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voir ordonner qu'elle fera exécutée de fon auto >> rité. »>

En vertu de cette impétration, l'Impétrant fait donner affignation à la Partie aux fins des Lettres, en fe conformant aux formalités que nous avons détaillées dans le Traité des Affignations. Dans l'exactitude des regles, il faudroit, en donnant copie des Lettres à celui qu'on affigne, lui donner également copie de la Sentence dont on demande l'autorisation: cependant, c'eft ce que très-fouvent les Parties ne font pas. Elles attendent que l'affigné ait fait préfenter un Procureur, & alors l'autre Procureur donne copie de la Sentence, en faifant la fommation pour en venir à l'Audience.

Cette négligence eft cependant condamnable d'abord, parce qu'il faut toujours inftruire l'affigné autant que l'on peut, que c'eft là le vœu de toutes les Ordonnances; que bien fouvent les Parties ne fe trouvent pas dans le lieu où la Sentence eft rendue, & en ignorent parfaitement les difpofitions. Enfuite fuppofons que cet affigné ne se présente pas, peut-on bien légitimement faire autorifer cette Sentence en défaut, quand jamais on ne l'a faite connoître à la Partie? Outre que cela eft injufte, ce n'eft pas régulier. La véritable marche doit donc être de donner copie de la Sentence arbitrale avec les Lettres & affignation.

CHAPITRE XI I I.

Des Lettres en intervention.

EN traitant des caufes d'Audience, nous parlerons

des demandes en intervention: mais quoique ces demandes foient prefque toujours formées par une Requête, que le Juge répond d'une Ordonnance d'en jugement, à fuite de laquelle les Parties viennent à l'Audience pour y plaider, ce qui ne fe fait point autrement devant les premiers Juges & devant les Sénéchaux; il arrive fouvent, en Cour Souveraine, que les Parties prennent la voie de l'impétration pour in

tervenir.

Ces Lettres, qui font toujours adreffées à la Cour devant laquelle le procès dans lequel on veut intervenir eft pendant, n'exigent, finon qu'on expose « qu'il » y a un procès pendant entre tel & tel; que l'Impé>> trant, ayant intérêt d'être reçu Partie intervenante, >> voudroit y demander qu'en le recevant Partie inter» venante à ladite instance, il foit reçu à y prendre » telles conclufions qu'il avifera ». Il peut même les prendre s'il veut dans les Lettres; car il eft libre aux Parties de les libeller.

On verra ailleurs que, l'impétration faite, il n'y a d'autre formalité à remplir, que.de la faire fignifier de Procureur à Procureur, & fur un fimple acte pour venir plaider, les Parties viendront à l'Audience. L'intervenant fera connoître l'intérêt qu'il a d'être Partie dans le procès car ce n'eft qu'autant qu'il y en aura un réel que l'intervention fera reçue.

CHAPITRE XI V.

Des Lettres en ceffion de biens.

LA ceffion des biens eft un bénéfice, dont la

premiere introduction remonte au Droit Romain, & au moyen duquel aujourd'hui, celui qui eft furchargé de dettes, & pourfuivi par fes créanciers, fe met à couvert de leurs pourfuites, de la contrainte au corps, de la prifon, en leur abandonnant fes biens. C'eft une ressource pour les miférables, bien justement établie, quand ils font de bonne foi, quand des malheurs véritables les ont mis dans le cas d'y recourir; non culpá fuá, fed fortunæ ludibrio.

C'eft, dit la Loi Debitoribus 11, Cod. ex quibus caufis infamia irrogatur, miferabile auxilium, flebile adjutorium, refugium miferorum, & fouvent on pourroit dire, en abusant du bénéfice de la Loi, refugium peccatorum.

Tout demandeur en ceffion de biens étoit odieux chez les Romains, à tel point que, par la Loi des douze Tables, les créanciers étoient les maîtres de la liberté de leur débiteur qui étoit insolvable : mais ce droit trop rigoureux fut modifié par la Loi Julia. Cependant à Rome, on ordonna que ceux qui avoient fait ceffion de biens porteroient un bonnet verd, pour faire voir, comme le dit M. Pafquier, en fes Recherches, liv. 4, chap. 10, que celui qui fait ceffion de biens eft devenu pauvre par folie.

