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Jugement en dernier reffort, eft une barriere infurmontable à tout Plaideur.

Mais les Parties qui ont été condamnées par des Jugemens en dernier rèffort, peuvent être dans des efpeces fi favorables, qu'il étoit auffi de la bonté & de la justice du Roi, de ne pas les laiffer fans aucune reffource; mais encore s'il étoit de fa juftice de réferver des voies pour pouvoir attaquer les Jugemens des Souverains, falloit-il auffi que fa fageffe empêchât qu'on ne pût abuser de sa bonté. C'est par cette raison que si, d'un côté, il a permis aux Parties de demander à fes Chancelleries des Lettres en vertu defquelles elles peuvent attaquer la décifion définitive des Souverains, il étoit bien juste que de l'autre il déterminât par fa Loi quels feroient les feuls moyens qu'elles pourroient employer, & cela devant la même Cour où les Arrêts ou Jugemens auroient été rendus.

Voilà quel a été le premier objet de sa sagesse, & c'eft celui-là qu'il a voulu remplir par toutes les difpofitions contenues à fon titre des Requêtes civiles, difpofitions que nous allons analyfer & expliquer, en répondant aux questions que nous allons nous faire à nous-mêmes.

QUESTION S.

1o. Quels font les Arrêts & Jugemens en dernier reffort que les Parties peuvent attaquer par la voie de la requête civile ?

2o. Dans quel délai doivent-ellés fe pourvoir par rapport à l'état de leurs perfonnes?

3°. Quels font les moyens permis qu'elles peuvent employer, & que l'Ordonnance appelle ouvertures de requête civile ?

4°. Quelles font les formalités qui doivent précéder & fuivre les impétrations des requêtes civiles?

5o. Où est-ce que les requêtes civiles doivent être plaidées, & comment faut-il les plaider?

6°. Quels font les effets du démis des requêtes

civiles?

7°. Quels font ceux de leur entérinement? Reprenons chacune de ces questions en particulier.

CHAPITRE

XXX VII I.

Quels font les Arrêts & Jugemens en dernier reffort que les Parties peuvent attaquer par la voie de la Requête civile.

POUR nous bien fixer fur ce point, il faut d'a

bord pofer en principe qu'il eft des Arrêts & Jugemens en dernier reffort, contre lefquels on a la voie ordinaire à prendre, qui eft celle de l'oppofition; d'autres contre lefquels on n'a que la voie extraordinaire de la Requête civile. Il faut donc commencer par développer quels font ceux qu'on peut emporter par la voie ordinaire de l'oppofition, avant de nous occuper de ceux contre lefquels nous ne pouvons nous pourvoir que par celle de la requête civile.

Avant l'Ordonnance de 1667, on avoit trois moyens pour faire réformer les Arrêts ou Jugemens fouverains devant les mêmes Juges qui les avoient rendus, 1°. l'oppofition : 2o. la requête civile: 3o. les propofitions d'erreur. Aujourd'hui il ne nous en refte plus que deux. L'article XLII du titre des Requêtes civiles ayant abrogé les propofitions d'erreur, défendu aux Parties de les obtenir, & au Juge de les per

mettre.

Encore pour ufer de ce troifieme moyen, falloit

il, pour l'employer utilement, que les erreurs qu'on vouloit relever confiftaflent en fait. La propofition d'erreur de droit n'étoit pas admife, étant infultante à une Compagnie fouveraine, en qui l'ignorance du droit ne peut être préfumée.

En fuppofant même que les Arrêts préfentaffent des obfcurités ou des difpofitions fufceptibles de plusieurs fens, il n'eft pas feulement permis aux Parties de demander aux Cours qui les ont rendus de les interpréter. Elles n'ont que la voie de la requête civile; « Voulons, dit la Déclaration du Roi du 21 Avril » 1671, que l'article premier du titre des requêtes » civiles de notre Ordonnance, foit exécuté. Or>> donnons que les Arrêts & Jugemens en dernier ref» fort ne pourront être rétractés que par Lettres >> en forme de requête civile, à l'égard de ceux qui >> auront été Parties, ou dûment appelés, ou de leurs >> héritiers, fucceffeurs & ayant-cause. Faisons dé» fenfes aux Parties de fe pourvoir contre lefdits » Arrêts par requêtes, à fin d'interprétation d'iceux >> ni autrement que par requête civile, à peine de >> 500 liv. d'amende, qui ne pourra être modérée » & à toutes nos Cours de rétracter lefdits Arrêts, » & d'en changer les difpofitions par maniere d'in»terprétation ou autre voie.»

