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TRAIT É DES IMPÉTRATIONS

DE CHANCELLERIE.

CHAPITRE PREMIER.

OUTRE

Des Chancelleries.

UTRE la grande Chancellerie de France, il y a près chaque Parlement des Chancelleries particulieres, où fe fcellent les impétrations dont nous allons parler, & dont l'exécution doit être faite dans le reffort de chacune d'icelles. Elles font compofées d'un Garde-Scel, d'un certain nombre de ConfeillersSecrétaires du Roi, dont les charges ennobliffent après un certain temps de fervice, ou fi on meurt en charge, des Confeillers-Rapporteurs-Référendaires, des Officiers Garde-Minutes, des Chauffe-Cires & Huiffiers qui y fervent.

L'hiftoire de ces Chancelleries eft fort étendue & ceux qui, à cet égard, voudront être inftruits peuvent voir Larroche-Flavin, des Parlemens de France, liv. 13, chap. 89 & 90. Ils trouveront, en

A

'cette partie, la citation de tous les Auteurs qui en ont traité, ainsi que les Lois qui ont été faites à ce fujet dans Brillon, Dictionnaire des Arrêts, verbo Chancellerie; nous ne nous occuperons que des Impétrations.

CHAPITRE II.

Du mérite des Impétrations. LES Impétrations font une matiere qui tombe

fouvent fous les yeux d'un homme d'affaires, mais de laquelle il eft rare qu'un Praticien fasse une étude particuliere; cependant, rien n'eft plus dangereux qu'un défaut de connoiffances à cet égard, & il n'y a que trop de procès perdus à fuite d'impétrations faites fans difcernement & mal-à-propos.

Il eft abfolument effentiel de connoître les cas dans lesquels il eft néceffaire de fe pourvoir par Lettres de Chancellerie; & pour cela, il faut des principes qui nous affurent dans nos démarches, qui nous démontrent clairement la néceffité de l'impétration, qui puiffent nous éclaircir fur les obftacles que nous ne pouvons vaincre fans ce remede; enfin, pour marcher à pas fûrs dans toutes les matieres qui en font fufceptibles, il est des regles qu'il faut connoître, & defquelles on ne peut s'écarter fans expofer l'intérêt des Parties.

Le premier mérite de l'impétration eft de nous ouvrir la voie, pour parer à des obftacles qu'on nous oppofe, & qu'on eft en droit de nous oppofer. Elle nous procure l'avantage de faire réparer l'injuftice qu'on nous a faite. C'eft, par exemple, par la voie de l'appel que j'arrête l'exécution d'une Sentence qui me préjudicie. C'eft par ce même appel que je fais réformer

cette même Sentence, & que, bien fouvent, je fais ordonner en ma faveur bien plus que ce que le premier Juge ou le Sénéchal m'avoit accordé, même tout ce qu'il m'avoit refusé; & voilà un triple avantage que m'a procuré le mérite de mon impétration, lorfque je l'ai faite avec fageffe.

C'eft en impétrant contre des actes, que je fais réparer le dol & la fraude qui y font intervenus. C'eft par cette voie que je puis remédier à la lésion pratiquée contre moi, & que je puis être remis au même état où j'étois avant d'avoir paffé un acte qui me porte du préjudice, pourvu que je vienne dans le temps qui m'est accordé pour cela, & que mon action ne foit point prefcrite, ainfi que nous aurons occafion de T'expliquer.

C'est en impétrant, que les femmes & les fils de famille fe font relever des obligations par eux contractées; les femmes, par le bénéfice du SénatusConfulte Velléïen; ies fils de famille, par le Macédonien. C'est en impétrant, que les débiteurs impuiffans jouiffent du bénéfice de la Loi, qu'ils fe mettent à l'abri des contraintes perfonnelles que les créanciers pourroient exercer contre eux; fans fela, ils ne feroient point écoutés dans leurs demandes.

