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à Paris de lui payer la fomme cédée dans un délai, & obligea non-feulement les biens des pupilles, mais les fiens propres.

En vertu de ce contrat, Anne de Correau, exécucutée fur fes biens particuliers, forma inftance devant le Sénéchal d'Armagnac, en caffation de la faifie. Elle impétra des Lettres, pour être relevée par le Velléïen de l'obligation par elle contractée; ce qu'elle obtint par Sentence du 5 Mai 1626. Son Adverfaire fut appelant. Il y eut d'abord partage au rapport de M. de Chalvet. Mais le procès porté de la feconde Chambre des Enquêtes à la premiere, la Sentence fut confirmée, parce que, comme le dit Cujas fur la Novelle 22, quoique la mere, d'après les Lois Romaines, ne puiffe être tutrice fans renoncer au Velléïen, cette renonciation n'eft faite & n'eft requife qu'en faveur des pupilles, la tutelle étant une espece d'interceffion.

Vous trouverez dans M. de Catellan, liv. 4, ch. 49, un Arrêt du 5 Mars 1665 qui approuva cette décifion, & lors duquel on convint, à la premiere Chambre des Enquêtes du même Parlement, qu'une mere tutrice de fes enfans, pouvoit être relevée par le Velléïen de l'obligation confentie de fes biens propres pour fes enfans: mais on crut, & on jugea, par ce même Arrêt, que le créancier de la femme ne pouvoit pas fe fervir du Velléïen, invitá muliere, & M. de Catellan en donne les raifons.

Le Velléïen eft fi favorable aux femmes, que quand elles auroient fait ferment de ne pas revenir contre l'obligation, elles ne feroient pas moins reçues à fe pourvoir par icelui. Il y a plufieurs Arrêts qui l'ont jugé de même ; Papon en rapporte un, liv. 12, tit. 5, Arrêt 9, & tit. 6, liv. 9, Arrêt 23, & cela, & cela, comme le dit M. de Larroche-Flavin, liv. 5, tit. 2, parce que dum renuntiat decipitur, Lege Doli, §. Diverfum, ff. de novat. Lege Interdùm, ff. de minoribus, & eádem facilitate quá fidejubet, eádem exceptione re

nuntiat. Et d'ailleurs, ajoute-t-il, promissio non poteft plus operari quàm folutio; il rapporte un Arrêt conforme de 1578.

Quoique par le Droit Romain l'obligation que la femme confent pour autrui foit nulle, elle ne feroit pas reçue à alléguer la voie de nullité contre l'obligation, fi elle n'impétroit des Lettres pour faire anéantir le contrat qui la contient. Bacquet, Traité des Droits de Justice, chap. 21, nomb. 117; Papon, liv. 16, tit. 3, art. 11, rapporte un Arrêt du 14 Août 1543, & enfuite il dit qu'on n'excepte de cette regle que trois efpeces de contrats, ceux qui font ufuraires ceux qui font fimoniaques, & ceux qui font faits contre la Coutume écrite & reçue, ou contre la difpofition expreffe de l'Ordonnance.

Elle doit faire cette impétration dans les dix ans de la date du contrat, parce que c'eft un délai fatal après lequel les actions refcifoires font prescrites. Cette reftitution par le Velléïen, dit M. de Catellan liv. 5, chap. 17, doit être demandée dans les dix ans, à compter de la date du contrat où la femme a cautionné; il y a un Arrêt qui le décida ainsi après partage, porté de la feconde à la premiere des Enquêtes, Rapporteur M. de Lanes, Compartiteur M. de Seveins, rendu le 3 Septembre 1667, en la caufe de la Dame de Montaut, contre Navarrenc Salanes, héritiere de Lavarine Dutrai.

Cet Auteur ajoute que cette décifion eft contraire à l'avis du Préfident Faber, liv. 7, tit. 13, déf. 6, mais que dix ans font le terme naturel des actions refcifoires. Il peut être cependant des cas où ce terme de dix ans pourroit ne pas être absolument fatal, & pour lesquels la femme feroit recevable. Pour ne pas nous répéter, nous renvoyons notre Lecteur à ce que nous avons dit plus haut, en traitant des Lettres en refcifion.

CHAPITRE X X I V.

Des cas auxquels les femmes doivent être privées de la faveur du Velléïen.

LES femmes ne doivent pas être admifes au bé

néfice du Velléïen, lorfqu'elles ne fe font obligées que pour leur utilité, qu'elles n'ont fait que leurs propres affaires : Quia quodammodò negotium fuum geffiffe videtur, Senatûs-Confulti Auxilio non adju vetur, Lege 6. in princ. Cod. ad Senat. Conf. Vel. Voilà le grand principe pour juger de tous les cas : mais, pour mieux fentir la chofe, fourniffons des exemples, & disons qu'une femme ne peut jouir du fecours du Velléien.