Si nous lifons Guy-Pape, dans fa Question 343, nous voyons que pour expofer celui qui avoit fait ceffion de biens à la rifée & au mépris public, on le faifoit mettre le cul nud fur une pierre, qu'on avoit

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placée devant l'Auditoire. Louis XII, dans fon Ora donnance de 1510, Article LXX, s'explique en ces termes : « Pour ce que plufieurs Marchands & autres » ne craignent à faire ceffion de biens, parce qu'ils » y font reçus par Procureur, ou en lieux fecrets >> nous ordonnons que d'hors en avant, nul ne soit >> reçu à faire ladite ceffion de biens par Procureur, » ainsi se fera en perfonne, en jugement à l'Audience, » defceints & la tête nue. » Ce mot defceints fignifie fans porter une ceinture, que le débiteur abandonnoit à fes créanciers, & dans laquelle il étoit d'ufage alors de porter fon argent.

Les chofes ont bien changé; autant les Lois étoient dures & rigoureuses, autant font-elles douces aujourd'hui. Dès qu'il paroît de la bonne foi dans le débiteur qui réclame cette grace, les Cours Souveraines l'admettent à la ceffion des biens, fous des formalités bien plus simples & moins déshonorantes.

Ce n'eft pas qu'il y ait bien du temps que la formalité de faire porter le bonnet verd foit fupprimée puisque nous trouvons un Arrêt du 15 Mars 1706 qui prononça cette peine. Il est rapporté par Lapeyrere, lettre C. Il ne feroit pas même mal que la Loi fût un peu plus rigoureufe qu'elle n'eft: car, en vérité, ces demandes font aujourd'hui fort multipliées, & il est beaucoup des ames baffes qui, fous l'efpoir d'être reçues à ce bénéfice, trompent bien du monde impu

nément.

Nous devons confidérer la demande en ceffion de biens fous deux rapports. Elle peut être ou volontaire ou forcée. Il y a bien de la différence de l'une à l'autre.

Elle eft volontaire, lorfque les créanciers ont conçu des foupçons que leur débiteur a agi de mauvaise foi, ou qu'il a mal justifié de ses pertes, de fes difgraces & qu'ils fe refusent de lui donner du délai, ou de lui faire des remises, parce qu'alors le débiteur n'a d'autre

reffource que de leur faire un abandon général de tout ce qu'il a. Cet abandon eft consenti & accepté par les créanciers à la pluralité des voix, eu égard à leurs créances; & quand la plus grande partie y consent, cette ceffion eft acceptée, & les créanciers fe paient fur le produit au fol la livre.

Voilà le genre de ceffion qu'on appelle volontaire ; & voici l'avantage qui en réfulte pour le débiteur. C'eft qu'il demeure entierement quitte & libéré envers fes créanciers de tout ce qu'il pouvoit leur devoir; au point, qu'ils ne peuvent plus avoir recours contre lui, ni agir fur les biens que ce débiteur peut acquérir depuis la ceffion. La raifon en eft bien fimple, puifque les créanciers, en acceptant volontairement l'abandon qui leur a été fait, fe font auffi volontairement contentés, pour leur paiement, de ce qui leur reviendroit fur les biens. C'eft proprement un contrat qu'ils ont paffé avec leur débiteur, & qui contient une renonciation à tout ce qu'ils perdent dans ce moment.

La ceffion des biens que nous appelons forcée, eft bien différente par elle-même & par fes effets. Celle-ci s'appelle judiciaire, parce qu'elle ne peut être reçue que par les Juges établis pour en connoître, & qu'on la reçoit malgré l'oppofition que peuvent faire les créanciers.

Par exemple, un débiteur eft accablé de contraintes perfonnelles; il eft détenu dans les prifons; il eft dans l'impuiffance de fatisfaire fes créanciers; le tableau des pertes qu'il a faites; des malheurs qu'il a effuyés; la juftification qu'il eft en état d'en faire; la néceffité où il feroit de finir fa vie dans les prifons, le mettent dans le cas d'implorer le bénéfice de la Loi. Il impetre des Lettres pour être reçu à demander cette grace, & il veut forcer par là fes créanciers à un filence que la Juftice leur impofera, en déchargeant ce débiteur des contraintes qu'ils ont contre lui, en le déchargeant des fers qu'il porte.

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