Imágenes de páginas
PDF
EPUB

bre 1849, sous la présidence du prince Louis-Napoléon. Le docteur Véron lui proposa immédiatement de commencer dans le journal le Constitutionnel qu'il dirigeait une série d'articles littéraires paraissant tous les lundis. Ces articles réussirent et donnèrent le signal d'une reprise de la littérature. M. Sainte-Beuve les continua trois ans au Constitutionnel, puis ensuite dans le Moniteur, devenu journal de l'Empire. La collection de ces articles en volumes se fit à partir de 1851, sous le titre de Causeries du Lundi, et elle se continua pendant les années suivantes au point de former en définitive quinze volumes in-18 (1).

« Mais, dans l'intervalle, M. Sainte-Beuve fut nommé professeur de Poésie latine au Collége de

sans fatigue, l'appétit solide même durant ses souffrances, sans répugnance pour aucun mets, pas de délicatesse maladive, un organisme des plus sains, de lésion nulle part, sauf celle produite par la maladie dont il est mort, et qui n'était peut-être pas incurable.

(1) La Table générale analytique qui se trouvait à la fin du XIe volume a été supprimée comme ne remplissant plus son objet par suite des éditions nouvelles de l'ouvrage, à chacune desquelles M. Sainte-Beuve ajoutait quelque chose dans ses articles; enfin les trois volumes qui ont porté de onze à quinze le chiffre de la collection des Causeries nécessitaient une nouvelle Table, qui n'a point encore été faite. M. Sainte-Beuve l'a remplacée dans le XI volume par une centaine de pages des plus piquantes, intitulées Notes at Pensées, dans lesquelles, comme il disait, « il a vidé tous ses cahiers. » Ce sont des jugements et éclaircissements sur ses Contemporains, des pages de Mémoires. - M. Paul Chéron, auteur de la première Table, a composé par cartes la Bibliograpnie de M. Sainte-Beuve encore inédite. Nous devons signaler, parmi

France en 1854, en remplacement de M. Tissot: il fit son discours d'ouverture le 9 mars 1855. Cette leçon d'ouverture, qui fut suivie d'une seconde, fut troublée par des manifestations tenant à la politique, et le cours en resta là. M. SainteBeuve fit ce qu'il devait, et il ne désire point aujourd'hui, sur ce chapitre délicat, avoir à s'expliquer davantage. L'injustice dont il croit avoir été un moment l'objet a été trop amplement réparée et compensée depuis par des témoignages publics de sympathie et d'indulgence.

« Il tint à honneur toutefois de publier la première partie du cours qu'il devait professer. De là le volume intitulé: Étude sur Virgile, un volume in-18 (1857). Le nom de M. Sainte-Beuve a continué de figurer en qualité de professeur titulaire

ce que M. Sainte-Beuve a omis d'indiquer, les quatre articles sur Proudhon, de la Revue contemporaine (octobre, novembre et décembre 1865), qui seront prochainement réunis en volumes. Nous avons eu à publier, depuis la mort de M. Sainte-Beuve, un dernier et nouvel article sur Mme Tastu, qui lui avait été demandé par les éditeurs des Causeries, MM. Garnier, pour l'un des deux volumes extraits de ce Recueil, Galerie de Femmes célèbres. M. Sainte-Beuve s'est fait éditeur, en 1868, à l'Académie des Bibliophiles, d'une Préface aux Annales de Tacite par Senac de Meilhan, suivie d'une Lettre du prince de Ligne à M. de Meilhan. Il y a mis des notes assez vives et un Avertissement. Cette publication doit compter en dernier lieu dans sa Bibliographie. Son dernier article, et qu'il n'a pas achevé, a été sur les Mémoires de M. le comte d'Alton-Shée, son cousin. Ce sont onze feuillets posthumes, qui trouveront place à la fin des Nouveaux Lundis. Un journal (la Cloche, du 15 février 1870) en a déjà eu la primeur.

sur les affiches du Collège de France, mais il a depuis longtemps renoncé à tous ses droits.

« Le ministre de l'instruction publique, M. Rouland, nomma M. Sainte-Beuve maître de conférences à l'École normale supérieure, afin d'utiliser ses services. M. Sainte-Beuve a rempli ces fonctions très-exactement à l'École normale pendant trois ou quatre ans (1858-1861).

« C'est alors que sa plume de critique et de journaliste fut réclamée de nouveau par le journal le Constitutionnel, et il y reprit ses articles littéraires du Lundi à dater du 16 septembre 1861. Il remplit de nouveau toute une carrière, et la série de ces articles, recueillis à partir de 1863 sous le titre de Nouveaux Lundis, ne forme pas aujourd'hui (1868) moins de dix volumes qui auront même une suite.