1o. Lorfqu'elle s'eft obligée pour faire fortir fon mari de prison. Vous pouvez voir à ce fujet Chenu, centur. premiere, quest. 52; Papon, en fes Arrêts, liv. 12, tit. 5, Arrêt 8; Bacquet, Traité des Droits de Juftice, chap. 21, nomb. 123; Charondas, en fes Réponses, liv. 11, chap. 38; Chopin, de Sacra Politia, liv. 3, tit. 8, nomb. 5; le même, de Moribus Parifiorum, liv. 2, tit. premier, nomb. 17; Faber, au Code, liv. 4, tit. ad Senat. Conf. Vel. 21, déf. 16 & 21; Brodeau fur Louet, lettre A, ch. 9; Bouvor, tom. 5, verbo Mariage, queft. 58.

Quand une femme s'oblige pour faire fortir fon mari de prifon, la préfomption de la Loi eft que c'eft pour l'utilité de fon ménage; qu'elle le fait pour fes affaires propres. Voilà pourquoi le fecours du Velléïen doit lui être refufé, & encore par les raisons prifes des Lois 20 & 21, ff. folut. matri. On ne regarde pas comme perte pour la femme l'emploi

qu'elle fait de fa dot à une fi louable & fi jufte

caufe.

C'eft pourquoi Chopin, au lieu cité, dit que, par la même raison qu'un fils de famille mineur peut s'obliger pour retirer fon pere emprisonné pour dettes, & cela fans efpérance de pouvoir être reftitué, que fes biens peuvent même être vendus pour cet objet, il faut aufli que la femme puiffe s'obliger dans ce cas, fans pouvoir être relevée, quand bien même elle n'auroit pas renoncé au bénéfice du Velléïen, par la raifon que non perditura eft uxor pietatis officio fungens & il cite des Arrêts rendus par le Parlement de Paris.

C'est la même façon de penfer de Louet, lettre A, nomb. 9; mais il prend fon motif dans une autre Loi, qui eft la Loi-Veterum 24, Cod. ad Senat. Conf. Vel., par laquelle la femme qui s'étoit obligée envers un maître pour obtenir la liberté d'un efclave, étoit privée du fecours du Velléïen, favore libertatis ; & il en conclut que fi une femme pouvoit s'obliger valablement pour un pareil objet, il faut bien qu'elle le puiffe mieux, quand il s'agit de la liberté de fon époux détenu en prison; à quoi il faut ajouter que ce que la liberté, par rapport à la prison, peut avoir de moins favorable que la liberté par rapport à la fervitude, doit être compenfé avec la faveur que mérite la qualité d'époux vis-à-vis d'une esclave.

Chenu, centurie premiere, queft. 52, ne craint point de pofer en principe que, dans tous les cas, que fubeft caufa pietatis ceffat reftitutio; & il cite, pour affurer cette maxime, un Arrêt du Parlement de Paris, prononcé en robe rouge, qui jugea qu'un fils de famille mineur pouvoit renoncer au douaire coutumier qu'il avoit fur l'héritage de fon pere, & confentir que l'héritage fût vendu fans la charge du douaire, pour délivrer fon pere d'une prifon où il étoit détenu pour dette.

Si nous ouvrons Mornac, fur la Loi 2,ff.de Jure dot. nous y trouverons un Arrêt bien plus fort. Une femme avoit formé une demande en reftitution envers la garantie à laquelle elle s'étoit obligée à raison d'une vente des fonds du mari réduit aux dernieres extrêmités. Il n'étoit point allégué de prifon. Il étoit fimplement dit : marito in graviffimo ære & ad fupremam tabulam redacto; ce qui fembloit n'annoncer qu'une abfolue néceffité de faire ceffion des biens. Cette femme fut déboutée de fa demande en reftitution.

M. de Catellan, liv. 4, chap. premier, nous dit, que toute la Jurifprudence que nous venons d'établir fut reconnue dans une affaire à fon rapport, jugée à la Grand'Chambre du Parlement de Touloufe le 5 Janvier 1679, en faveur de la demoiselle Senac, contre la demoiselle de Vianés, femme de Jean-Bernard Marchand. Celui-ci avoit été emprisonné pour prêt à la requête de demoiselle Senac, & étoit forti de prifon à la faveur d'un emprunt fait par la Vianés fa femme, qui impétra contre l'obligation, & qui après bien des difcuffions, fut déboutée.

La queftion, nous dit Papon, liv. 12, tit. 5, Arrêt 8, a été diverfement jugée, & il le prouve : mais il n'eft pas moins d'accord de notre Jurifprudence, & cite un Arrêt qui y eft conforme du 14 Août 1582. Il en cite encore un autre à l'art. XI, rendu contre une mere qui s'étoit obligée pour fortir fon fils de prifon, & il dit; que dans ce cas elle est eftimée s'être obligée pour elle-même : cùm mater & filius eadem cenfeatur perfona, quo cafu non habet locum Velleianum. Lege Aliquando, Cod. Ad Vel.

Si la femme, dit M. de Catellan au lieu cité, peut valablement, & fans espérance de reftitution, obliger fa dot pour la liberté de fon mari détenu en prifon pour dettes, que ne peut-elle, & que ne doit-elle pas faire lorfqu'il eft détenu pour crime? Elle doit en cette occasion ne rien épargner pour fon relaxe. L'a

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