C'eft par une impétration que je mets les Souverains en même de réformer tous les abus, & par des lettres en forme de Requête civile, que je fais renverfer un Arrêt contradictoire, lorfqu'elles font appuyées par de bons moyens, lorfque je puis me fervir des ouvertures que le Légiflateur a fixées dans le dernier titre de fon Ordonnance de 1667; & fur tous ces différens objets, je ne puis être écouté qu'après avoir impétré. Enfin, dans une infinité de cas qui se préfentent, le recours aux Lettres de Chancellerie eit abfolument nécessaire pour pouvoir être écouté dans la demande qu'on forme.

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Mais il ne fuffit pas d'impétrer, il faut encore que

le Juge prononce fur le mérite de l'impétration ; & voilà pourquoi il eft de la prudence & de la juftice, de ne point engager témérairement les Parties dans des impétrations folles, & de prendre toutes les précautions avant de le faire; de voir fcrupuleusement si elles feront fondées; fi la demande n'est point tardive ou hasardée; fans cela, on rifque de rendre inutile à une Partie une voie qui, dans d'autres circonftances, lui auroit procuré de grands avantages.

Chaque Impétrant doit avoir un objet, & c'est de cet objet qu'il faut juger avant d'impétrer; parce qu'une fois que l'action eft ouverte, on ne peut s'en départir fans s'expofer à des dépens, qui font toujours la fuite des actions mal intentées. Je tâcherai de ramener, fur chaque matiere, les principes qui lui font propres. Par cette raifon, je formerai un chapitre de chacun des objets que je traiterai, parce qu'un jeune homme pourra s'inftruire avec plus de facilité, qu'il n'y aura point de confufion dans l'étude qu'il en fera. Dans chaque chapitre, j'aurai soin de ne rappeler que ce qui fera propre à fon fujet, & je donnerai à proportion la formule des lettres dont il y fera parlé. J'en analyferai les difpofitions & les claufes autant que cela me paroîtra utile & néceffaire.

Je ne craindrai pas non plus d'expliquer, autant qu'il fera en moi, les chofes les plus fimples, celles mêmes qui paroiffent claires du premier coup d'œil, parce que ce qu'il y a de plus intelligible pour les uns, eft quelquefois très-obscur pour bien d'autres ; l'expérience de tous les jours me l'apprend à n'en pouvoir douter tel lira mon ouvrage, qui ne trouvera pas ce fyftême de fon goût, qui fera ennuyé par des explications qu'il croira déplacées : mais j'ai eu befoin qu'on me les donnât, & tant d'autres peuvent fe trouver dans mon cas, qui ne feront point fàchés que je me fois fait une loi de ne pas abandonner mon objet. Je n'ambitionne d'être lu que par ceux qui croiront avoir

befoin de ce qu'on appelle Inftruction premiere, & c'eft pour eux feuls que j'écris.

Commençons par les matieres d'appel; fixons-en les différentes efpeces dans un chapitre particulier & enfuite nous en viendrons au détail avant de donner les formules.

CE

CHAPITRE III.

Des Appels en général.

que nous appelons Appel en général, est une plainte autorisée par la Loi, & que nous portons devant le Juge fupérieur, contre un jugement rendu par le Juge inférieur; appellatio eft iniquitatis fententiæ quærela.

Cette plainte eft toujours reçue par l'impétration: mais il reste au Juge fupérieur à décider de fon mérite; & pour qu'il le puiffe, il faut néceffairement que le Plaignant, que nous nommons en terme de Palais Appelant, donne les motifs de fon appel, que nous appelons griefs, & que par ces motifs il foit prouvé que le jugement dont il réclame eft injufte, qu'il lui caufe des dommages qu'il ne doit pas fupporter.

Nous difons que cette plainte ou cet appel doit être porté devant le Juge fupérieur, parce qu'en effet, il n'y a qu'un Juge fupérieur à l'autre qui puiffe réformer ce que le premier a fait ; & s'il y a plufieurs degrés de juridiction, ce n'eft que pour porter un remedė affuré au caprice & à la mauvaise foi des Plaideurs & quelquefois à l'injuftice ou à l'ignorance des premiers Juges.

Il y a donc un ordre en matiere de juridiction, & cet ordre doit être confervé. Chacune connoît fon fupérieur immédiat; les difcuffions qui viennent d'être

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