens n'en feroient pas coupables; que ce n'étoit pas eux qui avoient porté leurs mains fur les Lacédémoniens, mais les bannis de Lacédémone. A l'égard des murailles, qu'il étoit étonnant qu'on leur reprochât de les avoir détruites, comme fi elles euffent été bâties par Lycurgue; qu'elles n'avoient été élevées

que depuis peu d'années par les Tyrans pour renverser les loix & les établiflemens de ce Législateur; que s'il revenoit au monde il feroit charmé de les voir abattues, & qu'à ces ruines il reconnoîtroit fon ancienne Sparte; que les Lacédémoniens n'eussent pas dû attendre que que les Achéens les démolîffent, mais plutôt les rafer eux-mêmes, comme la marque infame de leur servitude; que tant qu'ils n'en avoient point eues, ils avoient été libres, & quelquefois les maîtres de la Gréce, au lieu que depuis cent ans, attachez au dedans de leur enceinte comme avec des chaînes, ils avoient vécu dans l'efclavage ; que c'étoit à tort que l'on accufoit les Achéens d'avoir aboli les loix de Lycurgue, qu'il y avoit longtems que les Tyrans en avoient effacé toute mémoire; que les Achéens avoient donné leurs propres loix aux Lacédémoniens, & que c'étoit pour ces derniers beaucoup d'honneur que d'être unis au refte du Péloponése.

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Puis prenant de nouvelles forces & s'adreffant au Député : Je fçai, dit-il, Appius, que le difcours que je tiens, n'est » pas tant d'un Allié qui parle à des Alliez, que d'un esclave qui rend compte à fon Maître. Car pourquoi, je vous prie » fi en nous annonçant par un Héraut que nous étions libres, » on a voulu fincérement que nous le fuffions, pourquoi pen»dant que je ne vous demande pas raifon de ce que vous avez fait après la prise de Capoue, dois-je vous en rendre de la conduite que nous avons tenue à l'égard des Lacédémoniens, après l'avantage remporté fur eux ? Nous en avons fait mou» rir quelques-uns, foit: mais vous, n'avez vous pas fait fauter la tête aux Sénateurs de Capoue? Nous avons détruit des "murailles, cela eft vrai: mais vous en êtes-vous tenus là ? N'avez-vous pas encore ruiné la ville & le territoire ? Nous étions les maîtres, direz-vous, & les Achéens ne font libres que par grace, & qu'autant qu'il nous plaît. Je le fens bien, Appius, & fi l'on ne doit pas en être fâché, je n'en fuis pas fâché. Mais quelque différence qu'il y ait entre vous & » nous, au moins ne nous mettez pas en même rang nous qui fommes vos alliez, & ceux qui font autant vos ennemis que » les nôtres au moins ne traitez pas ceux-ci plus favorable»ment que nous. En leur donnant nos loix, & en les admet» tant dans la ligue des Achéens, nous avons rendu leur condition égale à la nôtre cela ne leur fuffifoit-il pas Mais » non: vaincus, ils ne fe contentent pas de ce qui contenteroit des vainqueurs; ennemis, ils prétendent plus que ne

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