Il ne nous refte donc que l'oppofition & la requête civile. Dans quel cas pouvons-nous faire ufage de la premiere ? Dans quel cas la feconde peut-elle être employée ? C'est ce que nous allons expliquer, d'après les difpofitions des art. II & III du titre XXXV de l'Ordonnance de 1667.

Nous pouvons nous pourvoir par la voie simple de l'opposition contre les Arrêts ou Jugemens en dernier reffort,

1o. Lorsqu'il s'agit d'un Arrêt ou Jugement en dernier reffort, dans lequel nous n'avons pas été Partie.

2o. Lorfque nous n'y aurons pas été dûment appelés.

3o. Lorsqu'il a été rendu fur requête contre nous & fans nous.

4°. Lorfqu'il a été rendu fur utilité de défaut à l'Audience, à fuite d'un défaut pris au Greffe, faute par nous de n'avoir pas fait préfenter un Procureur fur les affignations à nous données, ou encore quoiqu'ayant Procureur en cause, l'Arrêt ou Jugement a été rendu faute de plaider à l'Audience.

Dans tous ces cas, nous avons la voie simple de l'oppofition pour les faire rétracter; mais dans les deux derniers cas, c'eft-à-dire, lorsque l'Arrêt ou Jugement eft rendu à l'Audience fur utilité de défaut, ou faute de plaider, nous ne pouvons user de la voie fimple de l'oppofition, qu'autant que nous donnerons notre requête tendante en oppofition & rétractement dans la huitaine de la fignification de l'Arrêt à notre perfonne ou domicile. Telle eft la Loi portée par l'article III du titre des Requêtes civiles de l'Ordon

nance.

D'où fuit néceffairement que fi nous ne profitons pas de cette huitaine pour attaquer l'Arrêt ou le Jugement, dès qu'elle fera paffée, nous ferons irrécevables à prendre cette fimple voie d'opposition. Il ne nous reftera que la voie extraordinaire de la requête civile, fi nous pouvons employer quelqu'une des ouvertures fixées par l'Ordonnance, car fi nous fommes fans moyens de ce côté-là, l'Arrêt sera inébranlable; il ne peut y avoir d'autre reffource que de l'attaquer au Confeil, s'il contient quelque contravention à l'Ordonnance.

Ce n'eft pas tout, il faut encore observer qu'à raifon d'un Arrêt rendu à l'Audience faute de plaider, nous pouvons avoir la voie de la fimple oppofition fermée. Elle ne l'eft jamais fans doute vis-à-vis un Arrêt rendu à l'Audience fur l'utilité d'un défaut pris au

Greffe faute d'avoir fait préfenter un Procureur; ces fortes d'Arrêts fe pourfuivent fur un placet qu'on appelle à l'Audience, & rien ne permet de mettre au rôle des caufes quand une feule des Parties eft préfentée. Alors la Partie présentée ne court qu'après les avantages que l'Ordonnance lui donne de faire condamner un Défaillant, en faifant prononcer à l'Audience fur l'utilité que le défaut pris au Greffe doit produire.

Mais fuppofons que toutes Parties aient un Procureur présenté; que l'un d'eux ait mis la cause au rôle, & l'ait dénoncé à l'autre Procureur; alors, s'il arrive que lorfque cette caufe fera appelée à tour de rôle, il ne fe trouve à l'Audience ni Avocat ni Procureur pour l'une des Parties, & que le Procureur ou l'Avocat de l'autre obtienne l'Arrêt, ce fera bien un Arrêt rendu faute de plaider, mais contre lequel la voie de la fimple oppofition ne peut être employée, car, en ce cas, dit l'article III du titre XXXV de l'Ordonnance, les Parties ne pourront fe pourvoir que par requête civile; la Déclaration du Roi qui fixe les causes qui doivent être mises au rôle, eft du 20 Février 1691, & rapportée dans le premier tome du Recueil Judiciaire, page 85.

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Cette exception, pour les caufes mifes au rôle, eft la feule; dans tous les autres cas, & fans diftinction, tout Arrêt, tout Jugement fouverain, même tous Jugemens rendus à l'Audience faute de plaider, par quels Juges que ce foit, peuvent être attaqués dans la huitaine de la fignification, par la voie de l'oppofition. Mais quand cette voie eft manquée pour n'avoir pas profité de la huitaine, on ne peut plus les attaquer que par requête civile, lorfqu'ils ont été rendus par des Juges fouverains, ou par la voie de l'appel, quand ils l'ont été par des inférieurs.

Sur quatre cas, fur lefquels nous avons dit qu'on pouvoit fe pourvoir contre les Arrêts & Jugemens

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