« La fatigue ne laissait pas de se faire sentir. L'Empereur voulut bien conférer en avril 1865 (1) à M. Sainte-Beuve la dignité de sénateur. M. Sainte-Beuve est, depuis le 11 août 1859, commandeur de la Légion d'honneur (2).

« Sa santé altérée, et d'une manière qui paraît devoir être définitive, lui avait peu permis d'intervenir dans les discussions du Sénat, lorsque des

(1) Le décret est signé du 28.

(2) Le 31 janvier 1867, le Bureau du Journal des Savants élut Sainte-Beuve en remplacement de M. Cousin.

[ocr errors][merged small]

circonstances qui intéressaient vivement ses convictions l'y ont en quelque sorte obligé. Le rôle qu'il y a pris et qui a fait de lui comme le défenseur déclaré de la libre pensée a été moins le résultat d'une volonté réfléchie que d'un mouvement irrésistible.

« Il me semble que c'est assez pour une fois et que je suis rassasié d'en prendre. Tout à vous, mon cher Monsieur,

« SAINTE-BEUVE. »

J'ai différé jusqu'à présent de parler du père de M. SainteBeuve. Je vais le faire avec plus d'étendue ici que ne me l'eût permis plus haut le cadre restreint d'une note. CharlesFrançois de Sainte-Beuve (ce sont ses nom et prénoms que je copie sur son extrait de naissance) était né, comme nous l'apprend son fils, au bourg de Moreuil en Picardie (aujourd'hui département de la Somme, arrondissement de Montdidier), le 6 novembre 1752. Son père, Jean-François de Sainte-Beuve, y était contrôleur des actes; sa mère s'appelait Marie Donzelle. Il n'était pas l'aîné de ses frères ou sœurs, et il en eut bien d'autres, en tout sept enfants. M. Sainte-Beuve nous a souvent raconté dans quelles circonstances il avait fait connaissance de l'un de ses oncles paternels: c'était la première personne qu'il avait vue en arrivant à Paris, en 1818. Cel oncle demeurait place Dauphine; il y occupait une maison à

son neveu.

lui tout seul: il était marchand de vin (4). Mme Sainte-Beuve conduisit son fils chez son beau-frère, qui était un brave homme, et la conversation roula sur le choix d'un professeur qu'il fallait donner au jeune homme pour le perfectionner dans ses études, en attendant le collége. L'oncle leur parla alors d'un savant qu'il connaissait dans le quartier SaintJacques, un ancien prêtre qui s'était marié à la Révolution, et qui avait siégé à la Convention. Il donnait aujourd'hui des leçons de latin et de grec (on était en 1818), et il élevait luimême son fils, qui avait reçu de lui une très-bonne éducation. Mais, par exemple, « il le mène à la baguette, il est très-sévère, » c'était un avis amical donné par l'oncle à On conduisit le jeune Sainte-Beuve chez ce professeur, qui avait en effet le ton rude et autoritaire (comme on dirait aujourd'hui) des anciens jours. Son fils ne lui résistait pas c'était encore un enfant. Sur l'ordre de son père, il monta sur la table et déclama, sans se tromper, tout un chant d'un poëme antique latin ou grec (M. Sainte-Beuve désignait même le chant du poëme, que j'ai oublié), — et du reste le fils de l'ex-conventionnel était capable des deux langues. Le père était émerveillé de son fils en l'écoutant, mais il ne le montrait pas trop ce jeune homme qui était déjà si instruit, et qui tremblait devant son redoutable père, devait être un jour le spirituel écrivain et rédacteur du Journal des Débats, M. Philarète Chasles. Il eut depuis bien d'autres vicissitudes; il fit un séjour forcé à Londres pour échapper à une accusation de complot à Paris sous cette même Restauration, où, lui dit son père, « ton avenir, avec mon nom, est

(1) Il se nommait François-Théodore de Sainte-Beuve : je relève son nom sur le contrat de mariage de M de Sainte-Beuve père. où il est mentionné comme absent de Boulogne (le 29 ventôse an XII, 20 mars 1804). C'était le dernier né de la famille. Sa qualité de marchand de vin, demeurant à Paris, me le fait reconnaître. -Nous savons aussi par M. Sainte-Beuve qu'après la mort de son père, une de ses tantes du côté paternel était venue se joindre à sa mère, veuve dès le huitième mois de son mariage, et avait contribué à l'élever. C'est de cette sœur de son mari qu'il est question dans la lettre citée plus haut du chef d'institution, M. Landry, à Mme Sainte-Beuve mère.

« AnteriorContinuar »